Comment le Canada peut-il faire face à un Donald Trump hostile ? L’histoire nous donne quelques indices…

La menace de Donald Trump d’imposer des droits de douane de 25 % sur les produits canadiens — combinée à son dénigrement de la souveraineté canadienne, y compris sa récente menace de prendre le pays « par la force économique » — inquiète à juste titre les Canadiens.

Malheureusement, les premières réactions du gouvernement fédéral face à Trump 2.0 n’ont pas inspiré confiance.

Le premier ministre Justin Trudeau et le président élu Donald Trump lors d’un récent dîner au domaine Trump de Mar-a-Lago en Floride.
(X/@JustinTrudeau)

Le ton a été donné avec ce que le stratège libéral de longue date Peter Donolo a qualifié de « pèlerinage paniqué – et humiliant » du premier ministre sortant Justin Trudeau à Mar-a-Lago.

Les mesures frontalières du gouvernement de 1,3 milliard de dollars – y compris « un groupe de travail de renseignement aérien doté de plus d’hélicoptères et de drones » et une « force de frappe conjointe nord-américaine » pour lutter contre le crime organisé – sont, dans un sens, encore pires : des réponses à des problèmes qui n’existent que dans L’imagination enfiévrée de Donald Trump.

Le déficit commercial, une source d’inquiétude

Les affirmations de Trump concernant l’immigration illégale (en hausse ces dernières années, mais bien en deçà des niveaux observés à la frontière américano-mexicaine) et les importations de fentanyl (moins de 20 kilogrammes en 2023) interceptées par les États-Unis à leur frontière nord) sont ridicules. Les autorités canadiennes le savent.

Le véritable problème de Trump est le déficit commercial des États-Unis avec le Canada.

Ces politiques frontalières sont problématiques en elles-mêmes. Mais ils n’achèteront pas non plus la paix, car il ne s’agit pas d’une question politique, mais d’un exercice de domination pour le plaisir de la domination.

Le président américain Donald Trump savoure un moment dans la cabine d’un camion garé à la Maison Blanche en mars 2017.
(Photo AP/Andrew Harnik, dossier)

Qu’est-ce qui sera sacrifié ?

L’apaisement – ​​déterminer le prix à payer par Trump et le payer – ne fonctionnera pas. Que sacrifiera un gouvernement libéral ou conservateur au nom du maintien de la frontière ouverte au commerce ? Jusqu’où peut-on aller ?

Une politique d’apaisement empoisonnerait également l’exercice démocratique. Avec chaque politique et chaque loi adoptée, les Canadiens se demanderont si leurs gouvernements agissent dans leur intérêt ou dans celui de Trump.

C’est là le dilemme politique peu enviable du Canada pour au moins les quatre prochaines années : comment faire face à des États-Unis de plus en plus hostiles tout en agissant, et en étant perçu comme agissant, dans le meilleur intérêt du Canada.

Les élus canadiens doivent tracer et reconnaître les limites entre l’intérêt national et les risques qu’une politique d’apaisement aille à l’encontre de la souveraineté.

Heureusement, l’histoire fournit quelques indications. Ce n’est pas la première fois que les États-Unis constituent une menace économique existentielle pour le Canada. Deux crises en particulier, survenant à 136 ans d’intervalle, offrent d’importantes leçons pour les quatre prochaines années et au-delà.

Première leçon : ayez toujours un plan

Notre première leçon : avoir les bonnes réponses aux problèmes existants.

Les attentats terroristes du 11 septembre 2001 contre les États-Unis ont modifié la perception que les Américains ont de leurs deux frontières. La sécurité est ainsi devenue une préoccupation majeure, supplantant l’idéologie alors dominante en faveur de l’ouverture des frontières et du commerce transfrontalier.

La menace qui pesait sur l’économie canadienne était alors aussi claire qu’elle l’est aujourd’hui. Soudain, les États-Unis ont exigé des mesures de la part des deux voisins frontaliers. Seul problème : les Américains n’avaient pas de plan car, ironiquement, ils n’avaient jamais prêté beaucoup d’attention aux infrastructures frontalières.

Un agent des douanes américaines se promène avec un chien dressé pour détecter les explosifs autour d’une file de voitures entrant aux États-Unis en provenance du Canada, au poste d’inspection frontalier de Peace Arch, près de Blaine, Washington, en août 2003.
(Photo AP/Ted S.Warre

Heureusement pour le Canada, les responsables canadiens réfléchissaient depuis longtemps à la manière de moderniser la frontière et poussaient les États-Unis à prendre au sérieux la sécurité de leur frontière. Ainsi, lorsque les États-Unis ont redécouvert leur frontière nord, le Canada avait une politique prête à être déployée.

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L’accord qui en a résulté répondait à la fois aux intérêts économiques du Canada et à ceux des États-Unis en matière de sécurité. Les éléments clés de l’accord reposaient sur des propositions que le Canada préconisait depuis des années.

Le gouvernement fédéral a bien réagi au choc du 11 septembre parce qu’il disposait de politiques prêtes à être mises en œuvre en cas de besoin. Les libéraux au pouvoir ont pris en charge la planification, faisant de l’intérêt national leur priorité.

Les économies canadienne et américaine sont aussi étroitement liées qu’elles l’étaient en 2001 – sinon plus. Cela signifie que les gouvernements fédéral et provinciaux du Canada doivent élaborer des politiques sans improvisation. Les réponses aux demandes imminentes des États-Unis seront donc faites dans le meilleur intérêt du pays.

Deuxième leçon : se concentrer sur le front intérieur

Deuxième leçon : regardez à l’est, à l’ouest et au nord, mais pas au sud.

Comme je l’ai déjà dit, l’interdépendance entre le Canada et les États-Unis, autrefois notre plus grande force, s’est transformée en une vulnérabilité.

Mais, encore une fois, nous y sommes déjà allés.

En 1866, les États-Unis ont abrogé le Traité de réciprocité entre le Canada et l’Amérique du Nord britannique. À l’époque comme aujourd’hui, l’économie américaine exerçait une forte influence sur les colonies britanniques du nord.

Mais cette attirance n’est pas un phénomène naturel. Elle est régie par des lois et des traités. Des flux commerciaux incertains pourraient être interrompus. C’est précisément une telle interruption qui a en partie incité les dirigeants politiques canadiens à s’unir au sein de la Confédération, menant ainsi à la naissance du Canada.

La menace tarifaire de Trump, tout comme les événements de 1866, devraient rappeler aux Canadiens que l’accès au marché américain peut être entravé, voire éliminé. Cela ne peut jamais être garanti à 100 %. Aujourd’hui, comme il l’a fait il y a plus de 150 ans, le Canada doit réinvestir dans l’établissement de liens économiques, politiques et culturels transcanadiens.

Les domaines particulièrement importants sont l’énergie : 70 % du gaz naturel de l’Ontario en 2023 provenait des États-Unis, de la fabrication et du commerce intérieur.

Une grande rangée de camions de transport traverse un pont.
Des camions de transport traversent le pont Ambassador entre Détroit et Windsor, en Ontario.
(Photo AP/Paul Sancya)

Une voie à suivre

Pour les élus canadiens, ces leçons d’histoire offrent des perspectives intéressantes pour l’avenir. Pour les citoyens, ils constituent un point de référence pour juger des relations de nos gouvernements avec les États-Unis.

Nous devons nous assurer que nos propositions visant à répondre aux préoccupations des États-Unis sont bien planifiées et qu’elles favorisent les intérêts canadiens. Et que les gouvernements renforcent les liens interrégionaux.

Pour suivre ces deux leçons, il faudra un niveau de planification que les Canadiens n’ont pas connu depuis les années 1960. Cela signifie également renforcer les capacités de l’État et mener des débats réfléchis sur ce que les citoyens souhaitent que leur pays devienne. Cela implique également un degré de réflexion stratégique difficile à trouver actuellement chez nos élus.

Cependant, ils auraient intérêt à être proactifs – et à prendre acte d’une situation qui n’a pas été choisie par le Canada pour décider quoi en faire.

 
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