Réunion, Guadeloupe, Caraïbes… le savoir-faire polynésien sur les SWAC s’exporte

Réunion, Guadeloupe, Caraïbes… le savoir-faire polynésien sur les SWAC s’exporte
Réunion, Guadeloupe, Caraïbes… le savoir-faire polynésien sur les SWAC s’exporte

La société polynésienne Airaro, qui a travaillé sur les trois SWAC mondiaux en opération, à Bora Bora, Tetiaroa et Taaone, a signé un partenariat avec un poids lourd français des énergies renouvelables, Albioma. Elle devrait déboucher, dans les cinq prochaines années, sur la construction de plusieurs SWAC à l’étranger. La petite structure basée à Papeete a également été contactée par la Banque mondiale pour mener des prospections dans les Caraïbes. Et elle compte proposer son expertise pour réaliser des systèmes de climatisation à l’eau de mer à Grenade ou en République dominicaine.

Il y a eu le tout premier projet commercial de l’histoire, inauguré en 2006 à Bora Bora, et qui après une longue panne, a plus que jamais rafraîchi l’Intercontinental Thalasso. Il y avait celui qui faisait parler tout le monde sur la planète, et que Marlon Brando lui-même rêvait de réaliser, à Tetiaroa. Et puis il y a eu « la plus longue du monde », celle qui, après un long parcours administratif, technique et même juridique, a fini de convaincre les sceptiques et les investisseurs, à l’hôpital de Taaone. Depuis près de 20 ans, c’est en Polynésie que les CSAO connaissent leurs plus grands succès et leurs plus graves pertes. Mais aujourd’hui, la technologie aiguise les appétits bien au-delà des murs de la Polynésie. Pour preuve : le partenariat signé le mois dernier par la société polynésienne Airaro avec Albioma, poids lourd français des énergies renouvelables. Un contrat qui devrait, enfin, permettre d’exporter le savoir-faire polynésien en matière de « technologies bleues ».

Le CHPF a « fini de convaincre » de l’efficacité du Swac

Cette signature n’est pas une surprise pour cette SAS spécialisée dans les énergies marines qui peut, après une douzaine d’années d’existence, revendiquer son expérience des trois SWAC polynésiens. « Bora », « Tétia » ? Le co-fondateur de l’entreprise, David Wary, a supervisé sa création, avant de reprendre leur maintenance avec Airaro, jusqu’en 2019. Le Taaone ? La société a fourni, contre toute attente, une assistance à la gestion du projet au nom du pays. Bref, la petite structure ancrée en Polynésie n’a plus à prouver son savoir-faire dans ces systèmes de climatisation à l’eau de mer (Sea-Water Air Conditioning) qui utilisent de longs tuyaux pour puiser l’eau froide des profondeurs et faire baisser la facture d’électricité des grandes entreprises. consommateurs de « climatisation ».

Si la technologie intrigue depuis de nombreuses années – Airaro avait déjà été approché et répondu à des appels à projets externes dès 2015, sans succès –, c’est la mise en œuvre du SWAC CHPF qui a fini par convaincre. Car contrairement aux deux hôtels pionniers du groupe Pacific Beachcomber, le Taaone consommait de l’électricité à pleine capacité avant d’être connecté. “Avec l’hôpital, nous avons pu démontrer que plus de 300 millions de francs étaient économisés chaque année sur la facture d’électricité, et cela a eu un impact sur la compréhension qu’avaient les décideurs nationaux de cette technologie”, explique Jean Hourçourigaray, l’autre co-fondateur d’Airaro et qui en est aujourd’hui le président-directeur général. C’était la démonstration qu’on pouvait équiper un acteur public, dans un appel d’offre public, et en tirer tous les bénéfices en termes économiques, en l’occurrence pour le système de santé.

https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/SWAC-1.wav

AFD, Ademe, Caisse des Dépôts ou encore Commission Nationale de Régulation de l’Energie… Face à ce succès, toutes les institutions financières françaises, souvent à la recherche d’investissements correspondant à leurs objectifs de développement durable, ont fini par tout donner. signature au porteur de projets polynésiens, incité à se tourner vers le reste des territoires d’outre-mer.

La Réunion, la Guadeloupe, l’outre-mer…

Difficile de dire que le swac y est inconnu. Aux Antilles et à la Réunion, des appels d’offres ont été lancés depuis une dizaine d’années. Des acteurs locaux ou nationaux, pour la plupart de grands groupes, avaient conquis les marchés… sans jamais parvenir à leurs projets. Par manque d’expérience, ou par excès d’appétit, analyse Jean Hourçourigaray : « Certains sont arrivés en se disant, le swac c’est un tuyau, plus il est gros, plus ça rapportera d’argent. Fake. La canalisation doit être adaptée et optimisée aux besoins du client »note le professionnel, qui explique également le succès de son entreprise par l’efficacité des études préparatoires. “Le fait de l’avoir passé trois fois nous permet de savoir ce que nous voulons trouver”. Et Airaro pense l’avoir trouvé dans les DOM-TOM : deux de ses demandes de subventions – d’environ 120 millions de francs chacune – sont en cours d’examen à La Réunion et en Guadeloupe pour réaliser des études sur des sites déjà ciblés. Mais pour avancer dans la réalisation de ces projets coûteux – entre 4 et 6 milliards de francs chacun – la petite SAS polynésienne avait besoin d’un partenaire de taille. C’est tout l’objet du partenariat avec Albioma.

Ce producteur d’électricité, très implanté outre-mer, et dans une moindre mesure en et à l’international, dispose déjà de centrales thermiques converties à la biomasse, d’un grand parc photovoltaïque de Mayotte à la Guyane en passant par les Antilles et la Réunion, et plus récemment d’unités géothermiques à l’international. Le swac lui permet d’ajouter une « quatrième corde à son arc ». Et elle a les moyens de le financer : récemment rachetée par le fonds d’investissement américain KKR, Albioma n’a plus que “aucun problème pour financer plusieurs centaines de millions d’euros d’actifs”. Objectif donc : concrétiser, en cinq ans, le potentiel des Swacs dans les collectivités d’outre-mer. « Nous avons déjà deux projets désignés et balisés, nous aimerions en désigner deux ou trois autres en attendant, poursuit Jean Hourçourigaray. Et se donner cinq ans pour fabriquer le premier ou les deux premiers swacs est un calendrier tout à fait raisonnable. Nous avons pu le faire plus rapidement. Nous pensons signer un accord tout à fait réalisable, dans leurs objectifs comme dans les nôtres.

https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/SWAC-2-albioma.wav

…Avant les Caraïbes, avec la Banque Mondiale ?

Le partenariat avec Albioma est limité à l’étranger et le groupe ne prendra aucune participation dans Airaro. La petite entreprise, nommée en référence à une princesse de Raiatea, qui « sauva son peuple de la noyade » lors d’une vengeance divine, restera donc basée en Polynésie et pourra librement se tourner vers d’autres marchés. Certes, les Swacs ne peuvent pas être installés partout : pour être efficaces, ces canalisations doivent desservir de gros consommateurs de climatisation – dans les pays chauds donc – installés à proximité d’une côte où la bathymétrie (le relief des profondeurs) permet d’accéder rapidement à l’eau froide. Comme c’est le cas au pied des vertigineuses falaises polynésiennes. Les investisseurs saoudiens intéressés, par exemple, ont fait marche arrière lorsqu’ils ont appris que les eaux de la mer Rouge étaient trop chaudes en profondeur pour être utilisées efficacement. Les promoteurs ciblent également particulièrement les zones où l’électricité est chère et où l’investissement est donc plus rapidement rentabilisé.

Airaro a été chargé, en 2023, de trouver ces conditions dans les Caraïbes par la Banque mondiale. Une première pour une entreprise polynésienne, qui a également été retenue suite à un appel d’offres face à de grands groupes mondiaux. Dix-sept pays de la zone ont été étudiés par la société polynésienne, 25 projets potentiels ont été identifiés… Et deux d’entre eux, à Grenade et en République Dominicaine, devraient faire l’objet d’une nouvelle implantation. concurrence pour des études plus approfondies – et plus coûteuses, avec un budget estimé à 240 millions de francs par appel d’offres. Des études qui détermineront, d’ici deux ans, si l’institution financière internationale finance ou non les projets complets. Airaro compte bien entendu être en lice pour conquérir ces marchés.

Encore du potentiel en Polynésie

En attendant, c’est aussi en Polynésie que l’entreprise souhaite voir les projets avancer. Parce qu’il reste du potentiel pour le Swac au fenua et que le Pays a inscrit le développement de nouveaux projets locaux dans sa feuille de route sur l’économie bleue. L’idée, autrefois évoquée, d’un Swac pour la « ville administrative » de Papeete, qui alimenterait les bâtiments publics le long de l’avenue Pouvanaa, est aujourd’hui jugée irréaliste : « de gros travaux devraient être réalisés dans tous les bâtiments »souligne Jean Hourçourigaray. Il faut regarder plus à l’ouest. « Nous n’en aurons pas des dizaines, mais d’un autre côté il est évident que l’aéroport sera, dans sa configuration future, une plateforme qui pourrait accueillir un SWAC. Ou si demain, la relance du Village Tahitien devait avoir lieu, l’ajout d’un SWAC signifierait que l’offre touristique de ce complexe serait à 75% renouvelable – 50% serait assurée par le SWAC, avec un réseau électrique qui devrait atteindre -même les 50% renouvelables. 75% est un objectif qui semblait inaccessible il y a dix ans.»

https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/SWAC-3-en-polynesie.wav

La petite entreprise ne s’appuie pour l’instant que sur ses deux fondateurs, mais elle compte réétoffer ses équipes – qui avaient fondu pendant le Covid – pour atteindre une dizaine de personnes. Travailler sur les swacs mais pas seulement : Airaro milite également pour que la Polynésie redevienne pionnière en matière d’énergie thermique océanique. Une technologie sœur de SWAC, qui permettrait au fenua de parfaire son avance et son image en matière de « blue tech » et, là encore, d’exporter son savoir-faire. La construction d’un premier « démonstrateur » ETM fait également partie des objectifs avancés par le gouvernement dans sa feuille de route pour l’économie bleue. Airaro préférerait passer directement au stade d’unité de production. La balle est, de ce côté, dans le camp du Pays.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

NEXT Une marche blanche pour sauver Rillette, le sanglier menacé d’euthanasie