Le jour même du vote de censure contre le gouvernement de Michel Barnier, la nouvelle est passée quasiment inaperçue. Mercredi 4 décembre, le gouvernement renversé a mis en consultation un projet de décret qui entend modifier les catégories de projets soumis à la Commission nationale du débat public (CNDP). L’exécutif veut exclure du champ de CNDP tout projet industriel dont le coût dépasse 300 millions d’euros, sous prétexte d’accélérer la réindustrialisation du pays.
Cette autorité indépendante, créée en 1995 par Michel Barnier, alors ministre de l’Environnement, veille à ce que le public soit bien consulté dans le développement de projets ayant un impact sur l’environnement. Ce fut par exemple le cas de l’ouverture d’une mine de lithium dans l’Allier ou de la création d’usines de batteries électriques dans le Nord.
Consultation en ligne jusqu’au 27 décembre
Si les recommandations recueillies par le CNDP ne sont pas contraignants, ils peuvent jouer un rôle important. En 60 % des cas, le projet sort modifié. En 2022, l’organisme concluait que le projet éolien offshore au large de l’île d’Oléron ne donnait pas lieu à « pas de consentement de la population ». Face à ces résultats, l’État a choisi une autre localisation.
Le décret gouvernemental fait l’objet d’une consultation publique en ligne jusqu’au vendredi 27 décembre. Il a fait jusqu’à présent l’objet de 2 500 contributions, pour la plupart négatives. Le projet suscite également une levée de boucliers auprès des associations environnementales.
« Ce projet de décret montre que l’Etat a peur de la parole citoyenne »
For the Générations futures association, « sous couvert d’accélérer la réalisation des projets industriels »ce texte est « une nouvelle régression du droit à l’environnement ». Ilaria Casillo, vice-présidente du CNDPestime que, si le décret est adopté, « la population n’aura plus son mot à dire sur ces projets et elle ne sera même pas informée de leur existence, de leur impact, de leur coût… ».
Or, ces projets liés à la décarbonation de l’industrie, et donc à la transition écologique, « méritent d’être débattus, car ils sont au cœur de la transformation des territoires »insiste-t-elle. Lors des débats, « il n’y a pas de tabou, les citoyens peuvent parler de tout et avoir accès à des informations fiables pour se faire une opinion ». Pour Ilaria Casillo, « ce projet de décret montre que l’Etat a peur de la parole citoyenne ».
Ce n’est pas la première fois que le CNDP est dans le viseur de l’exécutif. L’ancien ministre de l’Économie Bruno Le Maire a tenté de l’éliminer au printemps avec le projet de loi de simplification, finalement interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale.
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