Il arrive que certaines comparutions immédiates débutent par la présentation de « conclusions de nullité » de la part de l’avocat. Ici, la défense demande l’annulation de l’audience et la libération de son client en réponse à un procureur trop empressé qui avait signé le papier ordonnant une comparution immédiate avant d’entendre l’accusé et son avocat.
C’est une audience qui commence comme d’habitude. On vérifie l’identité de l’accusé – ici, M. E., 19 ans –, on explique de quoi il est accusé – ici, conduite sans permis, détention d’un véhicule acquis par fraude, possession d’un revolver – on demande à celui qui attend dans le box s’il souhaite être jugé maintenant ou obtenir du temps pour préparer sa défense et il lui est rappelé qu’il a le droit de faire des déclarations spontanées, de répondre aux questions ou de garder le silence – “en bref , cela veut dire que vous n’êtes pas obligé de répondre”, a-t-il déclaré. juge traduit.
Lorsqu’il y en a, c’est maintenant que l’avocat a la possibilité de présenter des « conclusions de nullité ». Dans ce cas, Maître Frédéric Beaufils demande l’annulation du rapport de comparution immédiate. Si elle était accordée, cette annulation mettrait fin à cette audience avant qu’elle n’ait réellement commencé.
En un mot, « les droits de la défense ont été bafoués », résume l’avocat. Sa démonstration commence par rappeler que selon l’article 393 du Code de procédure pénale, un débat contradictoire est nécessaire avant que le procureur puisse décider de recourir à la procédure de comparution immédiate (plutôt qu’un autre type de procédure, une comparution sur aveu préalable de culpabilité, par exemple). exemple). Jurisprudence à l’appui : « La décision sur l’orientation d’une procédure pénale ne peut être prise avant un débat contradictoire en présence de l’avocat de l’accusé, après que ce dernier a pu s’exprimer » (17e chambre correctionnelle du TJ de Bobigny, 12 juillet 2023).
Or, en l’espèce, le représentant du ministère public avait déjà signé et apposé le symbole de Marianne sur le procès-verbal demandant le recours à la comparution immédiate avant d’avoir entendu Me ou son avocat. “Je ne sais pas quels effets mes déclarations ont pu avoir mais la jurisprudence va dans le sens d’une annulation de ce renvoi irrégulier”, poursuit l’avocat qui demande la relaxe de son client.
Il termine en adressant un mot de remerciement à la procureure, qui lui a transmis la jurisprudence sur laquelle elle entendait s’appuyer pour répondre aux conclusions de l’avocat. « Sauf que cette jurisprudence n’a rien à voir là-dedans », assure-t-il. « Après les propos de l’avocat, je suis assez gêné de répondre… Je me suis trompé dans le jugement que j’ai transmis et je n’ai donc pas fourni celui sur lequel je me fonde », commence, penaud, le procureur.
Le jugement qu’elle n’a pas transmis date du 12 mars 2024 et n’est pas définitif puisqu’un appel a été formé. Or, cet arrêt de la cour d’appel indique que la décision du magistrat peut changer jusqu’au dernier moment, même lorsque le document a déjà été signé. Elle suggère à l’avocat d’y jeter un œil. Il le fait et la pièce devient silencieuse pendant qu’il lit. « Il faudra peser ce que vaut un jugement définitif du tribunal par rapport à un jugement non définitif », répond-il. Le procureur a de nouveau la parole, afin de respecter le protocole : « Le procureur de la République a constaté que le procès-verbal avait été signé avant le débat contradictoire mais les droits de la défense eux-mêmes ont été respectés », assure-t-elle.
Après une pause de plus de 30 minutes pour statuer sur la conformité du procès-verbal de comparution immédiate, les juges sont revenus, ont annoncé son annulation et ont invité le ministère public à mieux agir. “Cela ne veut pas dire que vous êtes quitte”, rappelle le juge à l’accusé. Pas de quoi effacer son sourire. Avant de quitter le box et d’être libéré, il demande sa carte à son avocat commis d’office.