Le 19 décembre à Ajaccio, Maître Don-Georges Pintrel, l’avocat d’Adel Khalaoui, s’est exprimé aux côtés des représentants de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), Elsa Renaut et André Paccou. Ensemble, ils ont exposé une situation qu’ils jugent « profondément injuste » : l’expulsion programmée d’un homme intégré en Corse depuis plus de deux décennies.
Maître Pintrel prend la parole pour rappeler les faits. Adel Khalaoui, 53 ans, de nationalité tunisienne, réside en Corse avec un titre de séjour valable jusqu’en 2028. Marié depuis 2016, il a adopté un enfant avec son épouse en 2022 et travaille depuis plusieurs années dans le bâtiment pour le même employeur. “ Tout semblait indiquer qu’il avait trouvé sa place dans notre société. »a souligné l’avocat, avant de préciser : « Mais aujourd’hui, l’administration met de côté 22 années de vie et d’efforts en invoquant d’anciennes condamnations pénales. »
Une expulsion motivée par des faits anciens
La procédure d’expulsion s’appuie sur des condamnations pénales pour violences conjugales, survenues en 2019 et 2020. Bien que graves, ces faits ont été jugés et sanctionnés à l’époque. “M. Khalaoui a purgé sa peine et s’est réconcilié avec sa femme, qui n’a jamais voulu se séparer de lui. »a rappelé l’avocat. En effet, après enquête, le juge a converti la peine en placement sous surveillance à domicile, permettant au couple de rester uni.
Pour Maître Pintrel, cette décision d’expulsion revient à rouvrir un dossier classé par la justice : « Ce passé ne constitue ni une menace actuelle ni une raison suffisante pour justifier une telle mesure. » L’avocat souligne également qu’en juillet dernier, la commission départementale des expulsions avait rendu un avis défavorable, estimant que les conditions légales n’étaient pas réunies.
Une procédure jugée expéditive et déshumanisante
Malgré cet avis, le préfet de Corse a maintenu son arrêté d’expulsion, rendu le 8 octobre 2024. Ce choix, pour Elsa Renaut, représentante de la LDH, illustre un « une politique migratoire aveugle et inhumaine ». Elle dénonce une procédure accélérée, marquée par la remise d’un simple post-it indiquant la date de l’expulsion.
Mme Khalaoui, présente à la conférence, n’a pu retenir ses larmes en évoquant cette situation. “Elle a envoyé de nombreux courriers pour demander la clémence au préfet, mais n’a reçu aucune réponse”, expliqua maître Pintrel. Pour le couple, cette expulsion signifierait la fin d’une vie commune construite et la remise en question de l’adoption de leur enfant.
Un symbole des dérives des politiques migratoires
La LDH a profité de cette conférence pour replacer le cas d’Adel Khalaoui dans un contexte plus large. André Paccou, porte-parole de l’organisation, a dénoncé les dangers de la loi “immigration d’asile”adopté en janvier 2024. » Ce texte, soutenu par l’extrême droite, vise à systématiser les expulsions, sans tenir compte des situations humaines ni des droits fondamentaux.a-t-il déclaré.
Pour Elsa Renaut, cette affaire révèle l’injustice d’un « double peine » : « M. Khalaoui a été jugé et a purgé sa peine. Pourquoi devrait-il être puni une seconde fois par l’expulsion, qui ne concerne que les étrangers ? » Elle a également rappelé que la directive européenne de 2003 impose de considérer l’impact d’une expulsion sur la famille, aspect ignoré dans cette décision.
Un appel au préfet avant qu’il ne soit trop tard
A la veille de la date prévue pour la destitution de M. Khalaoui, ses partisans espèrent un sursaut de la part de l’administration. « Nous demandons au préfet de suspendre cette mesure jusqu’à ce que le tribunal administratif de Bastia se soit prononcé sur le recours déposé » plaida maître Pintrel.
Pour Adel Khalaoui, l’enjeu dépasse la question administrative. « Il ne s’agit pas seulement d’un seul homme, mais d’un combat pour le respect des droits fondamentaux et des valeurs de l’humanité »conclu par André Paccou.