Rénovation, économies d’énergie, écologie… A l’occasion de la consultation internationale « Quartiers de demain » visant à améliorer le cadre de vie des habitants de dix territoires pilotes, retour sur quelques projets conçus comme des laboratoires expérimentaux.
Il avait toujours connu le Petit Séminaire. C’est dans ce quartier du nord-est de Marseille, situé au fond d’une vallée, que Guy Lucchesi garde tous ses souvenirs d’enfance. Il montre un cyprès, à côté duquel il venait boire l’eau de la source : il y avait là une maison de campagne, qui «dépendait du grand séminaire Saint-Joseph« . Puis, à quelques pas, il dévoile son “bijou”un coin de verdure où pousse une herbe touffue, entre de grandes résidences collectives, avec vue sur le massif collineux au loin. « C’est un vestige du pays d’Arnoux, qui était une terre d’aventures pour les enfants comme nous, jusqu’à ce qu’ils construisent les Bougainvilliers »dit-il encore. Longtemps, Guy Lucchesi a craint de retrouver à cet endroit les projets immobiliers qui rongeaient le reste du territoire : ces jours-ci, quatre grues déchirent le paysage en contrebas.
A la tête du comité d’intérêt du quartier Beaumont-Plateau, il s’est battu pour limiter la hauteur des immeubles à 16 mètres dans cette zone constructible. Mais c’était avant qu’elle ne rejoigne le projet de casting vert. Le Petit Séminaire fait en effet partie des dix quartiers prioritaires de la ville sélectionnés pour la consultation internationale « Quartiers 2030 » destinée à imaginer les « quartiers de demain ». Le projet marseillais se distingue par son entrée paysagée : un réseau vert de plus de deux hectares qui longe la rue de la Maurelle. Un espace loin d’être anodin tant cette rue a écrit une partie de l’histoire du logement social à Marseille.
À la fin des années 1950, la cité du Petit Séminaire y fut construite pour absorber une partie des bidonvilles d’après-guerre. Pas un grand bar mais quatre petits bâtiments, comprenant 240 logements, aux agencements sommaires, nécessitant rapidement une première réhabilitation. De 1976 à 1986, l’opération était déjà menée dans un cadre tout à fait novateur : la maîtrise d’œuvre était confiée à une équipe réunissant des architectes, des sociologues et des photographes, qui jouaient un rôle de médiateurs entre les habitants et le bureau HLM. “Les gens définissaient ce qu’ils voulaients’il rappe Guy Lucchesi. Il y avait une grande agora, où pouvaient se réunir les familles de toutes nationalités, de toutes confessions, avec une importante communauté gitane. Chaque 24 juin se déroulait le plus grand incendie de la Saint-Jean à Marseille. C’était la vie de bohème.
Ces souvenirs rendent Guy Lucchesi d’autant plus sévère sur la chronique du mal-logement qui commençait alors. À partir des années 1990, les bâtiments et les espaces extérieurs se dégradent, atteignant un point de non-retour : la ville est détruite entre 2020 et janvier 2024. « Le Petit Séminaire représente à lui seul le déshonneur national en matière de gestion du logement social, c’est plus de quarante ans d’abandon, d’abandon total »il dénonce. Alors, me réjouissant que le « Le vert l’emporte sur le béton » et pourrait bientôt être créé “un jardin pour les petits qui n’ont rien”il salue aujourd’hui à la fois le projet et la méthode : “C’est vraiment axé sur le paysage, pas sur l’urbanisme, ça va calmer tout le quartier, lui donner un peu d’oxygène.”
« Il est très difficile de ne pas être d’accord lorsqu’on aborde le projet de rénovation via le vert »agrees Bélaid Aroun, director of the Maison pour tous La Maurelle, who also relays the « des attentes élevées en matière de logement » des 1 500 habitants du quartier prioritaire. Avec d’autres riverains, il compte sur l’effet d’entraînement de cette nouvelle coulée verte pour un « réhabilitation qualitative » de toute la zone. Car la destruction de la cité du Petit Séminaire a mis en lumière l’urgence de la rénovation des immeubles voisins des Ruches. C’est au programme, tout comme la construction de nouveaux logements sociaux et d’autres pour l’accession à la propriété, « ouvert sur le paysage et la rue de la Maurelle », précise-t-il.
Pour l’heure, les habitants voient encore des carcasses de frigos, des canapés cassés et tous les détritus qui jonchent la pente entre les pins et autres essences méditerranéennes. Mais les qualités paysagères du territoire n’ont pas échappé aux équipes venues fin novembre visiter les lieux avant de déposer leur candidature au concours. Le début des travaux est prévu pour 2027, en attendant, le projet doit être construit avec les habitants. Des idées émergent déjà : un parcours sportif, un lieu intergénérationnel, des espaces « s’installer après l’école »… « Si on respecte la parole des habitants, cela ne peut qu’aboutirassures Bélaid Aroun. Nous pouvons faire quelque chose de magnifique sur la petite colline.
Construire avec les habitants
Peut-on réparer la démocratie à partir du logement, du quartier ? Depuis 2014, la question de la participation des habitants aux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) est réglée par la loi : les conseils citoyens, qui visent à impliquer les habitants dans les décisions, sont obligatoires. Mais entre la théorie et la pratique, il y a souvent un grand écart. « C’est difficile de mobiliser les habitants », estime un élu. « Nous avons déjà été contactés et les participants ont été très déçus des résultats donnés, pour le dire poliment », regrette un acteur social. Marie-Hélène Bacqué, sociologue et urbaniste, le confirme : si les démarches participatives sont essentielles dans les discours, en réalité elles se réduisent souvent à de la simple information, voire à la communication. Dans la plupart des opérations de l’Agence nationale de rénovation urbaine (Anru), les démolitions ont déjà eu lieu après consultation des habitants. Mais des contre-exemples existent. Ainsi la rénovation d’une série de pavillons HLM dont la destruction est prévue à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), emblématique de la « permanence architecturale » que défend l’urbaniste et architecte Sophie Ricard depuis plus de dix ans. . Trouver des solutions adaptées ne peut se faire sans les habitants : « Il faut une réappropriation citoyenne !