France Hydrogène espérait que la révision tant attendue de la stratégie nationale serait publiée avant la fin de l’année, et – pourquoi pas – qu’elle pourrait même être annoncée le jour de sa conférence annuelle. L’émission annonçait même les noms (sous réserve) d’Olga Givernet, ministre déléguée à l’énergie, et de Marc Ferracci, ministre délégué à l’industrie. Mais la censure du gouvernement Barnier le 4 décembre a tout remis en question. France Hydrogène est globalement d’accord avec les orientations du document en préparation, même si le souhait est d’avoir plus d’ambition dans les infrastructures de transport hydrogène et le soutien à la mobilité. L’association souhaite également que l’Etat débloque des fonds pour les lauréats des 3e et 4e vagues de l’IPCEI, parmi lesquels Lhyfe, Airbus, Michelin et Gen-Hy. Ce retard provoque une pression sur la trésorerie des entreprises.
Emplois et richesse
Dans ce contexte difficile, l’association se veut néanmoins positive. Et elle a voulu montrer que le secteur n’est pas soutenu à perte, bien au contraire. Selon une étude réalisée par BDO, il a déjà généré 16 400 emplois (dont 6 300 directs) en 2023. Et ce chiffre passera à 66 600 en 2035. « L’emploi sera réparti dans toutes les régions, même si certains pèseront plus que « d’autres ». », a indiqué Philippe Boucly. En termes de chiffre d’affaires, on constate que le secteur générait déjà un chiffre d’affaires de 2,4 milliards d’euros en 2023 (dont 700 millions en production, 200 millions en stockage et transport et le reste en usages), avec une valeur ajoutée d’un milliard au niveau du PIB. Le montant attendu en 2035 est de 32 milliards. Et c’est la mobilité (en général, donc routière, aérienne, ferroviaire et maritime) qui pèsera le plus, représentant 54% de la valeur. En revanche, en termes de production d’hydrogène, c’est l’industrie et la fabrication de carburants de synthèse qui représenteront 70 % des volumes. Par ailleurs, le secteur peut contribuer jusqu’à 7% à l’effort de réindustrialisation. Et cela pourrait aussi réduire le déficit de la balance commerciale des biens de 8 %, ce qui n’est pas négligeable. Pour le président de France Hydrogène, l’État gagne s’il investit dans l’hydrogène. Pour 9 milliards investis, le rendement est estimé à 36 milliards (impôts, cotisations sociales) d’ici 2030. Soit 4 fois l’investissement. Mais cela est dû à un certain nombre de conditions qui sont explicitées dans l’étude. Lequel s’appuie sur une analyse approfondie de l’activité économique de plus de 120 projets, 200 entreprises et 340 établissements.
Les chiffres clés pour 2024
Parmi les chiffres clés, on peut citer les 24 usines en activité (électrolyseurs, piles à combustible, cuves, véhicules, stations). Il y a également 58 bus à hydrogène en circulation (700 en intention de commande), 7 poubelles ménagères (150 en intention de commande), 1 000 taxis (5% du parc en Ile-de-France, avec un ajout de 500 véhicules grâce à Toyota lors des JO de Paris). Il y a également une réduction de 4,70 € le kilo. C’est ce que pourrait apporter la révision du TIRUERT* si elle était appliquée. Un coup de pouce qui serait bienvenu pour la mobilité routière. Concernant les événements marquants, le Président de France Hydrogène a rappelé les inaugurations des usines HdF et Mcphy giga, l’ouverture de la gare de Dijon, l’augmentation du parc de taxis lors des JO, la mise en service de la gare Villabé au sud de Paris à Hyliko, la baptême du navire-école Alba en Corse et enfin inauguration sur la Seine de la barge Sogestran (voir le - fort).
*taxe incitative relative à l’utilisation des énergies renouvelables dans les transports
Mobilité hydrogène : Atawey appelle à ne pas perdre confiance
Le nom d’Hyvia a été évoqué à plusieurs reprises lors de cette conférence annuelle. Et les difficultés rencontrées par la co-entreprise Renault et Plug soulignent la nécessité – plus que jamais – de soutenir la mobilité hydrogène. Ce thème a été abordé par Jean-Michel Amaré, PDG d’Atawey. Il a indiqué qu’un plan de mobilité serait présenté « très prochainement » par France Hydrogène. Lequel plan prévoit 260 stations et 70 000 véhicules en circulation d’ici 2030 et un investissement souhaitable de 100 millions par an pour « amorcer la pompe ». “Les constructeurs nous disent qu’ils ont besoin d’un accompagnement pour les 10 à 20 000 premiers véhicules, avant de pouvoir atteindre la parité avec le prix de l’électrique à batterie”, a ensuite ajouté M. Boucly. Pour le président de France Hydrogène, un mécanisme de soutien est également nécessaire à l’implantation des stations prévues dans le cadre de l’AFIR. “On ne peut pas demander à l’hydrogène de faire en 4 ans ce que l’électrique pourrait faire en près de 20 ans”, a insisté Jean-Michel Amaré. Et il en a profité pour appeler à mettre un terme aux polémiques, sur fond de « croyances » et de « H2 bashing ». Un discours partagé par le député du Rhône Jean-Luc Fugit (également président du Haut Conseil de l’énergie) qui estime qu'”il faut placer la science au-dessus des croyances”. Pour lui, il y a « une complémentarité entre les énergies » et « il vaut mieux additionner les solutions pour sortir des énergies fossiles ». « Ne perdons pas confiance », a insisté le PDG d’Atawey. Et pour continuer ; « Nous avons la chance en France d’avoir des centres de recherche qui ont donné naissance à des technologies et des acteurs de premier plan ». Il prévoyait alors qu’en l’absence de soutien aux acteurs de la mobilité, dont les PME et PMI, « on laissera la place aux acteurs asiatiques et américains qui auront une masse critique ».
À la traîne des autres pays européens
Le député Jean-Luc Fugit a regretté le retard pris dans la publication de la révision de la stratégie nationale de l’hydrogène. Il s’est toutefois voulu optimiste en révélant que le ministre de l’Industrie démissionnaire, Marc Ferracci, avait demandé à le rencontrer pour évoquer plusieurs sujets dont celui de l’hydrogène. «Nous prenons du retard sur nos voisins», estime Philippe Boucly. « L’État doit initier les mesures prévues : le mécanisme de soutien à la production d’hydrogène par électrolyse, développer les usages en accompagnant le démarrage de la mobilité routière, s’impliquer au niveau européen pour le développement rapide de marchés pilotes, créer les conditions d’une concurrence et sécuriser l’approvisionnement en hydrogène : de l’électricité à un prix abordable et planifier le secteur de l’exportation. Lors de tables rondes, les attentes des industriels ont été évoquées par Vincent Charlet de La Fabrique de l’industrie et Guirec Dufour de Qair France. Il était également question de souveraineté (technologique, technologique et industrielle) de l’Europe avec un panel réunissant Valérie Bouillon-Delporte (Directrice exécutive du Clean Hydrogen Partnership) ; Pascal Canfin (député européen) ; Grégoire Chauvière Le Drian (dirigeant de la BEI en France) ; ou encore Frédéric Petit (député, coordinateur du groupe de travail « Souveraineté énergétique » de l’Assemblée parlementaire franco-allemande). M. Canfin a annoncé que l’Allemagne assouplirait peut-être sa position sur le nucléaire, un point qui pourrait profiter à la France.
Philippe Boucly reconduit dans ses fonctions de président et nouvelle gouvernance
Lors de son Assemblée générale qui a suivi la conférence annuelle, l’association a adopté une nouvelle gouvernance. Elle reflète la diversité et la richesse des acteurs (plus de 450 adhérents) du secteur.
Pour maintenir le cap, Philippe Boucly a été réélu président de France Hydrogène. « J’aborde ce nouveau mandat avec la confiance renouvelée des membres du Conseil, et entouré d’une gouvernance représentative de tous les acteurs réunis au sein de l’association », commente-t-il. Et de poursuivre : « L’arrivée de nouveaux administrateurs enrichit notre vision et notre expertise collective, indispensables pour faire face aux défis pressants de la transition énergétique et au contexte incertain dans lequel la France est aujourd’hui plongée. »
Pas de co-présidente pour cette année 2025, puisque Valérie Bouillon-Delporte a été nommée il y a quelques mois directrice générale du Clean Hydrogen Partnership. En revanche, on peut noter que le Premier Vice-Président est Jean-Michel Amaré, le PDG d’Atawey. Un acteur très impliqué dans le plan de mobilité qui sera prochainement présenté. Parmi les nouveautés, on peut citer l’arrivée de Christelle Rouillé, d’Hynamics, au Conseil d’Administration au sein du Collège Industriel « Grands Groupes », ainsi qu’au sein du bureau. Il faut également citer Laurent Favreau, Président du SYDEV, Syndicat Départemental de l’Energie et de l’Equipement de Vendée, qui regroupe le Collège « Organismes publics et parapublics, Associations » ; ou celle d’Eric Campos, directeur de l’engagement social au Crédit Agricole, qui rejoint le Collège « Services Transversaux »
L’Office France Hydrogène est constitué comme suit :
Président : Philippe Boucly
1er Vice-Président : Jean-Michel Amare
Secrétaire Général : Cécilia Fouvry-Renzi, Air Liquide
Trésorier : Bertrand Chauvet, Seiya Conseil
Membres du bureau : Christelle Rouille, Hynamics; Sylvie Denoble-Mayer, Engie; Laurent Antoni, CEA; Yves Faurisson, Michelin; Catherine Azzopardi, HRS.