Sous vos pieds se trouvent les langues du pays.
Le plus récent recensement de Statistique Canada nous donne un aperçu du paysage linguistique autochtone du pays et où 60 langues appartenant à 12 grandes familles – l’Inuit, 10 Premières Nations et le Michif (Métis) – sont aujourd’hui utilisées. La plupart d’entre eux sont parlés et évoluent depuis des milliers d’années, bien plus longtemps que l’anglais ou le français.
Les données utilisées pour cette carte* illustrent la « langue autochtone parlée à la maison », qu’il s’agisse de la première ou de la deuxième langue. Au Canada, près de 229 000 personnes dépendent d’une ou plusieurs de ces langues, y compris les personnes qui ont conservé leur langue maternelle, celles qui ont appris à parler couramment leur langue ancestrale plus tard dans leur vie et celles qui ont appris les langues de la région ou de la communauté autochtone où ils se sont installés.
L’état précaire de nombreuses langues originales du Canada est bien documenté. L’Atlas des langues en danger dans le monde publié par l’UNESCO indique que les trois quarts des langues autochtones du pays sont « définitivement en danger », « sérieusement en danger » ou « en danger critique d’extinction ». Les autres sont classés comme « vulnérables (potentiellement en danger) ». Aujourd’hui, on estime que seuls le cri, l’inuktitut et l’ojibwe comptent suffisamment de locuteurs pour survivre.
Les pensionnats ont interrompu la transmission des langues d’une génération à l’autre, tandis que le système de réserves et d’autres politiques coloniales séparaient les communautés qui avaient des langues et des traditions communes. Les répercussions se font encore sentir aujourd’hui : perte généralisée des langues et dommages à la culture, à l’identité personnelle et à la santé des communautés. Sur environ 1,5 million d’Autochtones vivant au Canada, seulement 15 % parlent leur langue d’origine à la maison.
Les statistiques peuvent paraître sombres, mais elles cachent une histoire plus riche et plus nuancée qu’on pourrait le penser, explique Onowa McIvor, professeure agrégée au département d’études autochtones de l’Université de Victoria et experte en revitalisation des langues. Comme d’autres, à l’âge adulte, elle a appris le nehîyawîwin (le cri des marais), la langue de ses grands-parents maternels du nord du Manitoba. « Au cours de ma vie, dit-elle, j’ai pu voir de nouvelles générations naître et grandir dans leur langue maternelle parce que leurs parents ont pris l’initiative de l’apprendre. »
L’Université de Victoria offre des programmes de premier cycle et des cycles supérieurs reconnus à l’échelle nationale et axés sur la revitalisation des langues autochtones, et McIvor cite de nombreuses réussites à travers le pays : sociétés linguistiques pour adultes dans les réserves et dans les centres urbains, programmes d’immersion et de bilinguisme dans les écoles primaires et « foyers de revitalisation des langues ». » (programmes d’immersion pour la petite enfance animés par des locuteurs plus âgés).
Avec des lois, des politiques fortes pour soutenir leur application et un financement stable, de nombreuses langues originales du pays peuvent connaître un renouveau et devenir une partie intégrante de la société dans son ensemble. C’est dans cette optique que, dans le budget 2017, le gouvernement du Canada a alloué 90 millions de dollars « à la préservation, à la protection et à la revitalisation des langues et des cultures autochtones ». Le gouvernement s’est également engagé à adopter une loi sur les langues autochtones d’ici 2018, ce qui constituerait un premier pas vers la protection des langues autochtones dans le pays.
Ce n’est pas seulement une question autochtone, souligne Mme McIvor; tous les Canadiens peuvent bénéficier de la revitalisation des langues autochtones. « Les langues autochtones font partie du patrimoine des Canadiens, y compris de ceux qui ne sont pas autochtones. » Selon elle, aux premiers jours de la colonisation, le Canada fut un - une nation multilingue où les Européens apprenaient et parlaient des langues autochtones en plus de leurs propres langues.
« Souvenons-nous et célébrons cette histoire qui remonte à plus de 150 ans. C’est là l’essence même de la fondation du Canada. »
Remarque : La carte est disponible en anglais uniquement.