Conditions salariales | Les juges administratifs réduisent leurs horaires en signe de protestation

Conditions salariales | Les juges administratifs réduisent leurs horaires en signe de protestation
Conditions salariales | Les juges administratifs réduisent leurs horaires en signe de protestation

Les juges administratifs ont commencé cette semaine à réduire leurs heures pour forcer Québec à augmenter leurs salaires, a-t-on appris La presse. Ils envisagent même d’aller jusqu’à appeler à la grève si nécessaire, ce qui, ironiquement, signifierait devoir s’adresser aux tribunaux.


Publié à 1h23

Mis à jour à 5h00



Ce qu’il faut savoir

  • Les juges administratifs du Québec sont payés près de la moitié de ceux des juges judiciaires.
  • Ils réclament un rééquilibrage des salaires.
  • Plusieurs associations vont réduire leurs horaires de travail pour faire pression sur le gouvernement.

« Il y a une grande frustration en ce moment. Le gouvernement ne veut pas nous entendre», affirme le président de la Conférence des juges administratifs du Québec (CJAQ), Daniel Pelletier, dont l’organisation regroupe 300 des 400 juges administratifs de la province.

Moins connus du public que les magistrats de la Cour du Québec ou de la Cour supérieure, ces juges qui exercent leurs fonctions dans 16 organismes et tribunaux entendent des dizaines de milliers de dossiers individuels par année, que ce soit en matière de logement, de travail, de transport, agricole. protection ou accès à l’information.

En moyenne, les juges administratifs reçoivent un peu plus de la moitié du salaire d’un juge de la Cour du Québec, soit 169 500 $ comparativement à 310 000 $.

Il s’agit quasiment de la même rémunération qu’un procureur expérimenté de la Direction des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

«C’est moins que les avocats de l’État qui plaident devant nous», déplore le président de la division des relations du travail du Tribunal administratif du travail (AJATAT-DRT), François Demers. « Or, nous faisons essentiellement le même travail que les juges judiciaires. Nous appliquons les règles de droit, nous rendons des jugements, nous résolvons les différends », dit-il.

Le résultat est frappant : alors qu’en 2016, 240 personnes ont postulé pour un poste de juge au Tribunal administratif du travail (TAT), elles n’étaient que 149 l’année dernière. « Les spécialistes du droit du travail, au lieu de venir chez nous, ils vont ailleurs. Nos conditions d’exploitation sont désavantageuses», affirme M. Demers.

Moins de travail, moins de services

Selon nos informations, le gouvernement a fait preuve d’une « certaine ouverture » à revoir les salaires des juges administratifs l’année dernière, avant de se rétracter, ce qui a suscité beaucoup de colère dans le secteur. La dernière augmentation de salaire de ces magistrats remonte à 2022. Ils avaient obtenu une augmentation de 2% les trois années précédentes.

La semaine dernière, les 40 juges de l’AJATAT-DRT ont été les premiers à voter pour que les moyens de pression soient déclenchés « au moment opportun ». Les magistrats du Tribunal administratif du logement (TAL) ont fait de même mardi soir. La division de santé et sécurité du travail du TAT ainsi que deux autres tribunaux administratifs doivent statuer ce jeudi et vendredi. Tout indique qu’ils imiteront leurs collègues.

«Depuis lundi, notre travail est réduit à 35 heures par semaine, comme les avocats de l’État», explique M. Demers. «Jusqu’à présent, nous faisions le travail nécessaire et cela impliquait un nombre d’heures nettement plus élevé», dit-il. La présence d’un « juge de garde », qui était assurée à tout moment, sera désormais également limitée à la période comprise entre 8h30 et 16h30, sauf urgence.

Si rien ne change, ces juges sont même prêts à aller encore plus loin : faire grève, un droit qu’ils ne possèdent théoriquement pas.

« Nos membres nous ont donné le mandat de planifier une grève si nécessaire. Cela soulèverait une question juridique importante, c’est certain, et pourrait être résolue par un tribunal. Nous serions en territoire inconnu et nouveau», note M. Demers à ce sujet.

« Cela fait au moins dix ans que nous entendons le gouvernement nous dire à peu près la même chose. Maintenant, nous voulons des résultats », ajoute-t-il.

Réclamez le pouvoir de négocier

Selon Daniel Pelletier, le cœur du problème est que les juges administratifs n’ont pas vraiment de pouvoir de négociation, leur rémunération étant liée par décret aux augmentations accordées aux cadres de l’État. Ils n’ont pas non plus droit à l’arbitrage, puisqu’ils ne sont pas régis par le Code du travail.

« Nous voulons pouvoir négocier avec un régime adapté et indépendant. Nous sommes un des seuls groupes de juristes à ne pas avoir ça au Québec», illustre le président. « En ce moment, avec le gouvernement, c’est comme une consultation. Et si nous ne sommes pas d’accord, ils font ce qu’ils veulent. »

Son groupe voit un problème dans l’indépendance des juges administratifs, qui doivent trancher au quotidien des litiges entre différents intervenants et l’État québécois, « avec qui ils débattent en même temps de leurs salaires ». «Cela n’a pas de sens du point de vue de la neutralité», poursuit M. Pelletier.

La Confédération des syndicats nationaux (CSN), qui intervient dans plusieurs litiges devant les tribunaux administratifs, se dit « solidaire des revendications des juges ».

“Nous espérons un règlement satisfaisant dans les plus brefs délais”, se limite à dire le syndicat.

Réactions du gouvernement

Le cabinet de la présidente du Conseil du Trésor, Sonia LeBel, a indiqué que « le gouvernement est en discussion dans le cadre d’un comité de travail avec des associations regroupant des membres des tribunaux et des organismes administratifs. »

«Nous ne commenterons toutefois pas le contenu des discussions du comité de travail ni les mesures qui seraient envisagées. Notre priorité reste de fournir des services aux citoyens », a-t-il déclaré.

Avec la collaboration de Louis-Samuel Perron, La presse

 
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