Ee illustrateur de cinéma d’animation, Clément Dartigues n’a pas l’habitude de voir ses dessins prendre vie dans la réalité. Alors, lorsqu’après deux ans de travail dans l’écurie de ses grands-parents, son projet de créer un espace de coworking se concrétise, c’est une nouvelle forme d’exploit. «C’est comme nous l’avions imaginé. Il ne reste plus que les plinthes à fixer», explique Clément, 36 ans, attentif aux détails de son espace de coworking La Grange Animation, ouvert fin octobre, en Chalosse, à Pomarez.
A la Grange, fini les badges d’entrée des grandes entreprises. Au lieu de cela, les chaussures et les sabots sur le paillasson sont un signe de présence. A partir de 12 euros la demi-journée, l’offre de coworking donne accès à plus de 100 mètres carrés d’espace partagé, avec, au rez-de-chaussée, une cuisine entièrement équipée et une salle de réunion (réservation obligatoire). L’étage supérieur, sous les charpentes et les murs en pierre, accueille jusqu’à dix bureaux accueillants. Tout cela, avec serveur de stockage de données en réseau, imprimante et fibre optique, indispensables au projet.
A deux pas de la grange, l’ancienne maison des grands-parents a été transformée en gîte de cinq chambres pour accueillir des collaborateurs venus de loin. « Le but est avant tout de prouver aux citadins qu’on peut vivre à la campagne, que ce n’est pas que pour les vacances », défend Clément, convaincu qu’il n’est plus nécessaire de « s’entasser dans les grandes villes » pour réussir. votre carrière.
Pari gagnant
Tout a commencé en 2020, lorsque, après avoir vécu à Paris, Madrid et Portland, Clément subit un confinement sanitaire dans son village natal. « J’avais prévu de retourner aux États-Unis mais finalement j’étais trop heureux ici », avoue-t-il, confortablement assis à son bureau parmi ses collègues, face aux champs.
Un retour aux sources qui ne l’a pas empêché de continuer à travailler pour de prestigieux studios d’animation comme Netflix ou Amazon Prime. A 18h30, il participe à une visioconférence avec ses collègues de Los Angeles, pour qui la journée ne fait que commencer.
Ce pari gagnant l’a poussé à souhaiter autant d’épanouissement à d’autres jeunes diplômés en mal de campagne comme lui en créant La Grange Animation, épaulé par son amie Christelle Lacoste, graphiste identité visuelle, qui travaille elle aussi sans souci depuis le village chalois. « Nous avons une meilleure connexion Internet que nos amis parisiens », assure Clément. Une allégation validée par les autres collègues présents.
Pauses café au poulailler
La première fan de La Grange n’était pas une connaissance du couple, mais une Italienne convaincue d’avance par le concept. Anna Peron, modéliste 3D de 25 ans, a découvert La Grange Animation en suivant le travail de Clément sur les réseaux sociaux.
En période de transition, plutôt que de trouver un loyer de courte durée dans une grande ville italienne, elle a choisi de se mettre au vert en venant un mois à La Grange et son gîte. Et l’expérience de la campagne française dépasse ses attentes. Pendant ses pauses, la graphiste italienne part en virée au poulailler. Lors de ses week-ends, elle découvre la région, guidée par le couple.
Côté prix, autour de 700 euros par mois pour le logement et l’accès à l’espace de travail, elle juge le rapport qualité-prix rentable compte tenu de la superficie et de l’environnement. « Le cadre est magnifique, on dirait un tableau de Van Gogh », s’enthousiasme-t-elle encore, depuis son arrivée le 30 octobre à la gare de Dax, où Clément et Christelle sont venus la chercher.
D’autres collègues ont ensuite suivi ses traces. Comme Eva Rode, venue d’Anglet pendant deux jours pour « changer d’air ». Habituée des cafés bruyants et autres espaces de coworking plus froids, cette illustratrice et graphiste se sent ici comme chez elle, travaillant en chaussettes avec une bougie parfumée sur le bureau. Le tout en profitant d’un « cadre plus stimulant » avec la possibilité d’interagir avec des professionnels du secteur créatif.
Partage de compétences
Car La Grange Animation s’adresse en priorité aux professionnels de la création, souvent des travailleurs indépendants dits freelances. Une manière pour eux de travailler en groupe et de partager leurs compétences. De plus près, Laure Halvick, 34 ans, arrive de Peyre. Ce web designer vient à La Grange une fois par semaine. L’occasion de s’éloigner du travail à la maison, sans quitter la Chalosse, tout en « mêlant esprit d’affaires et convivialité ».
De passage, le maire de Pomarez, Pascal Cassiau, a découvert pour la première fois les lieux, les travaux terminés. Pour l’édile, c’est certainement « un grand projet » pour ceux qui « travaillent sur Internet » et pour les entreprises de la commune de 1.600 habitants. « Ça fait plaisir de voir un petit Pomarézien revenir au village », confie-t-il à Clément.
Le télétravail est-il sain ?
La Dares, la Direction de la Recherche, de l’Animation, des Etudes et des Statistiques du ministère du Travail et de l’Emploi, vient de publier un rapport analysant l’impact du télétravail sur la santé des salariés, notamment pendant et après la pandémie de COVID-19.
En plus de diriger Grange Animation, Clément poursuit son activité à plein temps de directeur artistique. Il compte alors sur le bouche à oreille pour séduire les freelances locaux. Pour attirer les autres, il s’appuie sur les réseaux sociaux et ses relations professionnelles. Des collègues portugais et anglais sont attendus au printemps.
Si la Grange Animation n’en est qu’à ses débuts, le Chalossais ne manque pas d’idées pour continuer à développer la propriété de ses grands-parents, léguée à lui et à son père. Comme proposer une tiny house en logement individuel, ou transformer le reste de l’écurie en serre pour faire découvrir le potager aux habitants. A terme, Clément espère que le lieu ressemblera à un studio d’animation délocalisé à la campagne. Autant d’idées que de possibilités pour s’approprier la ferme selon les époques.
La Grange Animation, 1 534, route de l’Amérique, in Pomarez. Information and reservations on the website grange-animation.com and at [email protected]