Mozart en majesté

Mozart en majesté
Mozart en majesté

Pour son vingtième anniversaire, la fête nordiste célébrait le divin Wolfgang. Ce fut l’occasion d’affrontements qui virent certaines stars s’effacer, et d’autres briller, comme Adam Laloum, Jonathan Fournel, Cédric Tiberghien et le duo Geister.

Une belle idée de faire se succéder plusieurs pianistes dans un même concert, car les concertos de Mozart sont la garantie d’une grande variété d’approches. C’était frappant ici. Dans le Concerto n°13, Pierre-Laurent Aimard (le seul de ses confrères à jouer avec la partition) a certes de l’énergie à revendre mais son jeu est enfermé dans l’uniformité, celle des timbres, des nuances, mais aussi de l’expression. Quand, dans le n°24, Adam Laloum pose ses mains sur le clavier, son son luminescent fait l’effet d’un bain de jouvence. Cette vision de chambre, d’une finesse et d’une clarté incomparables, respire et ose se confier, mais n’ignore pas les épisodes épiques de laAllegretto final. Avec Jonathan Fournel dans le n°20c’est tout autre chose : dans un engagement à la fois physique et expressif à chaque instant, la lauréate du concours Reine Elisabeth 2021 livre une interprétation fébrile et profondément dramatique. Josué Weilerstein, directeur musical de l’Orchestre National de Lille depuis septembre, applaudit ostensiblement son soliste, qui reçoit également un accueil enthousiaste du public. Le chef d’orchestre américain fait bonne impression : un bras sûr, mais aussi une maîtrise des différentes masses sonores, un exercice difficile quand, dans l’acoustique très généreuse de la salle Nouveau Siècle, les cuivres ont tendance à dominer outrageusement les cordes – au nombre de dix. -neuf seulement.

Balance délicate

Précédemment, Alexandre Bloch et Jean-Claude Casadesus s’étaient efforcés, pas toujours avec le même succès, de rechercher cet équilibre délicat. Avec le premier, François-Frédéric Guy démontré dans le Concerto n°23 d’une hauteur de vue indéniable, d’une noblesse un peu massive aussi, qui tend à éloigner l’impact émotionnel duAdagio. Dans le n°10pour deux pianos, le Duo fantôme, formé par Manuel Vieillard et David Salmon, fait preuve de génie, de cohésion et d’une joie de jouer contagieuse. En compagnie du fondateur et ancien directeur emblématique de l’équipe lilloise, vert enviable à 88 ans, Abdel Rahman El Bacha ne dévie jamais, dans le Concertos n°25 et 26, d’un académisme prudent et solide, sans réel enjeu. Enfin, visiblement aguerri à ce répertoire, l’Orchestre Royal de Chambre de Wallonie, dirigé de son violon par Jean-Frédéric Molardse porte bien dans le Concerto n°12d’autant plus que le piano de Cédric Tiberghienpoli et lumineux, ravit par un ton d’une grande fraîcheur.

Rendez-vous dans la charmante salle du conservatoire pour le premier des six récitals de l’intégrale des sonates – toujours de Mozart. Pas de place pour la moindre galanterie dans la vision vigoureuse deHerbert Schuch : son instrument sonne avec autant d’effusion que de franchise. Si l’on apprécierait ici et là plus de vivacité et de légèreté, on ne pourra qu’admirer la singularité de la proposition du musicien, son rubato parfois audacieux mais maîtrisé, la courbe de son phrasé, la densité de ses timbres.

Alliance de panache et d’élévation

L’indigestion de Mozart approchant, il fallut boire à d’autres sources. Ce ne sont pas les 24 Préludes de Debussy d’Anna Tsybuleva qui étanchera notre soif : un festival d’approximations, de joliesses inconsidérées et de prosaïsmes. Malgré l’acoustique sèche du cinéma de la station Saint-Sauveur, et un instrument peu attrayant, Rodolphe Menguy offre une performance complètement différente. Si le premier mouvement du sonate de Bartok, pas toujours dominé, se cherche encore, les deux suivants, tout comme la manière de grande improvisation dans le Danses de Marosse de Kodaly, déployez avec fluidité, sécurité et élégance. Dans une belle Sonate de Liszt, le pianiste de 26 ans réussit à allier panache et élévation, osant même parfois quelques moments risqués.

Une heure plus tard, le récital de Kevin Chen soulève d’autres questions. Certes, à 19 ans, le lauréat des concours de Genève et Tel-Aviv dispose de moyens enviables, mis en œuvre dans Après avoir lu Dante, où ses doigts peuvent combattre, gratter et plier le clavier à sa guise. Il fait preuve d’un appétit pour la musique et d’une imagination sonore que son exécution langoureuse des morceaux précédents de ce Deuxième de la Années de pèlerinage de Liszt ne nous avait pas précisément préparés…

Festival Piano(s) de Lille. Du 14 au 16 juin.

 
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