Quatre sites pornographiques sont désormais bloqués en France car ils ne vérifient pas correctement l’âge des internautes, selon la justice. Malheureusement, la sanction risque de ne pas être très efficace.
« Une immense victoire dans la lutte pour la protection des enfants en ligne « . C’est ainsi que Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères – et ancien ministre délégué au Numérique dans le gouvernement d’Élisabeth Borne – célèbre le blocage de quatre sites pornographiques en France. Dans un message publié sur X/Twitter, il partage une capture d’écran où l’on voit que le site Tukif est désormais inaccessible.
Outre la plateforme précitée, les sites Xhamster, Mrsexe et Iciporno sont également bloqués de la même manière. Pour quoi ? Parce qu’on leur reproche de ne pas bien vérifier l’âge des internautes qui s’y rendent. Cette mesure fait suite à un arrêt de la cour d’appel de Paris (document PDF) en octobre, alors que cette sanction était dans les tuyaux depuis très longtemps.
Comment ces sites sont-ils bloqués ?
Le blocage est assez simple. Les fournisseurs d’accès Internet (FAI) français doivent modifier leurs serveurs DNS afin de ne pas créer de lien vers les sites pornographiques concernés. A titre informatif, un DNS est un système qui va « traduire » l’URL d’un site, par exemple www.Frandroid.com, en l’adresse IP correspondante du serveur qui héberge le site, composée de chiffres et de points. Au lieu de vous souvenir de ce numéro compliqué, il vous suffit de vous souvenir du nom du site. Et c’est grâce aux serveurs DNS ; et par défaut ceux de vos opérateurs.
Pour en revenir aux sites pornographiques sanctionnés, ils existent toujours, ils n’ont pas été supprimés, mais les opérateurs télécoms redirigent automatiquement vers une page d’erreur lorsqu’une personne tente d’y accéder. Comme si vous tapiez le bon numéro de téléphone à appeler, mais qu’il ne sonne même pas à l’autre bout du fil.
Un blocage dissuasif, mais pas total
Or, c’est justement ici qu’il faut rappeler que cette sanction ne garantit pas un blocage total de ces quatre sites pour adultes. Elle représentera avant tout un moyen de dissuasion, mais les plateformes en question restent, en réalité, accessibles.
Changer votre DNS n’est en fait pas une tâche très complexe. Certaines personnes l’utilisent pour bénéficier d’un accès Internet plus rapide ou pour contourner la censure de certains gouvernements dans certains pays. Même si une bonne partie du grand public ne tentera probablement pas de s’embarrasser de ce type de démarche, il n’est pas impossible que des personnes, notamment mineures, un peu débrouillardes usent de ce stratagème pour accéder néanmoins aux quatre sites pornographiques bloqués.
Il suffirait en effet de passer par un serveur DNS qui ne suit pas les mêmes instructions que celles des FAI pour effacer les effets du blocage. Vous n’avez même pas besoin d’utiliser un VPN.
Un pas franchi, mais pas encore une victoire
Donc, “l’immense victoire» revendiqué par Jean-Noël Barrot mérite encore réflexion. Même si les mesures dissuasives présentent une certaine efficacité, leurs pouvoirs coercitifs restent limités. Gardons en tête que le web regorgera toujours d’outils en tout genre pour contourner tel ou tel blocage. Dans le cas des quatre sites bloqués, il vaudrait sans doute mieux parler d’une étape importante et symbolique, mais la lutte pour la protection des mineurs en ligne a encore un long chemin à parcourir.