Trente-trois habitants. C’est la population officielle de la petite commune de Chazelles, nichée dans la vallée de la Desges entre Pinols et Saugues, à l’issue du recensement de 1962. “Pas un de plus et même beaucoup moins depuis”, écrit notre reporter Raymond Rousset dans Centre-dimanche du dimanche 8 novembre 1964, après s’être rendu dans cette ville en proie au déclin rural des années soixante
. “Le cap des trente ans a été franchi à l’envers” et rien ne semble vouloir arrêter cette tendance, constate notre journaliste. «Ça diminue à chaque enterrement», regrette le maire, M. Servant, qui continue d’administrer les affaires municipales même s’il approche les 80 ans.
L’exode rural, « ce cancer qui ronge nos campagnes »
La vie est partie
En novembre 1964, une promenade dans les rues du village de Chazelles dresse le portrait de cette campagne moribonde.
L’école n’accueille plus d’enfants. En 1912, il y avait pourtant quarante-huit écoliers à Chazelles. Le bâtiment a été transformé en lodge et accueille les estivants des usines Simca pendant les deux mois d’été. A chaque rentrée scolaire, les volets se ferment…
En contrepartie, les travaux d’aménagement de la mairie ont dû attendre et c’est la cuisine du maire qui fait office de secrétariat. « Il y a bien une mairie, dans l’ancien presbytère qui ne servait plus à rien puisqu’il n’y a plus de curé, mais la toiture est en danger de ruine et nous n’allons toujours pas, pour trente citoyens, payer un secrétaire qui va tenez la porte ouverte »… Les travaux pour remettre une nouvelle toiture sont alors estimés à 10 000 francs. « Il n’est plus possible de joindre les deux bouts », déplore le maire avec une pointe d’abattement face à un exode rural décrit comme « un cancer qui ronge nos campagnes » et qui a presque entièrement dévoré Chazelles.
En 1962, dix communes de moins de 100 habitants en Haute-Loire
Au terme du recensement de 1962, dix communes de Haute-Loire comptaient moins de 100 habitants. Chazelles était alors la plus petite commune du département avec ses 33 habitants. Elle est suivie par Arlet (56 habitants) ; Sainte-Marguerite (65 habitants) ; Vals-le-Chastel (66 habitants) ; Montclard (67 habitants) ; Autrac (81 habitants) ; Vabres (81 habitants, aujourd’hui fusionné avec Alleyras) ; Le Vernet (88 habitants) ; Croisances (91 habitants, aujourd’hui fusionné avec Thoras) ; et Saint-Étienne-sur-Blesle (98 habitants).Et trente-six à 13 heures est
janvier 2024
Selon les chiffres du recensement publiés le 1er janvier 2024 par l’INSEE, la Haute-Loire compte désormais trente-six communes de moins de 100 habitants. La commune de Chazelles y apparaît toujours mais sa population a peu changé avec trente-deux habitants. >> A lire aussi :
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Un homme de chaque maison est membre du conseil
A l’aube des élections municipales de 1965, M. Servant ne tremble pas. « Ici, les élus peuvent dormir tranquilles : nous ne pouvons pas être battus aux prochaines élections municipales. Un homme de chaque maison fait partie du conseil ! “Il n’y a que les femmes qui peuvent nous expulser : elles sont plus nombreuses.”
Mais cette stabilité politique ne résout pas le problème du déclin pour lequel le bourgmestre ne voit qu’une solution : « faire de tout le canton de Pinols une seule commune, avec un représentant de chaque ancienne commune au sein du conseil ». Soixante ans plus tard, ce souhait est resté pieux : si quelques fusions de communes ont effectivement eu lieu en Haute-Loire, aucune n’a vu le jour dans l’ancien canton de Pinols.
Chazelles comptait jusqu’à 230 habitants en 1861, avant de voir sa population s’effondrer et ne compter que 26 habitants en 1968.
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