le choc post-traumatique de ce policier à la retraite lui a gâché la vie

Dans le cadre d’une série de rapports sur la santé mentale des policiers, Le journal s’est entretenu avec des dizaines d’experts et d’agents en plus d’examiner plusieurs dizaines de documents, dont une quarantaine de demandes d’accès à l’information. Un constat se dégage : il n’a jamais été aussi difficile d’être policier.

Fortement touché par un choc post-traumatique après avoir été au cœur de deux fusillades, un policier à la retraite est récemment devenu le premier Québécois à participer à une thérapie innovante à base de MDMA, un puissant stimulant.

Cette «expérience mystique» lui a finalement permis d’éprouver un peu de compassion envers lui-même, raconte Bradley Gagnon, 51 ans.

Ce dernier a été policier pendant six ans à Toronto, puis neuf ans à Ottawa. Dans la Ville Reine, il travaille au commissariat de quartier 12, surnommé la « capitale du meurtre », en référence à l’omniprésence de la violence dans ce quartier.

Bradley Gagnon lorsqu’il était patrouilleur à Toronto.

Avec la permission de Bradley Gagnon

A deux reprises, en 2003 et 2007, il s’est retrouvé au milieu de fusillades où il aurait pu être impliqué.

Survivre à une troisième fusillade

Malgré les thérapies, le Gatinois était incapable de mener une vie normale. Il souffrait et éprouvait beaucoup d’anxiété lorsqu’il se rendait au travail.

“Je me suis toujours dit qu’il m’était impossible de survivre à un troisième tournage, que mon heure viendrait bientôt”, raconte-t-il.

Bradley Gagnon (à l’extrême droite) et son partenaire Benjamin Beard posent avec leur chef de police de l’époque, Bill Blair, l’actuel ministre de la Défense nationale, lors de la cérémonie de remise des prix d’excellence policière de 2008 où ils ont été décorés.

Avec la permission de Bradley Gagnon

Il a également ressenti beaucoup de pression des tabous autour de la santé mentale, qu’il explique notamment par une culture du « machisme extrême ».

« C’est comme si on n’avait pas le droit d’avoir peur ou d’être nerveux », explique-t-il. La police n’a pas le 911, ça s’arrête avec nous.

C’est en raison de cette « incertitude irrationnelle » qu’il a demandé un transfert à Ottawa. Mais les démons ne l’ont jamais quitté.

Après plus de 15 ans de thérapie et de consultations auprès d’une douzaine de professionnels, Bradley Gagnon a trouvé le Dr Houman Farzin sur Internet et s’est intéressé à ses travaux sur la MDMA. Cette drogue, normalement illégale au Canada, est communément appelée ecstasy dans la rue.
En novembre dernier, au terme d’une très longue période préparatoire avec Dr Farzin, basé à Montréal, et psychologue, le policier à la retraite a vécu sa première thérapie sous l’effet de ce stimulant. Une version pure et sûre avait préalablement été conçue pour lui en laboratoire.

« Expérience mystique »

«C’est très, très intense», explique le Dr.r Farzin. Toutes les défenses sont supprimées chez une personne, tous les mécanismes de protection tombent. Il faut être très délicat et ce n’est pas une thérapie qui s’adresse à tout le monde.


Bradley Gagnon dit avoir ressenti un « confort total » lors des trois séances où il a consommé de la MDMA sous la supervision du Dr Farzin et d’un psychologue. Sur la photo, M. Gagnon est allongé sur un canapé lors d’une séance de l’automne 2023.

Courtoisie (ajouter la source)

À trois reprises, pendant des périodes de huit heures consécutives, Bradley Gagnon s’est immergé dans ce qu’il appelle une « expérience mystique ».

“C’était comme un voyage dans mon être”, a-t-il déclaré, ajoutant qu’il avait encore du mal à trouver les mots pour décrire ce moment extraordinaire. J’étais très critique envers moi-même et je n’avais aucune compassion pour ce que je vivais, mais à ce moment-là, j’avais l’impression de devenir mienne. Majorette. J’ai tellement compris.

Le confort des patients est une des priorités des médecins qui ont mis en place cette expérience. Pour ce faire, ils ont loué une salle lumineuse remplie de plantes et ont même préparé une liste de chansons pour accompagner Bradley Gagnon lors de son « voyage ».

«En thérapie ordinaire, je n’aurais jamais discuté de ces choses-là», admet M. Gagnon. Les êtres humains veulent toujours se protéger. Avec la MDMA, toutes les barrières tombent.

Conscient qu’on ne se remet jamais vraiment d’un choc post-traumatique, le policier à la retraite sait désormais « quel est son problème » et dispose désormais des outils pour avancer.

«Je suis un homme nouveau», dit-il. Cela me donne beaucoup d’espoir et cela change complètement mon attitude.

La MDMA en bref

  • Dans la rue, on parle généralement d’extase
  • La forme pure de MDMA fabriquée en laboratoire est autorisée depuis 2022 dans le cadre du Programme d’accès spécial de Santé Canada.
  • Pour l’utiliser, un médecin doit prouver que la thérapie traditionnelle ne fonctionne pas sur son patient.
  • Ce serait le cas de plus d’un tiers des personnes souffrant de syndrome de stress post-traumatique.
  • 86% des patients traités par MDMA aux États-Unis déclarent constater une réduction de la gravité de leurs symptômes
  • Sans autorisation médicale particulière, cette drogue est interdite au Canada et sa possession peut entraîner jusqu’à sept ans de prison.

Source : Santé Canada et Association multidisciplinaire pour les études psychédéliques (MAPS), 2023

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Mézeray. Vote des subventions et cantine à 1 €
NEXT le Front populaire dévoile ses prénoms, les candidats majoritaires LFI