Elon Musk – l’homme le plus riche du monde – se verra confier par Donald Trump la clé d’un tout nouveau ministère baptisé « Gouvernance efficace* ». Une idée loin d’être saugrenue, estiment l’entrepreneur Marc Coucke et l’économiste Geert Noels. Pour eux, la Belgique doit s’y mettre sans attendre. Six gouvernements et six parlements pour soutenir l’appareil d’État ? C’est trop !
« Deux Américains extraordinaires » – les entrepreneurs Elon Musk et Vivek Ramaswamy – prendront bientôt les rênes d’un tout nouveau « ministère de gouvernance efficace ». Ils aideront le futur président à « démanteler la bureaucratie, supprimer les réglementations redondantes, réduire les dépenses inutiles et restructurer les agences fédérales ». » Musk peine à contenir son enthousiasme. Une menace pour la démocratie ? Non, une menace pour la BUREAUCRATIE !!! L’homme le plus riche du monde annonce une onde de choc pour le système. Et gare à ceux – ils sont nombreux – qui participent au gaspillage !
La création d’un tel ministère aurait du sens en Belgique, a immédiatement tweeté Geert Noels (Econopolis). « Pour moi, l’idée est excellente », confirme l’économiste. J’ai quand même ajouté un emoji clignotant, pour ne pas trop provoquer de discussions. Il poursuit : « même si je n’aime pas le nouvel Elon Musk – je l’ai particulièrement apprécié en tant qu’entrepreneur – nommer une personnalité issue du monde des affaires pour réparer l’appareil d’État me semble utile. Pour la bonne et simple raison que lorsqu’un chef d’entreprise manque d’argent, il réduit ses dépenses, car il n’a pas la solution de facilité de nos dirigeants politiques, qui se contentent d’augmenter les revenus en imposant de nouveaux impôts. Elle n’a donc d’autre choix que de maîtriser ses coûts en repensant son modèle économique. » Nos élus ne cessent de remettre à sine die les interventions nécessaires ; tandis qu’un entrepreneur d’avant-garde sera plus susceptible d’appliquer une thérapie de choc et de faire des choix radicaux, aussi difficiles soient-ils. C’est parfois dur, mais au moins les choses avancent. »
Le célèbre homme d’affaires Marc Coucke, le « Belge Elon Musk », partage cet avis. “C’est ce que je demande depuis dix ans !” dit-il. Hier soir, j’ai écouté en direct les propos d’Elon Musk. Il a clairement indiqué qu’il entendait revoir les dépenses de l’État. Il envisage également de demander de l’aide aux Américains, via une ligne téléphonique spéciale. Un message fort et sincère, non ? Nous comptons réussir notre mission. »
L’Etat trop interventionniste
Que ferait réellement Marc Coucke s’il en avait l’occasion ? « Notre vivier de talents reste notre plus grand atout. Mais nous devons nous assurer que ces talents puissent exceller dans leur domaine d’expertise. Laissons les salles de classe aux enseignants, les patients aux médecins, la justice aux juges. Pas besoin de les bombarder de réglementations et de procédures. Les autorités ne donnent pas suffisamment de liberté aux citoyens et la bureaucratie s’installe.»
Noels est d’accord avec cela. L’économiste n’ira cependant pas jusqu’à scruter les effectifs fédéraux, qui comptent quelque 70 000 fonctionnaires, comme ce qu’a fait Musk en rachetant Twitter. Cette fois encore, il a promis de procéder à de profondes coupes dans l’administration. « Musk déteste les humains et préfère travailler avec des robots. Il faut cependant reconnaître que les services de l’État comptent trop de cadres et pas assez de cadres. »
L’économiste se demande également si Musk, compte tenu de cette nomination, prendra ses distances avec ses entreprises. « Cela me semble nécessaire pour éviter les conflits d’intérêts. » La Belgique peut donc oublier Marc Coucke, qui souhaite « continuer à inspirer ses 43 entreprises ».
Selon lui, la première mission d’un tel ministre serait de mettre de l’ordre dans le budget. « Il est impératif de remettre les dépenses publiques sur les rails. L’État compte de nombreux bâtiments vacants. Certaines entités mènent des procès coûteux contre d’autres – municipalités contre provinces, provinces contre régions, etc. – quelle perte de temps et d’argent ! Pendant ce temps, nous, citoyens, payons le prix fort de ces dysfonctionnements. Six gouvernements et six parlements pour soutenir l’appareil d’État ? C’est trop ! Il faut simplifier ! Aucune entreprise ne peut se permettre ce que notre État pense pouvoir se permettre. A mes yeux, notre pays a encore les ressources pour tenir deux, voire trois ans. Alors ce sera fini. Soyons clairs : ce qui se passe actuellement aux États-Unis – un gouvernement plus efficace, des coûts de main-d’œuvre réduits, des politiques de licences plus flexibles, une énergie moins chère et un pouvoir d’achat accru – n’est pas une bonne nouvelle pour l’Europe. Nos entreprises vont en souffrir, la concurrence risque de devenir intenable. »
Augmenter le revenu net
Selon Geert Noels, il nous manque une bonne philosophie. « Les managers se plaignent du manque de moyens. Ils ont tort. De petites mesures peuvent souvent avoir de grands effets. Au lieu de consacrer davantage de ressources aux transports publics hors de prix, ils devraient améliorer l’attractivité du vélo en travaillant sur les infrastructures et la sécurité, comme ils l’ont fait aux Pays-Bas. L’IA permet de simplifier de nombreuses tâches administratives, de calculer les pensions et allocations, de numériser l’administration, d’échanger des informations, de faire faire des traductions (sic). Pourtant, rien ne bouge ! »
Autre point évoqué par Coucke : les subventions, trop généreuses à ses yeux. « Toute dépense publique est de l’argent dont les citoyens sont privés. Trop de coûts sont institutionnalisés dans notre appareil d’État, il faut aller droit au but ! À l’exception bien sûr de l’aide apportée à ceux qui en ont vraiment besoin : il faut éliminer les listes d’attente en santé et les arriérés en justice. Dans un pays où l’entrepreneuriat se développe et où les entreprises créent des emplois, il est essentiel que les travailleurs disposent d’un revenu net plus élevé. Le travail gagne trop peu parce qu’il coûte trop cher aux employeurs. S’ils venaient ici, Musk et d’autres s’en rendraient vite compte également. »
Blessé pour aller mieux
Au début, sa méthode peut faire mal, reconnaît Marc Coucke, mais avec le temps, elle portera ses fruits. « Nous pourrons enfin ambitionner de devenir un pays où il fait bon vivre, avec des citoyens plus épanouis. Durant les premières années, mille et une décisions difficiles devront être prises. La plupart seront mal reçus. Certes, mais au bout de cinq ans, quand le nouveau système sera en place et qu’il générera plus de prospérité, l’enthousiasme reviendra et sera unanime. Et ceux qui seront à l’origine de cette révolution, après avoir dû endurer une opposition farouche, seront remerciés. »
*NB : A noter que dans la presse francophone, le terme « ministère de l’efficacité gouvernementale » a été unanimement utilisé, en référence au « département of Government Efficiency » américain. Nous doutons cependant de la pertinence de ce choix terminologique, comme l’explique ici Guillaume Deneufbourg, notre responsable de traduction.