« Notre ligne n’a pas changé sur ce sujet », assure Marie Vitoux, leader des écologistes nantais, alliés à la majorité socialiste locale. Pendant ce temps, l’opposition de droite s’indigne contre la « prise d’otages » par l’extrême gauche sur la question de l’armement des policiers municipaux.
C’est la ligne rouge des Gardes Verts nantais. Conquise en 2020 par la liste écologiste de Pierre Hurmic, la ville de Bordeaux a présenté cette semaine un projet de refonte de sa police municipale, destinée à être en partie équipée d’armes à feu. Ce revirement « affranchi des débats manichéens », pour reprendre les mots de l’édile vert, est inhabituel à l’échelle des grandes villes françaises confrontées à une montée du sentiment d’insécurité. Elle donne néanmoins matière à réflexion à Nantes, à l’heure où la cité des Ducs traverse un automne ponctué de violences et de règlements de compte en série. Alliés de la majorité socialiste de Johanna Rolland, les élus écologistes nantais réfutent cependant tout rapprochement avec leurs camarades bordelais. Et ils se portent garants de l’orthodoxie de leur famille politique.
« Nous regrettons la décision de Pierre Hurmic, qui ne correspond ni à notre politique ni à notre ligne qui n’a pas varié sur ce sujet. C’est très clair : chaque force a ses prérogatives. Et celui de la police municipale n’est pas de lutter contre le trafic de drogue, mais d’être dans une démarche de proximité, en dialogue avec les citoyens. indique à Figaro Marie Vitoux, leader du groupe écologiste et citoyen à Nantes, soulignant notamment le rôle de prévention des agents sur la question du trafic de drogue. “Il ne s’agit pas de nier le phénomène, mais de renforcer les meilleurs moyens pour l’endiguer. Cela passe par exemple par des renforts de la police judiciaire.» Demandé par Ouest de la France , l’élu écologiste Simon Citeau a également mentionné que “le port d’une arme peut générer de la peur”, et compliquerait le travail de prévention exigé des policiers municipaux.
Statu quo à la mairie de Nantes
Des réactions fraîchement reçues dans les rangs concernés. « Ces arguments sont aberrants et purement idéologiques. Il faut remettre l’église au centre du village : c’est notre sécurité qui est en jeu – et cela ne nous empêche en rien de continuer à travailler en étroite collaboration avec les habitants. defends Céline Peremarty, Force Ouvrière delegate within the Nantes “PM”. “Nantes est encore loin d’être une ville apaisée. Il est temps que la question des armes meurtrières soit à nouveau posée.»ajoute-t-elle en annonçant que les syndicats de police devraient adresser une demande d’armement à la mairie d’ici la fin de la semaine. À moyen terme, la police municipale devrait soumettre la même demande au bureau de Johanna Rolland.
Lire aussi
Coups de feu, violences… À Nantes, un automne sous les balles des trafiquants de drogue
Pour le moment, la mairie socialiste au pouvoir depuis 2014 reste réticente à l’idée de renforcer l’armement de sa police municipale. Conformément à une promesse électorale, l’édile travaille à augmenter le nombre de policiers. Après des débuts difficiles, le recrutement s’est accéléré et porte désormais l’unité à plus de 170 personnes. Une augmentation de salaire a également été accordée aux policiers.
Pourtant, de l’eau semble avoir coulé sous les ponts de la ville de Nantes. La mairesse Johanna Rolland avait par le passé assumé son opposition « personnel et politique » pour armer la police municipale. Depuis près d’un an en revanche, l’édile s’est concentré sur ses autres projets, semblant privilégier le statu quo sur ce dossier. L’élu n’a fait aucune déclaration sur les dernières violences et n’a pas commenté publiquement la décision de Bordeaux. L’ancien adjoint à la sécurité, Pascal Bolo, insistait encore en 2022 sur le fait que “L’arme meurtrière n’est ni une nécessité ni une option”, tout en recommandant aux policiers “retirer” en cas de danger. Son successeur depuis 2023, Bassem Asseh, se montre plus diplomate. “Nous n’avons pas l’idée, dans l’immédiat, d’armer davantage la police municipale.» il a nuancé en septembre Figaro. Mercredi soir, l’élu socialiste a également remercié en ligne la police – dont la police nationale armée – qui est intervenue dans les quartiers nord, en proie à des violences. « Leur présence est essentielle : elle rassure les citoyens et exerce une pression indispensable sur les trafiquants. » a-t-il souligné sur le réseau social X – en apparente opposition aux propos tenus par Simon Citeau, sur l’effet provoqué par des policiers armés.
Si la mairie changeait d’avis sur l’armement de la police municipale, alors une ligne rouge serait franchie
Marie Vitoux, leader du groupe écologiste et citoyen à Nantes
« Que la présence de policiers armés puisse être rassurante pour les riverains semble évident. Mais il est inquiétant de constater que les différents groupes au pouvoir à Nantes ne voient pas les choses de la même manière ! souligne Céline Peremarty. En avril dernier, la maire de Nantes a mis ses alliés devant le fait accompli en annonçant l’arrivée de 80 caméras de vidéosurveillance, en plus du parc déjà opérationnel de 250 appareils. Une démonstration de force qui a indigné les écologistes. “Si la mairie changeait d’avis sur l’armement de la police municipale, alors une ligne rouge serait franchie”prévient Marie Vitoux.
Lire aussi
A Nantes, la statue du jeune Jules Verne se retrouve à nouveau au sol
A droite, les élus nantais se désolent du climat de guerre froide entre roses et verts. « C’est le comble de l’irresponsabilitétacle l’édile Foulques Chombart de Lauwe. Johanna Rolland est devenue l’otage de ses alliés d’extrême gauche, qui la maintiennent dans un blocage dogmatique. A lui de s’opposer à leurs revendications et d’armer la police, c’est-à-dire de les protéger. « Ce n’est pas un policier armé qui fait peur, mais plutôt l’insécurité à laquelle les Nantais sont confrontés au quotidien. » » a ajouté jeudi le groupe d’opposition de droite et du centre dans un communiqué.
Malgré tout, les policiers municipaux se croient plus proches que jamais d’hypothétiques équipements d’armes à feu. Au-delà du redressement bordelais, Céline Peremarty évoque la dynamique nationale, ainsi que le renouvellement des chefs locaux par des personnalités énergiques. La police nationale départementale s’est dotée en septembre d’un nouveau directeur, Philippe Jos, qui a fait ses armes à Mayotte puis en Guyane. Et la police municipale s’est retrouvée sans chef pendant une année entière, avant l’arrivée en août de David Canut, ancien directeur de la commune de La Rochelle. Une police qu’il avait accompagnée lors de sa transition vers les armes létales, en 2017. Un profil intéressant donc pour mener une mission similaire à Nantes. « Encore faut-il que la volonté politique soit là »concède toutefois le policier nantais.