« Le barman du Ritz » s’est invité au Cercil

Pour son premier roman, le journaliste radio Philippe Collin a frappé fort et juste en racontant la vie rocambolesque de Franck Meier, barman au Ritz pendant l’Occupation. Une œuvre mêlant habilement fiction et histoire. Il était au Cercil le 5 novembre à Orléans.

Philippe Collin est venu présenter son premier roman Le barman du Ritz le 5 novembre au Cercil. Photo SD

Par Sophie Deschamps.

La rencontre avec Philippe Collin, éminent journaliste de Inter, a longtemps fait salle comble. Il faut dire que le public, très féminin ce mardi 5 novembre 2024 dans la salle cosy du Cercil, n’a pas voulu rater l’arrivée de cette conteuse qui n’a pas d’égal lorsqu’il s’agit de raconter des histoires.

Celui du barman du Ritz (déjà vendu à 165 000 exemplaires) lui a pris trois ans de sa vie. Tout commence le 13 juin 1940, la veille de l’entrée des troupes allemandes à Paris. Franck Meier, 55 ans, célèbre barman du Ritz depuis 1921, se cache derrière son comptoir, se préparant à recevoir de hauts dignitaires nazis. Contrairement à d’autres, le palais n’est pas réquisitionné et reste ouvert. Durant les quatre longues années d’occupation, Franck Meier fut à l’avant-garde de l’Histoire. Car comme le rappelait Philippe Collin, « toutes nos familles sont liées à cette guerre. C’est notre héritage avec des histoires qui nous accompagnent depuis l’enfance. Avec des questions : comment aurions-nous réagi ? Qu’aurions-nous fait ou pas fait ? En un mot, cela nous concerne tous et cela nous unit tous ». Puis il précise : « Mon livre n’est pas dépendant ».

“C’est un transfuge de classe, comme moi.”

Mais c’est bien un roman. En effet, pour dévoiler les pensées intimes de Franck Meier, l’écrivain a imaginé son journal intime, dont on retrouve des extraits au fil des pages. Philippe Collin confie alors que ce juif autrichien d’origine modeste, né en 1884 au Tyrol et qui a appris les ficelles de son métier de barman aux USA au début du XXe siècle, est comme lui un transfuge de classe.

Mais il nous invite aussi à découvrir toute une galerie de personnages peints avec talent. Car dès le début de l’Occupation, dirigeants nazis (Göring, Goebbels, etc.) et officiers de la Wehrmacht côtoient au Ritz l’élite politique parisienne, mais aussi l’élite culturelle comme Sacha Guitry, Coco Chanel ou Arletty. ” C’est un résumé de la France occupée qui se retrouve dans l’intimité du bar : collaborateurs, profiteurs de guerre, espions mais aussi résistants. ». Sans oublier Blanche Auzello, l’épouse du directeur du Ritz. Une femme forte et fragile qui cache un sombre secret. Car dans cet ouvrage la persécution des Juifs en France est loin d’être évitée.

Annaïg Lefeuvre, directrice du Cercil, a animé la rencontre avec Philippe Collin, auteur de Barman du Ritz. Photo SD

Le Royal Highball, le cocktail préféré de Philippe Collin

Mais une réunion d’une heure et demie n’a pas suffi pour épuiser les secrets du bar Ritz et de ses visiteurs. Et ça tombe bien puisque rien ne vaut la lecture de cet excellent roman. Cependant, une dernière question s’imposait, celle du cocktail préféré de Philippe Collin : « C’est le Royal Highball. toin cocktail que Franck Meier a inventé en 1921. Il est à base de champagne, de cognac, de liqueur de fraise et de fraises de Plougastel hachées. Or, à cette époque le champagne était sacré, on ne le mélangeait pas. Il est le premier à oser le faire, avec cette idée : la France c’est beaucoup de choses et dans ce verre, je vais mettre le pays qui m’a accueilli ». Puis il ajoute d’un air malicieux « C’est drôle parce que je l’ai dit une fois à la télévision et depuis, ils sont bombardés au Ritz de demandes de Highball Royal alors que ce cocktail était quelque peu tombé en désuétude ».

Le palais Ritz, place Vendôme à Paris. Photo SD

Le barman du Ritz de Philippe Collin (Albin Michel)

Pour aller plus loin sur Magcentre : La Tribu ou les années françaises d’Hannah Arendt au Cercil.

 
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