“Je l’ai vu avec un regard vide, se tordant de douleur alors que nous le croisions.« .
Dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre 2023, Damien a été témoin de la lente agonie d’un jeune homme de son âge, Lucas, dans les couloirs des urgences de l’hôpital d’Hyères. Après plusieurs heures passées sur une civière, ce dernier décède des suites d’une infection à méningocoque.
Plus d’un an après la disparition de Lucas, le drame reste dans les mémoires et la justice est désormais saisie du volet judiciaire.
Deux rapports de l’ARS et de l’Inspection générale des affaires sociales
Deux rapports sont venus étayer les faits de cette nuit où ce jeune patient a perdu la vie. Une enquête a été menée en interne par l’Agence régionale de santé et un deuxième rapport a été établi par l’Inspection générale des affaires sociales à la demande du ministre de la Santé.
Attachés à la procédure, ces examens précis menés sur l’organisation mise en place le jour de la prise en charge de Lucas, font désormais partie du prisme de l’enquête.
Comme nous l’a confirmé le 5 novembre 2024, le procureur de la République de Toulon Samuel Finielz, Le parquet général a ouvert une information judiciaire pour « homicide involontaire » ayant causé la mort d’autrui par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement.
Cette ouverture d’information a conduit à la nomination d’un juge d’instruction chargé de mener les investigations nécessaires pour engager, le cas échéant, des poursuites et prononcer d’éventuelles mises en examen.
Contacté, Me Thomas Callen, l’avocat de la mère de Lucas, de Corinne Godefroy et de ses proches, se félicite que «un juge d’instruction a été désigné dans le cadre d’une information judiciaire pour homicide involontaire« .
Il précise avoir déposé plainte le 12 décembre 2023 pour un «série de négligences“ayant empêché le diagnostic de l’infection à méningocoque de Lucas”,le privant finalement de toute chance de survie« . Il a également évoqué la possibilité d’ouvrir une information judiciaire pour « homicide involontaire ».
Un témoin a écrit au ministère de la Santé
Dans un témoignage émouvant livré à Var-Matin le 19 décembre 2023, Damien Arnoux a décrit les souffrances endurées par son voisin sur la civière. “Il a gémi et je l’ai vu se lever de sa civière, s’appuyer contre le mur et s’effondrer. Ses yeux regardaient dans le vide. Deux infirmières ne faisaient pas attention« Il estime que son cas n’a pas été pris au sérieux.
Le champion de funboard sort bouleversé de l’établissement hospitalier d’Hyères et écrit spontanément au ministre de la Santé. (qui était alors Aurélien Rousseau) qui, par l’intermédiaire de son directeur de cabinet, a répondu qu’il contactait l’Agence régionale de santé pour clarifier la situation.
« On m’a demandé pourquoi j’envoyais des lettres sur ce que j’avais vu et quel était le but de ma démarche. Le but ? C’est parce que je ne veux pas que mes proches ou d’autres vivent ce que Lucas a vécu. Vous êtes censé vous sentir en sécurité dans un hôpital. On parle d’un manque de ressources, ce n’est pas le problème. Je n’y retournerai plus jamais« .
Il a été témoin des terribles souffrances de la victime.
Le témoin de cette nuit tragique a détaillé les événements dont il a été témoin, impuissant. “Je n’ai plus de batterie sur mon téléphone“Il entend dire que sa tension est là.”à 5.3. Une femme médecin revint vers Lucas et lui demanda : Monsieur, êtes-vous avec nous ? Lucas a réussi à lui dire qu’il allait extrêmement mal. Il est très essoufflé.»
Damien entend alors que si Lucas peut parler ce n’est pas un vrai 5.3. “Il était au bord de la conscience. Le médecin est parti… ». Mais le cœur de Lucas va cesser de battre, malgré l’intervention d’une nouvelle équipe.
Sa mère et son père, contraints d’attendre toutes ces heures, entre la salle d’attente et le parking, se sont retrouvés sur deux chaises devant le corps inerte de leur fils de 25 ans, dans une salle de choc. Lucas, qui se plaignait d’intenses maux de ventre à son arrivée, n’est jamais sorti vivant de l’hôpital d’Hyères.
Une mystérieuse enveloppe déposée dans la boîte aux lettres de Lucas
Lucas a-t-il été pris en charge comme il aurait dû l’être ou a-t-il été victime de négligence, de manquements, d’insouciance, d’inattention ?
Damien Arnoux n’est pas le seul à avoir été choqué par la mort de Lucas. Quelques jours après la disparition du jeune homme, une étrange lettre a été déposée dans sa boîte aux lettres. Il s’agissait d’une enveloppe marquée « Hôpital d’Hyères » et avec un cachet des urgences.
À l’intérieur, le mystérieux émissaire a soumis une partie du dossier médical, des analyses de sang originales, un rapport sur le traitement de Lucas, le résultat de l’électrocardiogramme qui mentionnait un ECG anormal à 17h25, le CD-Rom original du scanner.
“Avons-nous ouvert la boîte de Pandore ?», demande M. Thomas Callen.