Une sécheresse extrême frappe la Guyane

Une sécheresse extrême frappe la Guyane
Une sécheresse extrême frappe la Guyane

Maripasoula (Guyane), rapport

L’eau, la nourriture et même le carburant sont des denrées de plus en plus rares dans les régions amazoniennes du sud de la Guyane. À Maripasoula, commune la plus peuplée de la région, les bouteilles de gaz sont déjà quasiment introuvables dans les commerces, selon les habitants. « La situation est de plus en plus critique et intenable. Il nous manque tout »résume l’un d’eux, consterné.

Pour les 40 000 habitants du Haut-Maroni et du Haut-Oyapock, si l’accès aux services publics de base est globalement incertain, la violente sécheresse qui sévit dans tout le bassin amazonien est sur le point de transformer ces échecs quotidiens en véritable crise humanitaire.

Dans ces régions amazoniennes dépourvues de routes, le niveau d’étiage des rivières a atteint un niveau historiquement bas. Cela a contraint les canoéistes qui assuraient l’essentiel du transport des personnes et des marchandises à réduire drastiquement, voire cesser leurs activités. Seules les liaisons aériennes réalisées par de petits avions à hélices de dix-neuf places relient encore les communes de Maripasoula, Camopi ou Grand-Santi au littoral, et les habitants craignent une aggravation des pénuries.

L’intensité de cette saison sèche (août-novembre) est liée au déficit hydrique chronique que subit la Guyane depuis dix-huit mois (à l’exception de mai 2024), et à des températures anormalement élevées, ce qui pourrait faire de 2024 l’année la plus chaude jamais enregistrée. en Guyane, en avance sur le précédent record… de 2023. Selon Météo-, ce sont deux conséquences du phénomène océanique El Niño et, en toile de fond, du changement climatique.

Pack d’eau à 17 euros

A un mois de la saison sèche, le rationnement de l’eau potable est déjà en place pour plusieurs milliers de personnes. S’il s’agit d’un problème structurel dans les villages les plus en amont du Maroni, les carences concernent désormais la plupart des habitants raccordés à des forages alluviaux (qui s’alimentent à partir de nappes phréatiques dont le niveau dépend d’une rivière), y compris dans les localités les plus en aval, comme dans la commune de Grand-Santi.

Lire aussi : En Guyane, les Amérindiens font face au manque d’eau

Quant aux biens rares arrivant dans la région par avion – via la France ou le Suriname – encore faut-il pouvoir se les offrir. À Maripasoula, les prix déjà prohibitifs en temps normal ont presque doublé, atteignant 17 euros pour un pack d’eau ou 100 euros pour une bouteille de gaz. « Si ce qui nous arrive arrivait en France, on parlerait déjà d’une catastrophe naturelle »résume Jonathan Abienso, un Maripasoulien à la tête d’une entreprise de fret qui a arrêté son activité.

Les déplacements quotidiens, que ce soit pour des raisons de santé ou pour le transport scolaire, sont aussi une épreuve. En ce premier jour d’école, plusieurs centaines d’élèves n’avaient aucun moyen de se rendre à l’école.

Un pont aérien

Le 31 octobre, la préfecture de Guyane a annoncé la mise en place d’un pont aérien utilisant des avions de l’armée. Objectif : approvisionner les communautés isolées en eau, en nourriture, mais aussi en carburant pour alimenter les centrales thermiques qui fournissent l’électricité du Haut-Maroni.

Dans le même temps, la collectivité locale de Guyane, qui contrôle le transport aérien, a annoncé qu’elle doublerait sa capacité de fret vers les communes de l’intérieur du pays. Enfin, les villages les plus touchés par la pénurie ont reçu des fontaines à eau atmosphérique et des tablettes pour rendre potable l’eau des ruisseaux.

Ces mesures d’urgence, aussi nécessaires que coûteuses, remettent en cause l’anticipation des services de l’État. Ces saisons extrêmement sèches, dont nous savons qu’elles vont s’aggraver avec le changement climatique, ne sont en fait pas nouvelles dans la région.

Surtout, depuis des années les autorités de certains villages réclament des fonds pour remplacer leurs forages obsolètes et la plupart des élus locaux réclament la construction d’un « Route fluviale »afin de relier Maripasoula à la côte. Promis plusieurs fois [1]mais jamais achevée en raison de son coût estimé à au moins 1 milliard d’euros, cette route est, selon les élus, le seul moyen de désenclaver cette région, plus que jamais aux frontières de la République.

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