Les dénonciations d’actes répréhensibles dans la fonction publique fédérale ont augmenté considérablement au cours des deux dernières années. La commissaire à l’intégrité du secteur public affirme que son bureau traverse une « crise » sans précédent qui pourrait décourager les dénonciateurs de lui faire confiance.
Il y a actuellement 161 plaintes pour actes répréhensibles et représailles en attente d’examen. Cela dépasse de 500 % la capacité de traitement de l’équipe du Commissariat à l’intégrité du secteur public.
C’est sérieux
dit le commissaire Harriet Solloway. Ces délais risque d’avoir un impact sur la qualité des enquêtes, car les preuves disparaissent [ou deviennent] plus difficile à trouver
. Les témoins peuvent aussi oublier des informations, souligne le commissaire.
Les cas qui restent non traités pendant deux ou trois ans ne sont pas du tout crédibles.
Le Bureau pourrait ne pas pouvoir enquêter [sur] certaines allégations
souligne Mme. Solloway.
Depuis le 31 mars, son bureau a reçu 198 nouveaux signalements, alors que pour toute l’année précédente, il y en avait 332.
La commissaire à l’intégrité du secteur public, Harriet Solloway, espère que les retards actuels ne décourageront pas les lanceurs d’alerte de signaler des actes répréhensibles.
Photo : Avec l’aimable autorisation du Commissariat à l’intégrité du secteur public du Canada
La commissaire veut doubler son budget
Pour la première fois depuis sa création, l’Office demande au gouvernement de lui accorder des fonds supplémentaires : environ 1,3 million de dollars pour l’année en cours et plus de 7,2 millions de dollars de plus annuellement par la suite, ce qui doublerait son budget.
Harriet Solloway pense que cela lui permettra d’arriver à un arriéré gérable
dans environ trois ans.
Je crains que des fonds insuffisants m’empêchent de [respecter] mon mandat.
Le bureau du président du Conseil du Trésor s’assure que le gouvernement est en discussion avec le commissaire sur les problèmes de financement
indique l’attachée de presse Myah Tomasi.
Elle ajoute cependant qu’il Il existe un processus standard pour augmenter les budgets de fonctionnement de tous les organismes de service public.
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Le Cabinet du président du Conseil du Trésor affirme que « la protection des lanceurs d’alerte est une priorité absolue ». (Photo d’archives)
Photo : Radio-Canada / Olivier Plante
Faut-il encore dénoncer ?
Harriet Solloway ne nie pas que les délais actuels risque décourageant
fonctionnaires à signaler les actes répréhensibles.
Le commissaire les encourage toujours à soumettre leurs préoccupations
mais leur demande un peu de patience
.
Nous prenons toutes les plaintes et divulgations très au sérieux
souligne Mme. Solloway. Sa priorité est d’assurer un processus juste et équitable qui ne s’éternise pas indûment.
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Joanna Gualtieri estime que le Commissariat à l’intégrité du secteur public devrait disposer de tous les fonds nécessaires pour mener à bien son travail.
Photo : Avec l’aimable autorisation de Joanna Gualtieri
Pour l’ancien fonctionnaire fédéral et lanceur d’alerte Joanna Gualtierices retards sont équivalents à un déni de justice
.
Aujourd’hui âgée de 63 ans, cette avocate de formation a dénoncé des malversations au cours de sa carrière et s’est battue pendant 13 ans devant les tribunaux pour faire valoir ces allégations, avant de parvenir à un accord avec le gouvernement.
Malgré sa détermination, ce voyage a été psychologiquement douloureux, dit-elle d’une voix tremblante. Joanna Gualtieri on a l’impression qu’il a perdu les meilleures années de sa vie
pour mener ce combat.
Les yeux humides, Mme. Gualtieri dit que aucune personne soucieuse de son bien-être et de celui de son mari, de ses enfants, de ses parents, de sa famille, de ses amis, ne s’impliquerait dans cela
. Elle veut que les gens comprennent que le processus peut être difficile.
Ce serait comme demander à quelqu’un d’enfoncer un pieu dans son corps.
Tant que les lanceurs d’alerte ne seront pas protégés par une loi plus stricte, Joanna Gualtieri recommande aux gens de ne pas prendre la décision de signaler à la légère.
Le Canada en file d’attente du peloton
La Loi sur la protection des lanceurs d’alerte, adoptée en 2007 sous le gouvernement conservateur de Stephen Harperest l’un des pire sur la planète
» s’insurge le défenseur des droits des lanceurs d’alerte David Huttonqui est chercheur principal au Centre for Free Expression de l’Université métropolitaine de Toronto.
Législation créée après le scandale des commandites il est en fait très facile de dissimuler des actes répréhensibles
et ne protège pas bien les lanceurs d’alerte, selon M. Hutton.
Par exemple, au cours des dernières semaines, un fonctionnaire qui a contribué à lever le voile sur la mauvaise gestion du fonds vert de Technologies du développement durable Canada a même été convoqué pour témoigner devant un comité parlementaire.
D’emblée, le lanceur d’alerte a fait part de son mal-être aux députés. Est [ne] je ne me sens pas à l’aise ici, car ma présence indique que les systèmes mis en place pour protéger [dénonciateurs] ça ne marche pas, c’est le plus gros problème
a-t-il déclaré.
Même aujourd’hui, il n’y a pas de véritable responsabilité
» a-t-il déploré avant de répondre aux questions pendant près de deux heures.
Un projet de loi pourrait changer la donne
Ce abus de confiance
cannot last any longer, according to Bloc Québécois MP Jean-Denis Garon.
Estimant lui-même que la loi qui guide le travail du commissaire à l’intégrité du secteur public est incomplet
il a décidé d’élaborer le projet de loi C-290.
Nous devons maximiser les chances [de dénonciation]maximiser la protection et l’intégrité du système et garantir que dans la machine, les gens commencent à avoir peur de mal gérer les fonds publics et de faire des choses illégales.
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Le député du Bloc québécois Jean-Denis Garon a décidé de déposer le projet de loi C-290 après avoir discuté avec de nombreux lanceurs d’alerte qui n’ont pas confiance dans le système actuel. (Photo d’archives)
Photo : La Presse Canadienne / Adrian Wyld
M. Garon précise que le projet de loi C-290 prévoit une meilleure protection des lanceurs d’alerte et des témoins, ainsi qu’un élargissement des critères d’admissibilité aux plaintes. Si le projet de loi est adopté, le commissaire Harriet Solloway prévoit que son équipe sera encore plus sollicitée.
Le projet de loi a reçu le soutien de tous les partis politiques à la Chambre des communes et est actuellement en deuxième lecture au Sénat.
Le Bureau du président du Conseil du Trésor, Anita Ananddit la presse tous les efforts visant à renforcer [loi]
y compris le C-290. L’attachée de presse Myah Tomasi déclare que Les lanceurs d’alerte jouent un rôle crucial dans le maintien de l’intégrité de la fonction publique fédérale, et leur soutien est essentiel pour favoriser une culture de transparence et de responsabilité.
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Anita Anand, présidente du Conseil du Trésor (photo d’archives)
Photo : La Presse Canadienne / Adrian Wyld
Le Parti conservateur du Canada n’a pas souhaité commenter le sujet.
Un enjeu politique ?
Le lanceur d’alerte Joanna Gualtieri estime que le C-290 ne fait qu’effleurer la surface
du problème.
La protection des lanceurs d’alerte est, par définition, toujours une question politique
insiste celui qui plaide pour une réécriture complète de la loi plutôt qu’une réforme.
Quand les fondations d’une maison sont défectueuses, on n’essaye pas de la recouvrir de plâtre
. C’est à cela que nous sommes confrontés avec cette loi
soutient l’ex-fonctionnaire.
À un moment donné, il faudra que le gouvernement ait le courage de dire qu’il prend cela au sérieux : il s’agit d’exercer son droit à la liberté d’expression pour dénoncer des actes répréhensibles qui nuisent à l’intérêt public, et c’est tout l’intérêt d’une démocratie.
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Le sénateur Pierre Dalphond croit que tous ses collègues collaboreront lors de l’étude du projet de loi, afin qu’il obtienne la sanction royale. (Photo d’archives)
Photo : Radio-Canada / Brian Morris/CBC
Le sénateur Pierre Dalphond, qui parraine le projet de loi C-290 à la Chambre haute, concède qu’il il y a des choses à améliorer
.
Mais si les sénateurs modifient le projet de loi, il retournera à la Chambre des communes et pourrait ne pas être adopté avant le déclenchement des élections.
M. Dalphond estime cependant que le C-290 est déjà une très bonne étape
et nous ne devons pas manquer cette opportunité.