Décès à 93 ans de Michel Pouliot, le père de l’aviation en Gaspésie

« C’est une grande Gaspésie qui s’en va. Cela a marqué les débuts de l’aviation dans la région. C’était un pionnier », explique l’historien Jean-Marie Fallu.

ami Gaston Langlois le décrit comme un mentor, ayant été son employé pendant une quinzaine d’années. Michel Pouliot en était le pilote en chef. « Le chagrin est lourd. Il va vraiment nous manquer», lance-t-il non sans émotion.

Le maire de Gaspé, de son côté, n’a eu que de bons mots pour son illustre concitoyen. «Un visionnaire, un pionnier, un fonceur, un leader, l’un des plus célèbres bâtisseurs de l’aviation civile québécoise, en plus d’être un homme d’affaires expérimenté», a-t-il déclaré sur sa page Facebook. Digne des plus grands, son parcours a été semé d’embûches, mais la passion qui l’animait l’a poussé à en faire toujours plus pour les Gaspésiens, les Gaspésiens et tout le Québec. Un grand humain. »

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Image du bas : Michel Pouliot et le maire de Gaspé, Daniel Côté, lors de l’annonce du prolongement de la piste de 1000 pieds de l’aéroport de Gaspé, en 2019. (Jean-Philippe Thibault/Collaboration spéciale)

Jusqu’au bout, Michel Pouliot n’a cessé de défendre les intérêts de la Gaspésie et de fustiger les grands décideurs qui, encore aujourd’hui, ont négligé la problématique du transport aérien dans la région.

« Il n’a jamais arrêté. Il y a à peine deux semaines, à 93 ans, il était dans son sous-sol, complètement sain d’esprit, en train de fouiller dans les papiers de l’aviation. Il avait la carte de l’Est du Canada gravée dans son cerveau. Il était généreux de son temps. »

— Gaston Langlais

Entrepreneur et aviateur

Michel Pouliot est surtout connu aujourd’hui pour avoir fondé la première compagnie aérienne de la région en 1951, alors qu’il avait à peine 20 ans : Transgaspésien Aerial ltée. À l’époque, il était mineur puisque la majorité était de 21 ans.

Mais son amour pour l’aviation et l’entrepreneuriat a commencé bien plus tôt. Michel Pouliot est né le 13 avril 1931 à Cap-d’Espoir, ville aujourd’hui rattachée à Percé. Son grand-père Joseph-Camille Pouliot fréquente les élites canadiennes-françaises en sa qualité d’avocat, puis de juge à la Cour supérieure. Il comptait parmi ses amis proches le premier ministre du Canada Wilfrid Laurier (il sera le parrain d’une de ses filles).

Son père Camille-Eugène Pouliot était également une figure très connue de la Gaspésie. C’est comme médecin qu’il s’établit d’abord à Cap-d’Espoir, dont il fut maire de 1932 à 1949. Il occupa un double rôle puisqu’il fut élu député de Gaspé- à l’Assemblée nationale en 1936 à 1962, sous le Syndicat national de Maurice Duplessis. « C’est une famille qui a fait beaucoup pour la Gaspésie, se souvient Jean-Marie Fallu. Son rôle de député l’amène à déménager sa famille à Québec en 1944. C’est dans la capitale que le jeune Michel tombe amoureux de l’aviation.

Résident au Collège de Lévis puis à l’Académie de Québec, il rejoint l’Aéroclub de Québec en 1947 pour sa formation de pilote. Il avait alors 16 ans. Le jeune homme doit prendre le bus puis marcher 5 km pour se rendre à l’école d’aviation. Pourtant, l’exercice en valait la peine puisqu’il a rencontré des vétérans de l’Aviation royale canadienne et des héros de la Seconde Guerre mondiale. « Ces pilotes étaient imprégnés d’aviation, c’était devenu une passion. C’est là que l’aviation commerciale a véritablement débuté, avec beaucoup d’aviation de brousse d’abord, puis avec des pinpoints. Nous avons été influencés, inspirés, pour offrir un service similaire à Gaspé», a expliqué Michel Pouliot dans les pages de Soleilen 2018.

Il a obtenu sa licence de pilote privé et professionnel auprès de l’Aéroclub. Il pourra s’envoler vers sa Gaspésie natale en fin de semaine avec l’avion de son propre père. Son parcours entrepreneurial a commencé au même moment. A cette époque, un avion monomoteur était encore un objet rare dans la région. Après la messe dominicale, il embarque trois passagers pour quelques dollars. Il effectuera jusqu’à 40 décollages par jour, chaque tour durant environ 15 minutes. Ses seules pistes d’atterrissage sont les champs et les plages. “Quand j’atterrissais, il m’arrivait d’être reçu par un agriculteur qui brandissait sa fourche parce que j’avais fauché une partie de sa récolte avec mon avion”, se souvient-il dans sa biographie. Bienvenue à bord publié il y a quelques années.

La création de sa compagnie aérienne Transgaspésien Aerial ltée en sera la suite logique. Si la chose paraît aujourd’hui presque anodine, il faut savoir que la Gaspésie était mal desservie par la desserte aérienne jusqu’au début des années 1950. Seule Matane possédait une piste d’atterrissage à cette époque.

« Il fallait donc établir rapidement un réseau de connexions sécuritaire en Gaspésie. Construisez tout à partir de zéro. La Gaspésie était orpheline d’une desserte aérienne adéquate», raconte son ami et confident Jacques Bouchard dans la biographie qu’il a signée.

Son entreprise fut d’abord utilisée pour survoler les forêts gaspésiennes, notamment pour les ingénieurs forestiers et les géologues. La papetière Gaspésia sera l’un de ses clients. Il participera également aux efforts de développement du Nord québécois en transportant les travailleurs – bûcherons, mineurs, cuisiniers, journaliers – qui ont œuvré à la construction du Québec moderne, de la centrale Manic 5 aux infrastructures de Fermont, ou encore à l’hydroélectricité. gare. de Churchills Falls, au Labrador.

Son entreprise devient Air Gaspé en 1960. Au plus fort de ses opérations, elle comptait 23 avions, transportait environ 80 000 passagers par année et employait 82 personnes, desservant tout l’est du Canada. Michel Pouliot y a travaillé 16 heures par jour pendant près de 15 ans. Il vend cependant tous ses intérêts à Quebecair en 1974, quelque peu à contrecœur.

Elle avait déjà racheté Air Rimouski et Matane Air Service un peu plus tôt, et Michel Pouliot voyait les plaques tectoniques bouger, sans pouvoir les arrêter. « Ce fut un moment d’une grande tristesse, sans créer d’amertume. Je me suis malheureusement rendu compte que les temps changeaient et que, petit à petit, l’Est du Québec perdait le contrôle de son transport aérien au profit d’entreprises beaucoup moins personnalisées dont le siège social était situé en ville.

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Michel Pouliot, Gaston Langlois et Renaud Desrosiers le 8 septembre 2023 à Matane pour l’inauguration de l’aéroport Russell-Burnett. (Gilles Gagné/Collaboration spéciale)

Au Panthéon

L’aviateur est resté un temps conseiller chez Quebecair, mais des frictions avec la direction ont mené à son départ. Il créera plus tard Les Ailes de l’île pour transporter des passagers des grands centres urbains vers Anticosti, mais le service ne sera offert que pendant trois ans.

Entre-temps, elle mettra également en place un service de transport médical entre Gaspé et Anticosti ainsi qu’entre Gaspé et les Îles-de-la-Madeleine. Il crée également une desserte aérienne de Gaspé à l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Le commandant Robert Piché avoua plus tard qu’il était nerveux lors de sa première rencontre avec le Gaspésien, en 1973, puisqu’il était déjà « une légende dans le monde de l’aviation » et qu’il était une Source d’inspiration pour toute une génération de Canadiens français qui voulaient réaliser leur rêve de pilote professionnel.

Michel Pouliot a également été co-fondateur de ce qui est encore aujourd’hui le Chantier Naval Forillon. Son implication dans la communauté ne fait plus de doute. Il a participé à la fondation de la Société historique de la Gaspésie et du Club Richelieu de Gaspé, dont il a été membre pendant plus de 65 ans. Il était également membre à vie de la Fondation de l’Hôpital de Gaspé. Il a été nommé Chevalier de l’Ordre national du Québec en 2008.

« Chaque année, il venait à l’assemblée générale du Musée de la Gaspésie pour savoir si les finances allaient bien et offrir quelque chose si ça n’allait pas bien », se souvient Jean-Marie Fallu. Il a été un soutien indéfectible. C’est grâce à lui que la Fondation du Musée est devenue ce qu’elle est. Il a été extrêmement important en termes de soutien financier.

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Michel Pouliot a reçu l’Ordre de la Gaspésie en 2017. (Jean-Philippe Thibault)

Jusqu’au bout, l’homme a plaidé pour un meilleur service aérien régional et en a toujours fait l’un de ses chevaux de bataille. L’aviation était la grande passion de sa vie. « Il était franc. Si quelque chose ne lui convenait pas, il ne tournait pas autour du pot. Il était respectueux, mais franc, ajoute Jean-Marie Fallu. C’était une vraie personne, dévouée à sa communauté. J’en garde un précieux souvenir. Il fait partie des grands Gaspésiens que l’on a connu dans l’histoire contemporaine.

En 2014, il a été intronisé au Panthéon de l’air et de l’espace du Québec. Son nom y figurera à jamais aux côtés de personnalités marquantes telles que Marc Garneau et Julie Payette. En Gaspésie, avec toute sa contribution, le nom de Michel Pouliot résonnera encore pendant plusieurs décennies.

 
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