En 1913, « Ida » quitte le chantier naval de Corsier-Port

En 1913, « Ida » quitte le chantier naval de Corsier-Port

Publié aujourd’hui à 13h21

« Ida » sera présentée à Palexpo. Il ne s’agit ni d’une bête de spectacle ni d’une personnalité marquante, mais d’une vieille dame très bien conservée, faite de bois et de métal, capable de naviguer sur l’eau. « Ida » est un bateau sorti en 1913 du chantier Jules Mégevet de Corsier-Port. Entièrement remis à neuf, équipé d’un magnifique moteur Félix 4 cylindres également fabriqué à Genève, ce bateau participe au salon Swiss Retro Mekanika les 27 et 28 avril.

« Ida » vient de reprendre vie là où elle avait été réalisée il y a 111 ans, sous le hall de construction qui abrite la fondation MJVP1909. Les objectifs de cette institution privée d’utilité publique à but non lucratif s’inspirent de la passion pour le nautisme et l’aviation de ses fondateurs et de leur intérêt pour l’histoire des véhicules automobiles fabriqués à Genève aux XIXe et XXe siècles. : bateaux, automobiles, avions et motos. L’exposition organisée ce week-end à Palexpo en présente plusieurs.

“Mais je vais piquer”

Autour d’Ida, sur le stand B02, nous verrons sept voitures anciennes et trois motos, toutes genevoises, et trois moteurs, deux genevois et un neuchâtelois. Qu’ils appartiennent à la Fondation MJVP1909, à la Fondation Pictet ou au Musée des Transports de Lucerne, ces véhicules témoignent du dynamisme de l’industrie locale au début du XXe siècle.

Pas facile de mémoriser le nom de la fondation MJVP1909, avant de comprendre qu’il s’agit d’un jeu de mots signifiant « Mais Je Vais Pique », formé des patronymes des maîtres du chantier en 1909, Jules Mégevet et Charles Picker. En 2019, la fondation a publié un magnifique livre écrit par Daniel Charles, sous le titre « L’entreprenant Monsieur Mégevet 1874-1932 ».

Une moto Dufaux de 1914.

Dans cet ouvrage richement illustré, nous revivons l’aventure industrielle de Jules Mégevet, le constructeur, et de Charles Picker, le concepteur, dont la combinaison de deux patronymes fut d’abord utilisée pour nommer les bateaux à moteur. « Mais-Je-Vais-Piquer I » en 1905 puis « Mais-Je-Vais-Piquer II », jusqu’à « Mais-Je-Vais-Piquer X » en 1912, participent à des courses de vitesse sur la Côte d’Azur et sur Le Léman, souvent avec succès. Aucune de ces pirogues ne nous est parvenue.

« Ida », bateau à moteur de 8 mètres, construit en 1913 selon les plans de Charles Picker, est donc un très rare survivant de cette industrie de pointe. C’est aussi l’un des derniers modèles construits à Corsier-Port sous la direction de Jules Mégevet. Il vend le chantier à Robert Coutant le 2 août 1913. « Une fois de plus, Mégevet a eu raison de vendre son chantier au bon moment », constate Daniel Charles. « Plus de carburant, pour les particuliers, donc plus de bateaux, donc plus de commandes ; le règne de Robert Coutant se termine aussitôt qu’il a commencé.

Sur le modèle américain

Après Coutant, c’est le baron Louis Sers en 1919, puis après sa faillite en 1922, Bénédict de Saussure, qui poursuit l’affaire. Saussure est le frère d’Hermine, la compagne de navigation d’Ella Maillart. En 1933, le prestigieux carrossier suisse Georges Gangloff relance le projet avec son gendre Louis Plojoux. Le lancement du Jackie II en 1939 fut un événement. C’est le plus grand yacht à moteur privé de Suisse. Cette splendeur nautique de 20 mètres de long a bénéficié des plans du Suédois Knud Reimers, l’un des plus importants concepteurs de yachts scandinaves du XXe siècle.

Deux guerres se succèdent sans que le chantier naval de Corsier-Port ne disparaisse. Luc Plojoux, fils de Louis, prend la relève jusqu’en 1995. C’est lui qui met en place, sur le modèle américain, le service du port sec avec mise à l’eau à la demande des propriétaires de pirogues. Les auditeurs du concert folk irlandais donné le 8 février dans le cadre du festival Antigel ont admiré les précieux bateaux entreposés sous la salle dédiée à ce service particulier.

A l’aube des années 2000, c’est au tour de Thierry Plojoux, petit-fils de Louis, de relancer l’entreprise, avec l’aide de Serge Patry. Ensemble, ils créent la fondation MJVP1909, qui possède aujourd’hui sept canaux à moteur historiques (le plus ancien est « Ida »), autant de voiliers (le plus ancien date de 1923) et trois barges.

MJVP1909 ne s’intéresse pas seulement au patrimoine nautique. Car d’autres productions de l’industrie genevoise comme les automobiles Pic-Pic ou les motos de la marque Motosacoche des frères Dufaux faisaient appel au même savoir-faire que la fabrication de bateaux. Ces véhicules sont donc présents autour du canoë « Ida » à Palexpo et augurent de la parution prochaine d’un nouvel ouvrage édité par la fondation : « Le Siècle des Dufaux » (voir ci-contre).

Swiss Retro Mecanika, expositions « Véhicules genevois, fabrication et institutions » et « 80 ans du Débarquement », les 27 et 28 avril à Palexpo. retromecanika.ch

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