l’un avec la société civile, l’autre avec les fidèles catholiques

l’un avec la société civile, l’autre avec les fidèles catholiques
l’un avec la société civile, l’autre avec les fidèles catholiques

Un voyage du Pape, c’est d’abord cela : des gestes, des paroles, une main qu’il prend dans la sienne, une tête baissée qui écoute. François est avant tout un curé, un « curé », et on sent qu’il apprécie ces moments d’échanges simples et spontanés. Ce fut le cas en présence de deux familles réfugiées, à l’accueil Saint-Joseph, rue Haute, tenu par les « Petites Sœurs des Pauvres », lors de ses bains de foule ou encore auprès des 5 500 jeunes qui, samedi soir, ont participé au festival Hope Happening au Heysel.

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Il y avait toujours un “mais”

Mais le premier motif du voyage du pape en Belgique (qui a débuté jeudi au Grand-Duché de Luxembourg) était bien plus formel. L’occasion trouvée pour lui faire visiter le pays fut le 600ème anniversaire de l’Université de Louvain. Par l’intermédiaire de l’UCLouvain et de la KULeuven, suite à sa réception au Château de Laeken où il a été accueilli vendredi matin par le Roi et Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD), c’est donc toute la société civile et de Belgique qu’il est venu saluer.

À chacune de ces rencontres institutionnelles, François a été bien accueilli. Mais… il y avait toujours un « mais ». Un rappel explicite que le Pape n’avançait pas en territoire conquis, que la société avait changé, que les positions de l’Église étaient remises en question. Cela n’a pas manqué de surprendre la presse internationale habituée aux voyages papaux. Certains de ces journalistes, qui pensaient mettre les pieds au pays du consensus, ont été marqués par la volonté, notamment universitaire, de se démarquer de l’institution ecclésiale. Ce fut le cas vendredi à la KULeuven et, surtout, samedi, à Louvain-la-Neuve.

La place des femmes

Cet après-midi-là, au cours d’une très belle et minutieuse cérémonie, la décision de l’UCLouvain fut d’interpeller explicitement le Pape, notamment sur la place des femmes. Une lettre, fruit d’une longue réflexion menée au sein de l’université, a d’abord été lue au Pape. Ce texte, basé sur l’encyclique écologique de François, Laudato Sia remercié le souverain pour sa contribution sur les questions de transition, avant de l’interroger. “Cher Pape François, la place de la femme, où la trouve-t-on dans l’Encyclique ? Les femmes sont largement absentes de Laudato si’.» L’UCLouvain a également interrogé François sur le «théologie des femmesOMS “exalte leur rôle maternel tout en leur interdisant l’accès aux ministères ordonnés. Quelle place alors pour les femmes dans l’Église ? « Les femmes sont devenues invisibles »a conclu l’université.

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A Louvain comme à Louvain, le Pape a écouté et remercié les universités pour ces questions. En bon jésuite, champion de l’introspection, il ne répondait cependant pas directement aux questions franches. Au cœur de ses interventions, il préférait interroger ses auditeurs sur le sens profond qu’ils accordaient à leurs études, la manière relationnelle dont ils vivaient leur cursus et leur conception de la vérité. Si nous voulons y aller “à la Source du problème”, il faut y aller »au coeur de l’homme”, invita François.

Un communiqué historique

A Louvain, son discours sur les femmes a cependant été mal accueilli par les étudiants et les autorités universitaires. Le Pape a évoqué une conception classique de la femme dans l’anthropologie catholique, sans toujours argumenter les prémisses de son discours (comme si les étudiants connaissaient l’anthropologie chrétienne). “Ce qui caractérise les femmes, ce qui est féminin, n’est pas déterminé par le consensus ou les idéologiesa-t-il souligné. Et la dignité est garantie par une loi originelle, non écrite sur papier, mais dans la chair. » La dignité de la femme est absolue car elle «est au cœur de l’événement salvateur. C’est par le « oui » de Marie que Dieu lui-même vient au monde. La femme est accueil fécond, soin, dévouement vital.

Deux mondes, deux conceptions antagonistes de la nature humaine se font alors face sans se rencontrer.

A l’issue de l’échange, le Pape a néanmoins été longuement ovationné et a bénéficié d’une ovation debout. Mais alors que la calotte lui a été remise et qu’il a été applaudi par 4 000 personnes rassemblées à l’extérieur, l’université a distribué aux journalistes, en personne, un communiqué dans lequel la rectrice, Françoise Smets, condamnait les propos de François, évoquant son «désapprobation”un “divergence majeure »un “incompréhension”. La position du Pape est la suivante : «déterministe et réducteur »a noté le communiqué de presse. “L’UCLouvain ne peut qu’exprimer son désaccord.

Le geste n’a pas manqué de surprendre et marquera l’histoire de l’université catholique. Noir sur blanc, à la minute des applaudissements, l’université a pris ses distances avec l’institution. Dimanche d’ailleurs, alors qu’il était interrogé dans son avion de retour sur cette publication rapide du communiqué, le pape a regretté qu’il ait été écrit «pendant qu’il parlait »ajoutant qu’il avait été “préparé” (ou “préfabriqué” selon les traductions du mot «préfabriqué » utilisé par le Pape). “Ce n’est pas moral.dit-il.

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La question de l’avortement

Cette rencontre, qui restera comme un rendez-vous manqué entre deux institutions proches, a plongé l’après-midi dans une tonalité mitigée. D’autant que, quelques heures plus tôt, le Vatican avait publié le contenu d’une rencontre privée avec le Roi, dans la crypte de Laeken. Là, le pape a réfléchi en silence devant le tombeau du roi Baudouin, avant de saluer son courage lorsqu’il a choisi de «quitter son poste de Roi pour ne pas signer une loi meurtrière » (“meurtrier” en italien). Le mot faisait polémique, comme celui utilisé le lendemain dans l’avion pour Rome lorsqu’il décrivait «tueurs à gages » médecins pratiquant des avortements.

Dans un communiqué de presse, le Palais a précisé que le Roi et la Reine « a accompagné SS le Pape ce matin pour un moment de contemplation dans la Crypte Royale. Cette visite impromptue, à la demande du Pape, ne faisait pas partie du programme officiel de sa visite en Belgique et avait un caractère strictement privé. Le Roi et la Reine étaient présents par courtoisie envers le Souverain Pontife.

Ces propos sur l’avortement, certes, ne sont pas nouveaux pour le pape François, mais ils ont interpellé une partie de la scène médiatique et politique et ravivé de nombreux malentendus entre la société belge et Rome. Ils ont marqué la fin du voyage et témoignent à leur manière de la personnalité d’un Pape qui aime mettre le pied dans la porte des débats, avant de la retirer. “L’étonnement est le début de la philosophie”» a-t-il déclaré dans l’avion, faisant référence à la réaction des Belges à ses propos.

Le courage de changer

Le deuxième voyage du Pape sur le sol belge s’est joué au sein du peuple catholique. Et c’était très différent.

Les deux moments les plus forts et les plus attendus ont été sa rencontre, samedi matin à Koekelberg, avec les prêtres, diacres, religieux, séminaristes, acteurs pastoraux de l’Église. Puis messe, dimanche, devant près de 40.000 personnes au stade Roi Baudouin à Bruxelles.

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Dans la basilique nationale Art déco bondée, samedi matin, l’ambiance était chaleureuse, presque familiale, et bénéfique pour une Église qui doute parfois d’elle-même et de sa place dans un monde sécularisé et pluriel. Le Pape a proposé aux catholiques une réflexion assez générale, tout en invitant l’Église à un profond renouveau. “Nous sommes passés d’un christianisme établi dans un cadre social accueillant à un christianisme de « minorité » ou plutôt de témoignage. Cela nécessite le courage d’une conversion ecclésiale pour initier des transformations pastorales qui touchent aussi les coutumes, les modèles, les langages de foi pour qu’ils soient véritablement au service de l’évangélisation. « Ce courage est aussi exigé des prêtres. Être des prêtres qui ne se contentent pas de conserver ou de gérer un héritage du passé, mais des pasteurs amoureux de Jésus-Christ. « La communauté des croyants n’est pas un cercle de privilégiés, mais une communauté de sauvés. [par Dieu]»a souligné le pape dimanche matin au Stade Roi Baudouin, encourageant un très large accueil.

Au-delà de ces mots, plusieurs fidèles ont évoqué la joie de ces retrouvailles autour du Pape et ce que le voyage avait suscité : «Il a fallu parler ensemble, avec franchise, et tisser de nouveaux liens. C’était très riche »témoigne un bénévole. Le deuxième voyage du Pape, auprès des catholiques belges, fut donc un succès. “Tout le défi, pour les paroisses, est de faire en sorte que ce grand enthousiasme ne s’éteigne pas.» ajoute un couple bruxellois.

 
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