La marque de luxe Chanel vend des pièces produites par… France Travail

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“Je trouve ça inacceptable, c’est du travail caché.” Avec ces mots, Sylvie*, 55 ans, ne s’emporte pas. Le 20 avril 2023, elle participe à une réunion d’information organisée par l’agence Pôle emploi à Millau (Aveyron). Formation en maroquinerie chez le gantier Causse leur a été présenté, via le dispositif AFPR (Action de formation pré-recrutement), financé par France Travail (anciennement Pôle emploi). La manufacture est spécialisée dans les gants, et s’est lancée dans la petite maroquinerie en 2016, après avoir été acheté par Chanel en 2012. Une formation qui enchante Isabelle*, 52 ans, une de ses futures collègues, pour qui travailler chez Chanel est « un rêve d’enfant ».

Seulement, comme le révèle Mediapart, même si un CDD est promis par Causse à l’arrivée, les deux femmes seront expulsées de l’entraînement, à trois jours de la fin. Au début de leur formation, Sylvie, Isabelle et six autres personnes se sont lancées dans l’apprentissage des gestes professionnels sur des éprouvettes pour Chanel. Une fois les premiers tests passés et quatre stagiaires évincés, les choses changent. « On nous dit : « Êtes-vous prêt ? Nous travaillerons avec du cuir et des pièces réelles, et si elles sont correctes, ça va en vente»», se souvient Isabelle auprès de nos confrères. Des déclarations confirmées par la marque de luxe : « Si l’article fabriqué répond à tous nos critères d’excellence, et dans ce cas seulement, il peut être commercialisé. »

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Des droits épuisés et un salaire à peine supérieur à leur production

A partir de ce moment, les quatre stagiaires restants se sont posés des questions sur cette méthode douteuse. « La personne en formation, en situation précaire, attend le contrat de travail, dans un rapport de subordination avec l’employeur, et de fait, fonctionnera gratuitement», témoigne Guillaume Bourdic, élu CGT à France Travail. Quoi qu’il en soit, tout le monde continue à s’entraîner. Une fois cette opération terminée, les survivants enchaînent trois semaines de « tutorat interne », destiné à “Vois si tu suivre le rythme de production», selon Sylvie. Une soixantaine de porte-cartes doivent être produits chaque semaine. Mais le rythme est difficile à suivre, et les deux collègues le reconnaissent : ils en produisent soixante-cinq en trois semainescontre quatre-vingt-quinze pour les deux autres personnes.

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Trois jours avant la fin du dispositif, Sylvie et Isabelle sont convoquées au service des ressources humaines : ils n’auront pas de contrat. Le problème étant que, durant les trois mois de formation, Isabelle a épuisé ses droits chômage, qui continuaient à être déduits pendant son stage. Sylvie était payée 723 euros par mois par France Travail, n’a pas droit aux allocations de chômage. Son salaire était à peine supérieur au prix unitaire des titulaires de cartes qu’elle produisait : 660 euros. Chanel assure toutefois à Mediapart avoir maintenu une cinquantaine de personnes dans l’atelier de montage depuis le début de l’AFPR, il y a cinq ans. Soit « 94 % de personnes formées », selon leurs calculs. Un chiffre qui serait plutôt biaisé, puisqu’il impliquerait que cinquante-trois personnes au total ont participé à la formation, et que seulement trois d’entre elles n’ont pas été retenues. Or, « rien que sur la promotion de mai 2023, six stagiaires ont été licenciés avant d’obtenir un contrat ».

*Les prénoms ont été modifiés.

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