Selon Albert Roesti, « les juges ne peuvent pas passer outre une décision du peuple »

« Les juges ne peuvent pas passer outre une décision du peuple »

Publié aujourd’hui à 19h46

La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la Suisse parce qu’elle lutte trop peu contre le réchauffement climatique. Monsieur Rösti, quelle a été votre première réaction lorsque vous en avez entendu parler ?

Je pensais que les juges n’avaient probablement pas compris l’importance de la dernière décision populaire à ce sujet. La population a approuvé à une nette majorité la loi sur la protection du climat fixant l’objectif de réduire à zéro les émissions de CO₂ d’ici 2050. Le mandat est clair.

Le tribunal critique le fait que la Suisse n’ait pas pris suffisamment de mesures pour atteindre cet objectif.

La loi climat prévoit 3,2 milliards de francs pour remplacer les systèmes de chauffage et lancer des projets innovants. Ce sont des mesures concrètes. À cela s’ajoute la nouvelle loi sur le CO₂. Cet arrêt signifie que nous devons expliquer au Conseil de l’Europe quelles mesures nous avons prises. Je pense que nous n’avons rien à craindre à cet égard. Nous avons également la Loi sur l’électricité.

Votre parti exige désormais que la Suisse renonce à la Convention européenne des droits de l’homme et quitte le Conseil de l’Europe. Une bonne idée?

Je pense qu’il ne faut pas accorder trop d’importance à ce jugement en réagissant avec autant de force. Cependant, je me demande comment concilier deux éléments : une population qui prend ses décisions par démocratie directe et un tribunal international.

Vous soulignez que le peuple a approuvé l’objectif climatique 2050. Le tribunal exige que cette décision soit appliquée.

Le peuple a, une fois de plus, rejeté une loi plus restrictive sur le CO₂, y compris en matière de taxes. Cela illustre le problème des tribunaux internationaux. Les juges ne peuvent pas annuler une décision populaire.

Compte tenu des vagues de chaleur toujours croissantes, Elders for Climate Protection estime que le changement climatique met des vies en danger, en particulier celles des personnes âgées. Êtes-vous personnellement gêné par la chaleur ?

Non pas du tout. Je ne minimise pas les vagues de chaleur. Ils peuvent poser problème aux personnes ayant des problèmes de tension. Personnellement, je préfère avoir chaud que froid.

Nous voterons le 9 juin la loi sur l’électricité qui entend encourager les énergies renouvelables. Comment un oui pourrait-il contribuer à protéger le climat ?

Chaque kilowattheure issu d’énergie sans CO₂ remplace les sources fossiles qui représentent environ 60% du mix énergétique suisse. Bien entendu, une loi ne peut à elle seule changer le climat ; cela nécessite une coopération mondiale. Pour moi, la priorité est ailleurs. La loi sur l’électricité réduit considérablement le risque de pénurie d’électricité, qui existe toujours.

Dans combien de temps aurons-nous suffisamment d’électricité en hiver ?

En hiver, nous consommons 6 térawattheures d’électricité supplémentaires, ce qui correspond à environ 10% de la production annuelle en Suisse. Si nous parvenons à développer suffisamment d’électricité hydroélectrique, solaire et éolienne, nous serons mieux protégés. Mais je ne me fais aucune illusion, il faudra sans doute attendre une quinzaine d’années pour que de telles installations soient construites.

Si la loi sur l’électricité est acceptée, les projets peuvent encore être combattus. Faut-il limiter le droit de recours ?

Non, ce serait un mauvais réflexe. En revanche, nous œuvrerons, après le vote du 9 juin, à réduire la durée globale des procédures.

Les gens parlaient aussi du loup. Il a refusé les tirs préventifs. Cependant, des meutes sont massacrées. A vos yeux, la volonté populaire est-elle moins importante face au loup ?

Bien sûr que non. Cependant, entre le vote populaire et mon ordonnance, la loi a été révisée – avec de nouvelles réglementations concernant les loups. Il n’y a pas eu de référendum contre cette révision.

Une autre conviction nous pèse en face. Le bureau de la Convention de Berne, l’accord sur la protection des espèces du Conseil de l’Europe, a déposé une plainte contre la Suisse à ce sujet. Vous avez jusqu’à l’automne pour justifier votre démarche. La Suisse a-t-elle violé la convention ?

Non. Nous attachons une grande importance à la protection des espèces. Seuls les packs problématiques sont éliminés et un nombre minimum de douze packs sera maintenu. Et nous n’avons jamais dit qu’il fallait éliminer 70 % des packs. C’est toujours mal écrit.

Charlotte Walser fait partie de la rédaction du Palais fédéral chez Tamedia depuis 2021. Docteur en philosophie, elle travaille comme journaliste depuis 1995. De 2010 à 2020, elle a été correspondante au Palais fédéral pour l’agence de presse Keystone-SDA. Elle a également travaillé pour InfoSud et l’agence des Nations Unies pour les réfugiés, le HCR.Plus d’informations

Stefan Hané est journaliste à la section suisse de Tamedia à Zurich. Il écrit des enquêtes sur l’actualité politique nationale. Plus d’informations

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