Les promesses non tenues de notre système de santé

Les promesses non tenues de notre système de santé
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Au Québec, nous payons très cher un système de santé universel. Mais l’accès aux soins est si mauvais que cela ressemble parfois à un déni de service.


Publié à 1h55

Mis à jour à 5h00

En attendant un médecin de famille depuis des années, les patients se retrouvent dans une situation critique.

Est-il normal qu’une femme de 61 ans se demande si le cancer de l’ovaire avancé qui lui a été diagnostiqué après une visite aux urgences aurait pu être traité plus tôt si elle avait eu un médecin de famille ?

Est-il normal qu’une jeune étudiante aux prises avec de graves problèmes de santé mentale soit référée par son CLSC à un psychiatre privé qui facture plus de 1 000 $ rien que pour la première consultation ?

Non ! Ces cas bien réels sont la preuve flagrante que notre système de santé ne tient pas ses promesses.

Mardi dernier, le député libéral André Fortin a démontré, en commission parlementaire plénière, l’impossibilité pour un simple citoyen d’obtenir un rendez-vous en utilisant les mécanismes développés par la Coalition Avenir Québec (CAQ).

Sur rendez-vous Santé Québec? Il n’a trouvé aucune place disponible. Avec le Guichet d’Accès de Première Ligne (GAP) ? Rien non plus. Et sur Clic Santé ? Les patients sont souvent orientés vers le secteur privé.

Christian Dubé a dû admettre que « ça arrive régulièrement1 « .

Mais en voulant vaincre le ministre de la Santé, le député libéral s’est retrouvé à faire une passe à la palette de Christian Dubé qui mène des négociations houleuses avec la Fédération des médecins généralistes du Québec (FMOQ) au sujet des échecs du GAP.

Créé il y a deux ans, le GAP a permis à plus de 900 000 Québécois d’avoir accès à un Regroupement de médecins de famille (GMF).

Avec cette belle innovation, la CAQ abandonne sa promesse irréaliste d’offrir un médecin de famille à tous les Québécois, pour leur offrir plutôt des soins provenant d’un groupe multidisciplinaire. Parfait ! De nombreux problèmes de santé peuvent être résolus par un autre professionnel afin de permettre aux médecins de se concentrer sur des tâches à valeur ajoutée.

Dans le cadre de l’entente avec la FMOQ, Québec s’est engagé à verser au GMF 120 $ par année par patient inscrit, en plus de la rémunération habituelle des médecins. Cet accord devait être la première étape vers une réforme plus large de la rémunération des médecins.

Au lieu d’un paiement à l’acte qui est horriblement complexe, il serait plus simple de s’appuyer sur la « capitation » comme en Ontario, c’est-à-dire une rémunération basée sur le nombre de patients traités.2.

Mais le gouvernement doit encore être en mesure de garantir que les médecins fournissent effectivement des services, sans rogner sur les coûts. Et c’est là que ça colle.

Au gouvernement, on estime que la moitié des patients inscrits dans les GMF grâce au GAP n’ont pas vu de médecin depuis deux ans. Le nombre de consultations est resté stable au Québec, à environ 1,5 million par mois.

La question se pose : en avons-nous pour notre argent ? On parle de 100 millions par an.

Indigné, le syndicat des médecins généralistes a répondu que l’accord était respecté. Que les patients étaient vus par des infirmières et d’autres experts embauchés par le GMF. Et qu’ils seront obligés de les licencier si le ministre arrête le financement le 31 mai, comme il l’a annoncé.

«Si le ministre coupe l’interrupteur, il pourrait faire noir», affirme le président de la FMOQ, Dr Marc-André Amyot.

Il n’en demeure pas moins que le gouvernement a raison d’exiger des résultats. Le Vérificateur général a démontré à plusieurs reprises dans le passé que le gouvernement avait offert des primes aux médecins pour les inciter à suivre davantage de patients, sans obtenir les résultats escomptés.

Pour éviter de répéter ce mauvais film, le ministre Christian Dubé a adopté, au grand désarroi de la FMOQ, le projet de loi 11 qui lui donnera bientôt les données pour mesurer les résultats.

En attendant, le bras de fer continue.

Mais au-delà de cette guerre des rémunérations, le ministre se bat contre un ennemi implacable : la démographie.

Les actions qu’elle met en place, aussi utiles soient-elles, n’aboutiront peut-être pas à une amélioration significative car le vieillissement de la population accroît la tâche des médecins qui sont, par ailleurs, de plus en plus nombreux à prendre leur retraite… et à se rendre le secteur privé.

Par ailleurs, l’an dernier, le nombre de médecins de famille dans le réseau public a diminué, pour la première fois depuis plus de 20 ans, malgré la hausse des inscriptions dans les facultés de médecine.

Il est donc urgent de trouver des solutions pour permettre aux médecins de famille de faire face au tsunami gris. En voici trois :

  • Réduisez la paperasse qui accapare un quart de leur emploi du temps.
  • Utilisez davantage la télémédecine : tant de problèmes mineurs peuvent être résolus par téléphone et par courrier électronique, ce qui serait plus productif pour tout le monde.
  • Tirer parti d’autres professionnels, comme les infirmières praticiennes spécialisées (IPS) qui pourront s’occuper des patients de première ligne… ce qui fait grincer des dents la FMOQ, car les médecins perdront leur prime de supervision.

Si l’on veut avancer, il faut laisser le corporatisme aux vestiaires.

1. Lire « Le PLQ embarrasse Christian Dubé »

2. Lire « Rémunérons les médecins différemment »

 
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