« A moins de vivre dans une bulle, c’est compliqué »

« A moins de vivre dans une bulle, c’est compliqué »
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« J’ai toujours en tête l’espoir de revenir comme avant… ». A 44 ans, Jihane ne jette pas l’éponge dans son combat contre sa maladie, la myasthénie grave, un trouble de la jonction neuromusculaire. Mais le combat est difficile : “J’ai tous les symptômes, des problèmes de déglutition, des difficultés respiratoires, toutes les activités quotidiennes deviennent compliquées”explique cette mère de famille, fonctionnaire dans un bureau d’études du ministère de l’Intérieur.

“J’ai vu mon œil tomber dans un miroir”

C’est en 2019 que les premiers signes de myasthénie sont apparus chez elle. “Je venais d’accoucher et pendant que je faisais des exercices physiques, j’ai vu dans un miroir mon œil tomber, mon visage complètement déformé… Comme j’étais une nouvelle maman, je l’attribuais à la fatigue mais deux jours plus tard, c’est revenu. »

Elle envoie ensuite une photo à un membre de la famille qui est ophtalmologiste avec un message concis : “J’ai un mauvais visage, regarde et dis-moi ce que tu en penses.” Réponse du professionnel de santé : “J’ai l’impression que c’est une myasthénie grave, je t’enverrai une ordonnance tout de suite pour que tu puisses aller à l’hôpital.”

Le test du glaçon pour diagnostiquer la myasthénie grave

Et là, les médecins font le test du glaçon sur Jihane. Une pratique qui consiste à mettre l’œil en contact avec le froid. S’il augmente, cela signifie à 95 % que nous sommes en présence de myasthénie grave, une maladie auto-immune dont la forme oculaire est en fait l’une des premières manifestations. Et le test est positif. Elle a alors été orientée vers un neurologue mais avant de consulter, elle a découvert cette maladie. “La myasthénie n’est pas forcément présentée comme quelque chose de très grave, j’ai lu qu’elle était gérable, qu’on pouvait vivre avec sans problème, mais on ne dit pas toujours que cela peut entraîner une détresse respiratoire mortelle !”

Alors que la jeune maman, hormis les changements visibles sur son visage, ne remarque encore aucun « de grosses conséquences » sur sa vie quotidienne, le spécialiste confirme le diagnostic et prescrit d’autres examens neurologiques. « Ces explorations ont montré qu’il n’y avait aucune répercussion sur les muscles de mes bras et de mes jambes et après ces résultats, j’ai eu le sentiment de ne pas être prise au sérieux… ». Mais après un scanner thoracique, le verdict tombe, plus inquiétant cette fois : “On m’a dit que j’avais une masse thymique (tumeur non cancéreuse du thymus, une glande située dans la partie supérieure de la poitrine), souvent diagnostiquée en association avec une myasthénie grave.”

“J’ai réalisé que la myasthénie grave n’était pas connue du tout”

Chirurgie, radiothérapie, soins plus sérieux ont suivi pour Jihane en pleine pandémie de Covid-19. “Après ces interventions, je suis resté enfermé chez moi comme tout le monde pendant plusieurs semaines puis j’ai repris le travail… et en avril 2021, j’ai été contaminé par le virus… ça a été le début de l’enfer !”

« Comme beaucoup d’autres patients, j’avais des difficultés à respirer. Mais j’étais vraiment très essoufflé, je sentais un poids énorme sur ma poitrine. Jihane est admise pour la première fois aux urgences où elle est placée en soins intensifs sous oxygène. Suite à de nouvelles crises, elle se retrouve encore trois fois dans la même situation. “Je suis allé dans deux hôpitaux différents et à chaque fois j’ai été renvoyé chez moi… c’est à ce moment-là que j’ai réalisé que la myasthénie grave n’était pas connue du tout.”

Les traitements de la myasthénie grave agissent sur la connexion entre les nerfs et les muscles

Mais surtout, ces épisodes « covid » font que la maladie de Jihane devient incontrôlable. « Comme j’étais traité par immunosuppresseurs, j’étais ultra-sensible à toutes les infections. Avec ma petite-fille de deux ans, j’attrape tout ce qui traîne mais trois fois plus compliqué ! Une rhinopharyngite m’assomme, je suis régulièrement en arrêt maladie… »

Après plusieurs essais de traitements de base –« À chaque nouveau médicament, je me disais ‘ça va s’améliorer’, mais en fait, ça ne s’améliorait pas… »– Jihane est traité à la pyridostigmine, une molécule qui agit sur la connexion entre les nerfs et les muscles, et aux corticoïdes. « Cela me permet de tenir le coup, mais malgré tout je vis désormais au ralenti, il ne se passe pas un mois sans que je doive prendre un arrêt maladie, rien que depuis décembre 2023, j’ai déjà dû interrompre trois fois mon activité professionnelle »elle dit.

Myasthénie grave, une maladie caractérisée par des convulsions

De toute évidence, les conséquences de sa maladie ont commencé à avoir un impact significatif sur sa vie. « Certains matins je me prépare et, quand j’arrive à la porte de ma maison, je ne peux plus respirer… Et il y a la fatigue, j’ai découvert ce que c’est que pleurer de fatigue ! En plus, pour mon entourage, c’est difficile, mon conjoint et ma fille ne comprennent pas quand ils me voient avoir du mal à monter un escalier alors que la veille je n’avais aucun problème. Difficile également de concilier un état de santé aussi incertain et une vie professionnelle : “Au travail, ils voient que je suis normal quand ça va bien et ils s’interrogent sur mes absences brutales, je commence à être exclu de certains dossiers que je suivais.”

La myasthénie grave se caractérise en effet par des crises. « Les alertes sont toujours les mêmes, problèmes de déglutition et de respiration, mais il y a autant de signaux que de formes de myasthénie grave, chacun vit sa maladie différemment, certains patients sont en fauteuil roulant tandis que d’autres vivent presque normalement. Mais il suffit d’un petit rien pour que ça les fasse tomber. Avec cette maladie, à moins de vivre dans une bulle, c’est compliqué… »

 
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