Harcèlement sexuel. Pourquoi ce chef d’entreprise est-il revenu devant le tribunal de Cahors ? – .

Harcèlement sexuel. Pourquoi ce chef d’entreprise est-il revenu devant le tribunal de Cahors ? – .
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Par Jean-Claude Bonnemère
Publié le

17 avril 24 à 8h14

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Claude (prénom modifié), directeur d’une entreprise située non loin de Cahorsa été poursuivi pour la première fois avant Cour criminellePour « harcèlement sexuel et moral » le 13 octobre 2022. S’en est suivi un premier jugement qui a donné lieu à une demande de renseignements complémentaires, conduisant à une nouvelle comparution du prévenu le 22 février 2024.

Le juge Philippe Clarissou préside l’audience. Il n’entend pas répéter le procès, mais s’en tenir aux éléments nouveaux que ces informations complémentaires seraient susceptibles d’apporter.

Rappel de la situation : Mmoi D. se dit victime de harcèlement moral et sexuel, suite à des propos et gestes à connotation sexuelle ou sexiste qu’elle aurait subis de la part de Claude. Elle soutient que lui, toujours tactile à son égard, aurait posé ses mains sur différentes parties de son corps, et ce à plusieurs reprises, alors même qu’elle avait manifesté son opposition à un tel comportement. Claude aurait-il abusé de sa position de supérieur pour tenter d’obtenir des faveurs à caractère sexuel ? Des propos que Claude aurait tenus pendant la pause-café sont rapportés : “Ce n’est pas le café que je veux, c’est toi”. Mmoi D. précise que ce genre de propos répétés lui mettait une boule au ventre et lui donnait envie de vomir. Elle indique que Claude a réussi à réaliser de tels actes à l’abri des regards. Me François Faugère, avocat de Mmoi D. ouvre le feu.

Un comportement qui constitue du harcèlement sexuel ?

– « Aujourd’hui les masques vont tomber ! » prévient Me François Faugère. L’ancien président parle d’hypocrisie, de déloyauté, de supercherie, de fourberie, pour mettre en lumière la situation qui touche M.moi D., au sujet du comportement que ce chef d’entreprise aurait eu à l’égard de son client. Mmoi D. a fini par accepter un départ de l’entreprise, dans le cadre d’une rupture conventionnelle de contrat, « même à son désavantage, car elle ne supportait plus son patron ». Me Faugère critique l’enquête menée par les gendarmes dans le cadre de ces informations complémentaires : « imprécise et incomplète ». Il regrette que certaines questions n’aient pas été réalisées auprès des salariés qui ont quitté l’entreprise, en raison du turnover élevé constaté dans cette entreprise. Par ailleurs, il réfute l’argument qui avait été avancé à l’encontre de sa cliente, faisant valoir un côté procédural qui la caractériserait, dans la mesure où elle avait déjà assigné un précédent employeur devant les prud’hommes. « C’était un tout autre sujet qui n’a rien à voir avec le harcèlement ; des heures de travail non payées ! » il assure.

L’avocat se lance désormais dans un portrait au vitriol de Claude : “un homme dur et dictatorial, dont la promotion à la direction de l’entreprise lui aurait monté à la tête”, selon l’un de ses proches collaborateurs. Il parle d’être « lourd » avec les femmes et il nie que sa boîte mail soit librement accessible au personnel ; “c’est lui qui envoyait les mails “mon chéri, bisou…” à Mmoi D. Il poursuit en rapportant que Claude, « c’était le patron qui aimait que les femmes viennent s’asseoir à côté de lui, il se faisait apporter du café… » Il voulait maintenir la culture du baiser avec les femmes, semblable à celle qui est courante dans son pays d’origine. L’avocat proteste : “Il peut embrasser qui il veut, mais pas Mmoi D. qui n’en veut pas ! »

Selon Me Faugère, l’insistance de Claude dans ses relations avec Mmoi D. constitue la démonstration d’une attitude sexuelle anormale envers Mmoi D. Il termine : « Le jour où Mmoi D. pleurait dans son bureau, ce n’était pas parce qu’elle avait fait quelque chose de mal, c’était parce qu’elle venait de subir de nouvelles attaques de Claude, des propos et des gestes désobligeants. »

Mmoi Brigitte Lanfranchi, magistrat honoraire, suppléante générale, indique d’emblée la difficulté de démontrer le délit de harcèlement sexuel. Elle observe que l’accusé n’admet pas avoir tenu certains propos dénoncés et que personne d’autre que M.moi D. n’aurait pas entendu. Et ceux qui pourraient lui être reprochés pour leur caractère intimidant, offensant ou sexiste se sont-ils répétés, s’interroge-t-elle ? Plusieurs critères doivent être réunis pour que le harcèlement sexuel soit caractérisé. Dans le cas de Claude, la magistrate semble hésitante, même si elle considère le fait que Mmoi D. a vécu douloureusement certaines situations. « Ce n’est pas parce que les gens se comportent de manière maladroite que cela sera qualifié de harcèlement sexuel ! » dit Mmoi Lanfranchi. Et elle prévient : « Attention à ne pas amalgamer les comportements inappropriés, qui ne rentrent pas forcément dans la catégorie des agressions sexuelles ! » Toute personne qui se livre à des actes ou à des propos inappropriés doit avoir à l’esprit la volonté d’obtenir des faveurs à caractère sexuel, afin que le harcèlement sexuel puisse être envisagé. Le magistrat n’énumère pas de faits précis susceptibles d’aboutir à une condamnation. Elle indique cependant que les associations de paroles et de gestes de Claude ont conduit à une relation intime à caractère sexuel ; ” Mmoi D. l’a compris ainsi et elle avait raison de l’entendre ainsi ! » estimations Mmoi Lanfranchi. Elle continue :

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– « Dans la relation employeur-employé, il y a des limites à ne pas dépasser et Claude a introduit le langage sexuel ». Elle nécessite une condamnation, aggravée par le fait que le prévenu avait de l’autorité sur son employé. Quant à la peine, le magistrat recommande 6 mois de prison avec sursis, plus une formation de sensibilisation à la lutte contre les comportements sexistes, ouvrant même une éventuelle inscription au dossier des délinquants sexuels.

Pourquoi le délit de harcèlement sexuel ne tient-il pas la route, selon la défense ?

Pour Me Marc Borten, défenseur de Claude, à ses yeux, « rien de bouleversant », bien au contraire. “Sur les 22 personnes interrogées, aucune n’a été témoin direct de harcèlement moral ou sexuel, personne qui n’accablera Claude” dit l’avocat. Quant aux deux personnes qui témoignent contre Claude, il semble qu’ils aient vécu en couple à un moment donné. Et l’avocat fait valoir qu’en ce qui concerne la compagne du salarié, la jalousie aurait pris le dessus en lui par rapport à Claude, car la promotion a été accordée à Claude et non à lui. Me Borten démonte, pièce par pièce, les différents mécanismes qui ont conduit à l’accusation de son client. Selon l’avocat, le malaise ressenti par Mmoi D., selon lui, est préoccupé par le drame survenu dans sa famille, « car il n’existe aucun élément objectif qui permettrait d’établir la culpabilité de Claude ». Et il ajoute : « Ce n’est pas parce que M.moi D. ne pouvait pas tolérer certaines situations de harcèlement sexuel ; certainement le sentiment de Mmoi D. est aussi légitime que celui d’un autre, sans faire de Claude un harceleur, le tribunal ne peut pas franchir cette démarche ! ». Me Borten estime que la situation relève davantage du juge des prud’hommes, qui peut apprécier si le comportement managérial de Claude aurait pu conduire à une dégradation de l’état de santé de Mme.moi D. Rien de plus !

Le jugement a été mis en délibéré et sera rendu 25 avril 2024.

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