Berne sabote une idée francophone pour faire des économies

Berne sabote une idée francophone pour faire des économies
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Préparation de médicaments.image : Raphaël Hünerfauth/THE

Le canton de Fribourg a réussi à réduire considérablement les dépenses en médicaments dans les maisons de retraite. Mais un amendement fédéral a tout gâché.

Maja Briner / ch médias

Un modèle qui a fonctionné et permis des économies dans le secteur de la santé est enterré au moment même où la population en a le plus besoin. Une intervention visant à le faire revivre échoue de peu. De qui est-ce la faute? Dans le centre? Nous voterons en juin sur l’initiative lancée par le parti de Gerhard Pfister, qui vise à ralentir la hausse des dépenses de santé ainsi que celle des primes d’assurance maladie.

Remontons quelques années en arrière pour comprendre cette histoire. En 2002, le canton de Fribourg a réussi à réduire les coûts des médicaments dans les maisons de retraite. Pour gagner en efficacité, les foyers étaient responsables de la gestion des médicaments destinés aux résidents. Par exemple, ils ont acheté un gros paquet d’analgésiques – qui serait utilisé par plusieurs personnes – au lieu de donner à chaque patient sa propre petite boîte.

Les frais ont été remboursés forfaitairement à hauteur de 5,50 francs par personne et par jour. Et ce système a encouragé les maisons de retraite à maintenir les coûts des médicaments à un niveau bas. Parallèlement, la prise en charge médicamenteuse des résidents a été régulièrement évaluée, impliquant notamment les pharmaciens.

Bon pour le patient et le portefeuille

Ce modèle a porté ses fruits, permettant au canton de Fribourg de maintenir les coûts des médicaments en EMS à un niveau inférieur à celui de tout autre canton. En 2016, elles s’élevaient à 4,80 francs par jour et par habitant. En comparaison, au niveau suisse, ils étaient de 8,55 francs. Donc pas loin du double. Selon les autorités fribourgeoises, des coûts estimés à 3,4 millions de francs par an pourraient ainsi être économisés.

Une goutte dans l’océan des coûts de santé, certes, mais une goutte d’eau quand même. Parallèlement, le modèle a permis d’améliorer la qualité des soins, selon la Direction fribourgeoise de la santé et des affaires sociales. Autrement dit, ce système était bon pour le patient et pour le portefeuille.

Fribourg résiste

D’autres cantons auraient pu copier ce modèle. Mais en 2018, une modification de la compensation des risques l’a fait tomber à l’eau. Depuis, les quantités de médicaments délivrées doivent être déclarées pour chaque assuré. Sauf qu’à Fribourg, on résiste.

Le canton souhaite conserver son modèle. À cette fin, il a déposé une initiative cantonale auprès de la Confédération bernoise demandant une modification des dispositions légales. Il espérait obtenir satisfaction. D’autant plus que le Conseil national a approuvé l’initiative. Mais le Conseil des Etats ne l’a pas vu de cette oreille. Il a rejeté l’initiative cantonale fribourgeoise lors de la session de printemps – par 21 voix contre 20.

“C’est une occasion manquée”, regrette la conseillère nationale Barbara Gysi (PS/SG). Le modèle a bien fonctionné pendant 15 ans, souligne-t-elle, il aurait pu être étendu à toute la Suisse. Le socialiste saint-gallois n’est pas d’accord avec le Centre :

« Ce cas est un cas d’école : les mesures concrètes de réduction des coûts échouent toujours, notamment à cause du Centre qui, avec son initiative populiste, se veut engagé dans la réduction des coûts »

Barbara Gysi (PS/SG)

Au Conseil national, le Centre a approuvé massivement l’initiative cantonale fribourgeoise aux côtés du PS et des Verts. Mais au Conseil des Etats, la moitié des députés centristes l’ont rejetée, ce qui a été décisif, car l’initiative a échoué.

Moins de deux semaines plus tard, le Centre soumettait un postulat sur la maîtrise des dépenses de santé – notamment en relançant le modèle fribourgeois.

“C’est absurde. Au lieu de laisser l’administration occupée à rédiger des rapports, nous devrions soutenir des mesures concrètes visant à réduire les coûts.»

Barbara Gysi

Un peu lunaire…

Obwalden Erich Ettlin fait partie des conseillers des Länder centraux qui se sont prononcés contre l’initiative cantonale. Il écarte les reproches du PS, qu’il juge infondés. “Personne ne doute de l’utilité du modèle fribourgeois, c’est la bonne voie.” Mais alors, pourquoi s’y être opposé lors du vote à la Chambre haute ? La réponse peut paraître un peu vague.

L’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a démontré que la mise en œuvre du modèle fribourgeois ne nécessitait aucune modification de la loi. Un «oui» à l’initiative cantonale n’aurait donc été que symbolique. “Donner simplement un signal n’aurait pas été cohérent”, justifie Erich Ettlin.

On peut se demander pourquoi le modèle fribourgeois n’a pas été relancé, alors qu’il serait tout à fait possible selon l’OFSP. Les partenaires tarifaires s’accusent mutuellement. Le hic, c’est que les directives d’indemnisation des risques doivent être respectées et que les assureurs-maladie ne veulent pas de charges administratives supplémentaires.

Erich Ettlin précise que le sujet sera traité, dans un premier temps, suite à une initiative parlementaire de la conseillère nationale fribourgeoise du Centre Marie-France Roth Pasquier. Cette question sera traitée en second lieu dans le deuxième paquet de mesures de maîtrise des coûts actuellement débattu au Parlement. Dans les deux cas, l’objectif est de permettre aux pharmaciens – comme dans le modèle fribourgeois – de facturer à l’assurance maladie obligatoire les consultations, même s’ils ne vendent pas de médicaments.

Pourquoi ce postulat est-il nécessaire ?

« Il s’agit de maintenir la pression pour que le sujet reste à l’ordre du jour »

Erich Ettlin (C/OB)

Il est donc fort possible que le modèle puisse un jour sortir de la naphtaline.

 
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