un nouveau paradigme à réguler

un nouveau paradigme à réguler
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Sociétés anonymes et service public : un mélange des genres qui brouille les frontières entre sphères publique et privée. Le recours croissant aux sociétés anonymes pour gérer les services publics soulève des questions juridiques complexes et des défis en termes de gouvernance et de responsabilité.

Derrière leur apparente neutralité, les entreprises de développement local cachent un double visage qui soulève de nombreuses questions. Rabat Patrimoine, Rabat Ville Verte, Casa Aménagement, Casa Events et Animation, Casa Transport, Harakiat Berkane, Fez Développement et Valorisation… Les sociétés locales de développement (SDL) se multiplient dans le Royaume. Settat, Rabat, Tétouan, Casablanca, Safi, Khouribga, Salé, Nador, Marrakech…

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Toutes les grandes villes passent désormais par eux, principalement pour la gestion des gares routières et des parkings. Mais ils gèrent également d’autres activités comme les zones industrielles, les abattoirs, les marchés de gros, les événements culturels et sportifs, l’éclairage public, les transports publics par bus, etc. À mesure que les formations SDL et les partenariats public-privé se multiplient, la frontière entre sphères publique et privée devient de plus en plus poreuse. .

Les sociétés anonymes, de droit privé, se voient ainsi fréquemment confier des missions de service public, soulevant des questions juridiques complexes. De plus en plus de défenseurs de l’intérêt général réclament une clarification de la situation. « Selon la jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour de cassation, deux critères sont pris en compte pour considérer que l’activité sociale d’une entreprise commerciale constitue un service public. », souligne Deryany Reda, avocat et expert en contentieux des affaires et en marchés publics.

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Le premier critère réside dans la nature même des missions confiées à l’entreprise. Comme l’explique l’avocat, « une société anonyme est considérée comme exerçant un service public lorsqu’elle exerce des tâches liées à la gestion d’un service public ». Cela peut concerner des domaines aussi variés que l’eau, l’énergie, les transports ou encore l’éducation. L’État délègue alors une partie de ses prérogatives à une entité privée, tout en conservant son rôle de régulateur et de garant de l’intérêt général.

Cependant, ce critère fonctionnel ne suffit pas à lui seul. « La combinaison de ces deux critères permet de qualifier l’exercice d’un service public par une entreprise commerciale », souligne notre intervenante. Le deuxième élément distinctif réside dans l’existence d’un lien contractuel exorbitant entre l’entreprise et une personne publique. Autrement dit, le contrat liant les deux parties doit comporter des « clauses exorbitantes de droit commun », c’est-à-dire des dispositions dérogatoires au droit privé, conférant des prérogatives particulières à la personne publique.

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Cette double condition jurisprudentielle soulève des défis en termes de gouvernance et de responsabilité. D’une part, les sociétés anonymes doivent respecter les règles de droit privé qui régissent leur fonctionnement, dans une logique de rentabilité économique. En revanche, ils se voient confier une mission d’intérêt général, avec les obligations et contraintes qui y sont liées. Un équilibre doit être trouvé entre les impératifs commerciaux et les exigences de service public.

En termes de responsabilité, la qualification de service public n’est pas anodine. En cas de faute, le régime de responsabilité applicable sera celui du droit administratif, plus protecteur pour les utilisateurs. Les sociétés anonymes peuvent être tenues responsables du défaut d’entretien normal, de l’enrichissement sans cause ou encore des voies de fait.

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La transparence et le contrôle deviennent donc essentiels. « Cette clarification juridique est indispensable pour définir les responsabilités et obligations des sociétés anonymes dans la fourniture de services publics, garantissant ainsi une meilleure gouvernance et transparence », insiste Me Reda. Des mécanismes de suivi et d’évaluation doivent être mis en place, impliquant les pouvoirs publics, les entreprises délégataires et la société civile.

En définitive, le recours croissant aux sociétés anonymes pour gérer les services publics reflète une profonde évolution de l’action publique, sous l’effet conjugué des contraintes budgétaires et des appels répétés à plus d’efficacité. Ainsi, un nouveau paradigme émerge, où secteur privé et intérêt général se rejoignent dans une logique de complémentarité et de gouvernance renouvelée. Mais en même temps, cela constitue un défi important pour le droit, tant sur le plan théorique que pratique.

 
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