Eurê. Après le lin, la filature française se lance dans le fil textile de chanvre

Par Coralie Maux-Renard
Publié le

8 avril 24 à 7h00

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Et si nous trouvions vêtements de chanvre dans les rayons de certaines marques de prêt-à-porter printemps-été 2025 ? C’est le projet un peu fou que l’entreprise a décidé de réaliser. Filature françaiseune filiale de la société NatUp.

La filiale produit déjà du fil de lin depuis son implantation à Saint-Martin-du-Tilleul, près de Bernay (Eure), en 2020. Cependant, le lin nécessite des conditions pédoclimatiques « assez exceptionnelles ».

Karim Behlouli, directeur général de NatUp fibres, vous explique les différentes étapes pour passer de la fibre au fil. ©Coralie Maux-Renard

« Penser qu’on pourra faire du lin partout est une utopie, il faut trouver des alternatives avoir plus de fibres », dit Karim Behloulile directeur général de NatUp fibres.

Le chanvre est celui choisi par la filature française pour avoir fibre plus utilisable. « Pour l’industrie textile, c’est un véritable moyen d’augmenter la production de fibres naturelles en et en Europe. »

Huit mois en place

Jusqu’à présent, les industriels l’utilisaient principalement pour la plasturgie (plasturgie) et dans les secteurs de la construction et de la papeterie.

La filature française est l’une des premières au monde à vouloir transformer cette usine en fil pour tissu d’habillementle premier à créer un fil 100% français.

Les machines créent de grands rubans de fibres. ©Coralie Maux-Renard

« Quand nous avons lancé le projet en 2020 de créer une filature de lin, nous nous sommes dit que ce serait pour le lin et le chanvre », raconte Karim Behlouli. On savait que la Normandie allait s’intéresser de près au chanvre. Nous avons acheté les premiers hectares en 2021, nous développons le fil pendant huit mois. »

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Vient maintenant le temps de tourner trouver des clients. L’entreprise a commencé à échantillonner pour montrer son savoir-faire aux futurs partenaires.

« Ensuite, ils doivent développer un tissu ou une pièce tricotée, le présenter aux marques, puis le mettre dans une collection », indique Karim Behlouli. Nous travaillons pour avoir potentiellement des commandes en novembre, pour des sorties en magasin en 2025 sous différentes marques. »

Les marques y voient l’opportunité de se différencier en racontant une histoire différente de celle du lin. Il y a un réel intérêt dans l’ensemble de la filière textile française.

Karim Behlouli, directeur général de NatUp fibres

Si jusqu’à présent le chanvre était largement utilisé pour le secteur industriel, cela était principalement dû à un problème d’outillage.

La première étape de peignage permet aux fibres de s’affiner. ©Coralie Maux-Renard

« Comme la plante mesure deux mètres et le lin un mètre, tout le le matériel agricole utilisé pour le lin n’était pas adapté au chanvre, explique Karim Behlouli, ingénieur textile de formation. C’était nécessaire imaginez un tracteur qui peut le récolter, le couper au milieu et le déposer à terre pour l’étape de rouissage*, comme pour le linge. »

Ainsi, les machines utilisées pour filer le lin peuvent être utilisées pour le chanvre.

D’un agriculteur à l’autre ou d’une récolte à l’autre, nous ne confectionnons pas du tout les mêmes fils. Après ces huit mois de travail, nous sommes en mesure de dire aux teilleurs et aux agriculteurs ce qui marche et ce qui marche moins.

Karim Behlouli

Une fibre semblable au lin

Avant d’être transformée, la fibre de chanvre est plus rustique que celui du lin, « mais une fois traité, il fait un produit très doux comme le lin. Dans le produit fini, même les spécialistes ne voient aucune différence », explique Karim Behlouli.

Au microscope, les fibres de lin et de chanvre se ressemblent. Ils sont petites fibres reliées entre elles par des segments pectiques (sorte de colle naturelle). Pour transformer la fibre en fil, « il faut réussir à extraire la fibre unique et à lui donner une torsion au dernier moment », décrit Karim Behlouli.

Quand on regarde un fil de lin ou de chanvre, on ne voit pas la différence.

Karim Behlouli
Filature de chanvre de Bernay
Les bobines sont assemblées pour former les bobines commerciales. ©Coralie Maux-Renard

La fibre qui y est collée doit le suivre sans se casser, principale difficulté. Le chanvre est plus compliqué à transformer que le lin, car le les fibres sont plus courtes.

Le chanvre a plus de « colle » entre les fibres.

« Quand on le passe dans le processus du lin, ça ne marche pas, il faut trouver le bons réglages pour ne pas les casser », explique le directeur général.

11 étapes pour fabriquer du fil

« Nous avons eu beaucoup de mal à trouver la bonne recette pour étirement des matériaux et les affiner mécaniquement et chimiquement, précise Karim Behlouli. Maintenant, nous fabriquons du fil aussi fin que du lin. »

Passer de la fibre naturelle au fil commercialisé, onze étapes sont nécessaires. Au fur et à mesure que les fibres passent par les différentes peigneuses, elles se transforment en ruban.

Filature de chanvre de Bernay
Quatre étapes sont nécessaires pour peigner les fibres. ©Coralie Maux-Renard

Ils deviennent plus doux et plus fins, ressemblant finalement à de longs cheveux blonds. « On tire la matière doucement pour ne pas la casser, elle passe par des points où des rouleaux en bois l’étirent et séparent les fibres », décrit le directeur général. A la fin des quatre étapes de peignage, les rubans sont tordu pour former un brin.

Après la quatrième étape, la mèche part vers le nord de la France où elle est blanchie, puis revient à Saint-Martin-du-Tilleul. « Nous allons fabriquer du fil pendant que le la mèche est mouilléece qui permet d’assouplir les segments pectiques pour qu’ils puissent glisser et obtenir un fil très long », explique Karim Behlouli.

Après plusieurs étapes similaires, le fil obtenu est séché, puis les bobines (le support sur lequel il repose) sont assemblées pour former bobines de fil commercialisable. « Cela nous permet également de voir s’il y a des défauts ; si la machine en détecte, elle le coupe et rattache les deux morceaux de fil », indique le directeur général.

La filature française propose à la filière textile, pour les deux types de végétaux, trois tailles de fils, NM26 (permettant de créer des vêtements comme des foulards), NM13 (pour les jeans) et NM18. « les réglages de la machine sont équivalents, seule la dernière étape est différente », explique-t-il. Pour cela, la production va plus vite pour le fil le plus gros (NM13).

*Le rouissage consiste à laisser les tiges de chanvre au sol pendant plusieurs semaines. Il s’agit d’une étape importante pour la création de fibre textile.

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