Le baron Benoît de Bonvoisin rétablit son honneur après 43 ans de combats

Le baron Benoît de Bonvoisin rétablit son honneur après 43 ans de combats
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Nous allons le charger. Il sera même associé aux Tueries brabançonnes. Il va nier, argumenter, divaguer, se défendre, attaquer – souvent avec succès – les médias qui relaient les accusations portées contre lui. Poursuivi, il sera relaxé du chef de malversations financières.

Il lui faudra attendre 43 ans pour que son combat pour restaurer son honneur soit couronné de succès. L’arrêt de la Cour d’appel de Liège impose au Ministre de la Justice de présenter, au nom de l’Etat, des excuses écrites. C’est exceptionnel.

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Mais c’est une longue histoire. À la fin des années 1970, l’ancien PSC (Parti chrétien-social) est solidement ancré au pouvoir, gouvernant alternativement avec les socialistes et les libéraux. Le parti compte une aile gauche (démocratie chrétienne) et une aile droite (CEPIC, Centre Politique des Indépendants et des Cadres). Le CEPIC est porté par Paul Vanden Boeynants, l’homme fort du parti. Benoît de Bonvoisin, qui était aussi un fervent anticommuniste, était alors trésorier du CEPIC.

En 1981, la Sûreté de l’État rédige deux notes sur Benoît de Bonvoisin. Philippe Moureaux, ministre de la Justice, adresse une synthèse de ces notes à la Commission Wijninckx, une commission sénatoriale qui examine la loi sur les milices privées.

19 mai 1981, le quotidien De Morgen divulgue son contenu. Benoît de Bonvoisin est accusé, via des hommes de paille et des entreprises, de financer l’extrême droite. Sa réputation est faite. Cela lui collera à la peau : c’est lui le «Baron Noir ». D’autres médias ont emboîté le pas. L’émotion est considérable. Le CPS a dissous le CEPIC en 1982.

Commence alors une longue procédure judiciaire pour Benoît de Bonvoisin. En 1983, il porte plainte pour faux et diffamation contre la Sûreté de l’Etat. Il affirme avoir été victime de manipulations et de données fabriquées qui ont détruit sa réputation. Elle vise l’Etat belge et réclame 100 millions de francs (2,5 millions d’euros). Il remue ciel et terre.

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Sécurité désavouée

En 2009, le Comité permanent R, chargé de surveiller les services de renseignement, publiait les résultats de son enquête sur «la manière dont la Sûreté de l’État a collecté, traité et diffusé les informations concernant le baron de Bonvoisin ». L’enquête est très critique. Les rapports sur Benoît de Bonvoisin ont été corrigés et réécrits à l’indicatif alors qu’ils avaient initialement été rédigés au conditionnel, constate la Commission permanente R.

L’intérêt de la Sûreté de l’Etat pour Benoît de Bonvoisin était légitime, juge le Comité permanent R, avant d’ajouter que ce dernier semble être devenu le «cible” notes de sécurité pour le ministre de la Justice »pour des raisons peu claires ».

« Le Comité Permanent R n’a pu que constater que ces notes et rapports contenaient des affirmations, des hypothèses voire des déductions dont la crédibilité et la fiabilité n’ont pas été vérifiées, et qui étaient formulées sans la moindre nuance »il écrit.

Benoît de Bonvoisin devrait boire du lactosérum. En fait, il ne peut l’apprécier que modérément. Il avait été victime d’un accident vasculaire cérébral l’année précédente. Mais il parvient toujours à suivre son combat repris par sa sœur.

Un carrousel judiciaire

En 2012, le tribunal de première instance lui donne raison et lui accorde 100 000 euros pour le préjudice subi. L’État belge fait appel. C’est une douche froide. La Cour d’appel estime qu’il n’était pas valablement représenté par un administrateur provisoire. Benoît de Bonvoisin se pourvoit en cassation. La butée est cassée. L’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Mons, devant laquelle il demande 7 millions d’euros et la publication d’excuses sur le site de la Sûreté de l’Etat.

Le 16 juillet 2020, le jugement tombe : pas d’excuses mais 25 000 euros pour préjudice moral. Benoît de Bonvoisin va en cassation. La Cour de cassation annule l’arrêt et renvoie le dossier à Liège. Le 23 novembre, elle a rendu son jugement. Elle lui accorde 15 000 euros (hors intérêts) et ordonne à l’État d’adresser à Benoît de Bonvoisin une lettre d’excuses, cosignée par le garde des Sceaux et l’administrateur général de la sûreté de l’État.

Ce qui est extrêmement rare. Le tribunal précise la formulation : «L’État belge vous présente ses excuses pour avoir rédigé, sous la plume du Ministre de la Justice, une note destinée à la Commission d’enquête parlementaire Wijninckx en date du 11/5/1981 contenant des informations non vérifiées, et donc non prouvées. associant à des mouvements d’extrême droite, note publiée le 19 mai 1981 dans le journal De Morgen, et pour l’atteinte à votre honneur et à votre réputation qui en a résulté ». Le tribunal a imposé une astreinte, au bout d’un mois, de 500 euros par jour de retard, avec un maximum de 15 000 euros.

L’État pouvait se pourvoir en cassation jusqu’au 28 mars 2024. Quelques heures avant la fermeture du greffe, il n’avait encore rien signifié.

 
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