Hormis le bêlement lointain de quelques moutons et le gazouillis des oiseaux, aucun bruit ne vient troubler la douce quiétude de la campagne environnante. « Et ils voudraient nous enlever ce calme ? Mais cette tranquillité et cette biodiversité, c’est justement ce que nous sommes venus chercher ici. tempête Chantal Houssin, qui vient depuis soixante-dix ans passer ses vacances au cœur du village de Chéniers, à Sacierges-Saint-Martin.
Comme la cinquantaine de membres de l’association Grosse tuile, créée fin 2022, elle ne décolère pas du projet. « terrible » de l’entreprise Terreal, qui souhaite ouvrir d’ici 2025 une carrière d’argile au lieu-dit Le-Joux, non loin de chez elle. Samedi 17 février, une quarantaine de riverains sont descendus dans les rues du village pour crier leur opposition à ce dossier dont l’enquête publique doit s’achever ce mercredi 21 février.
« Nous allons massacrer le pays aux mille étangs »
« Ce projet sera réalisé au détriment de treize étangs et de plusieurs hectares de bois. Cela n’a rien d’anodin. Il s’agit d’une carrière d’argile à ciel ouvert qui laissera une marque durable sur notre sol puisqu’elle s’étendrait sur cinquante hectares avec vingt à trente camions passant chaque jour devant nos maisons, traversant Saint-Benoît-du-Sault (classé parmi les plus beaux villages de France) et parcourez le milieu du parc naturel régional pour rejoindre la Charente, 130 kilomètres plus loin ! C’est irresponsable”, tonnerre Thierry et François Houssin.
Dans les rangs des manifestants, quatre propriétaires récemment installés disent se sentir “dupé”. « Personne ne m’a parlé de ce projet avant que j’achète ma maison, fin 2021. J’ai choisi de venir ici pour le cadre, la proximité du parc de la Brenne. On ne m’a pas laissé le choix d’accepter ou non de m’installer à proximité d’une carrière. Maintenant, je suis prisonnier pour les trente prochaines années, déplore Aline Ponchard, qui craint également un impact du projet sur la valeur foncière de son bien. Qui voudra acheter nos maisons avec de telles nuisances ? »
Une crainte que partage également Amélie Sottiau, également propriétaire depuis 2019. Venue du nord de la France en recherche «un écrin de verdure, sans pollution» pour y élever ses enfants, elle est fâchée d’avoir découvert le projet après coup. «Je ne savais pas que la société Terreal avait commencé à acheter des terrains depuis au moins 2016 et que les communes étaient au courant du projet de carrière depuis 2018. Personne ne nous a rien dit. J’ai tout découvert par hasard, un matin de septembre 2021, en tombant nez à nez avec un professionnel venu prendre des mesures pour étudier les nuisances sonores. Je suis resté abasourdi. »
Pour leur première manifestation, les opposants au projet se sont symboliquement rassemblés à la Croix-de-la-Barre, à proximité du site de la future carrière, puis se sont rendus en cortège jusqu’au village de Chéniers. Leur cortège s’est arrêté devant la rue menant au domicile du maire de Sacierges. Bientôt, ils prévoient de se rendre à la mairie pour remettre les signatures de la pétition qu’ils ont lancée en ligne. «L’objectif était au moins d’être entendu avant la fin de l’enquête publique, explique Johanna Mélinand. On espère désormais que le préfet ne validera pas le dossier. Ce serait tellement incohérent avec toutes les campagnes publicitaires autour de la beauté de notre cadre de vie. Comment vanter jusqu’à Paris le pays aux mille étangs et autoriser un projet qui massacrera nos paysages ? »
Pétition en ligne sur change.org, sous le nom « Refuser le projet de création d’une carrière d’extraction d’argile à ciel ouvert Département 36 »
« Un projet sérieux » défend le maire de Sacierges-Saint-Martin
Le projet déposé par la société Terreal (spécialiste des matériaux de construction en terre cuite basé à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine) prévoit l’implantation d’une carrière d’argile sur une superficie de 50 hectares (située à Roussines et Sacierges), pour une période de trente ans. L’extraction est destinée à l’usine de Roumazières-Loubert (en Charente) qui fabrique des tuiles en terre cuite et dont les réserves d’argile s’épuisent. Il est prévu d’extraire près de 67 000 tonnes d’argile en moyenne (90 000 tonnes maximum) par an, à une profondeur de 4 à 15 mètres. Terreal prévoit en moyenne 11 allers-retours en camion par jour (soit 22 passages). «L’extraction aurait lieu de juin à septembre et les poids lourds circuleraient de septembre à juin. Nous serions donc impactés toute l’année. disent les opposants.
L’enquête publique se termine mercredi 21 février. Le dossier sera alors entre les mains du préfet de l’Indre. Contacté, le maire de Sacierges, dont le conseil a voté à l’unanimité en faveur du projet, s’est montré rassurant. «Terreal a respecté les recommandations du Parc Naturel Régional. Ils réhabiliteront progressivement la zone, reconstitueront les zones humides et replanteront. Il s’agit d’un projet sérieux et les désagréments occasionnés seront très limités, assure Thierry Bernard. Le secteur de la construction a besoin de carrelage. Il est toujours préférable de le produire localement plutôt que de le chercher en Chine. » fait valoir l’élu qui nie avoir voulu cacher quoi que ce soit aux administrés. «Terreal a porté ce projet, nous n’y avons pas été impliqués ni consultés avant de devoir prendre une décision officielle lors de notre conseil municipal du lundi 12 février.»