Faïza Guène, “Like yesterday?” (Fayard) – .

Faïza Guène, “Like yesterday?” (Fayard) – .
Faïza Guène, “Like yesterday?” (Fayard) – .

Doria, saison 2. En 2004, en J’adore, j’adore demain (Hachette Littératures), le lecteur a rencontré Doria, 15 ans et des punchlines pleines de punchlines dans les poches de son survêtement, avec une acuité sans faille pour retranscrire son quotidien dans une cité de Livry-Gargan. On retrouve sa mère, presque divorcée, et la conversation reprend là où elle s’était arrêtée malgré le temps écoulé – marque de véritables amitiés. Vous avez apprécié hier ? ouvre un lundi et, comme chaque lundi, Doria court déposer son fils à l’école à l’heure. Le personnel de l’école l’a déjà en ligne de mire, tout comme la bande des mamans du quartier. « Cela fait longtemps que nous n’avons pas vu votre mari ? ! », lui font-ils remarquer. Doria évite ce sujet depuis qu’elle a expulsé Steve. Non plus un cheveu dans l’évier, mais l’angoisse d’élever seule son enfant comme sa mère avant elle, abandonnée par son mari parti épouser une plus jeune au Maroc. « Je me rends compte qu’élever un garçon me terrifie. J’ai trop peur de créer une machine qui va tout foutre en l’air. »

Heureusement, comme lorsqu’elle avait 15 ans, Doria peut compter sur son ami Hamoudi pour lui faire changer d’avis. Converti à YouTube, Hamoudi lui envoie des vidéos où “il zoome sur le billet d’un dollar avec le fameux triangle Illuminati”Ou “une voix robotique analyse en russe la chorégraphie d’un clip de Rihanna censé prouver son allégeance à Satan”. Pas sûr que Mme Burlaud, son ancienne psychologue qu’elle tente de retrouver sur Facebook, approuverait. Depuis qu’elle a quitté le lycée, Doria fantasme sur la vie privée de cette femme qui portait des porte-jarretelles et sentait le Parapoux. « Elle n’a jamais voulu avoir d’enfants. Il y a tant de voyages à faire et de jeunes écrivains à découvrir, même si personne ne remplacera jamais Philip Roth dans son cœur. »

On adore retrouver Doria, Hamoudi, Mme Burlaud et Aziz l’épicier, victime de « petits remplacements ordinaires » obligeant les entreprises du quartier à mettre la clé sous la porte. On se réjouit des portraits de Bruno et Claude-Marie, les beaux-parents dans le garage desquels Doria découvre une boîte « CoquinCoquine – Boutique érotique »et qui assimilent le mariage de leur fils à l’attitude colonialiste de leur grand-père. “Mon Steve, il aime les filles de chez toi, tu sais que tu n’es pas le premier. Comme son grand-père Robert lorsqu’il faisait son service en Algérie. » Et si Doria cherche du réconfort auprès de sa mère, c’est un effort inutile : « Si vous vous ennuyez, vous pouvez allumer la télévision. On ne brise pas une famille parce qu’on s’ennuie. C’est un peché. »

“Qu’est ce qui ne s’est pas bien passé?” » on se demande de concert avec Doria quand, comme elle, on croyait au mirage de la France en 1998 (« Le président Zizou projeté comme un faisceau lumineux sur l’Arc de Triomphe ») et que nous avons conscience d’avoir collectivement raté le tournant vers un autre monde possible. La nostalgie est-elle de mise, ou faut-il encore croire en un avenir radieux ? Avec une acuité intacte mêlée à cet humour qui était déjà le sel de J’adore, j’adore demainFaïza Guène aborde ces sujets qui nous irritent et nous interrogent, sans ironie mais avec une plume toujours aussi irrésistible.

Faïza Guène
Vous avez apprécié hier ?
Fayard
Tirage : 25 000 exemplaires.
Tarif : 20 € ; environ. 270 p.
ISBN : 9782213726823

 
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