«Mon inspiration pour la musique réside dans les livres»

«Mon inspiration pour la musique réside dans les livres»
«Mon inspiration pour la musique réside dans les livres»

D’abord animateur radio, puis rédacteur d’un fanzine musical, Rubin Steiner de Tours compose de musique électronique depuis 1998. Influencé par le jazz, le punk rock, le hip-hop et la pop, il n’est jamais là où on l’attend. Sa participation au Festival du Premier Roman de Chambéry n’est donc pas une surprise.

Vous avez déjà participé au Festival du Premier Roman, en 2023. Comment se fait-il que vous reveniez à Chambéry cette année ?

RS Depuis plus de trois ans, je fais de nombreuses lectures musicales avec des écrivains. Actuellement, je participe à plus de festivals littéraires que musicaux. L’année dernière, j’ai accompagné Pierre Ducrozet, invité au festival. Je ne connaissais pas du tout l’équipe de Plural Readings et nous avons passé de très bons moments ensemble. Nous nous sommes revus à d’autres occasions et sommes devenus de bons amis. Cette année, la marraine du festival, Julie Bonnie, est une de mes amies. Nicolas Richard
est également invité et il s’avère que nous travaillons également ensemble. C’est pourquoi je serai de nouveau à Chambéry pour cette nouvelle édition du Festival du Premier Roman.

Selon vous, est-ce le côté humain qui manque aux Victoires de la Musique ? En fait, vous avez boycotté l’événement en 2005, même si vous étiez nominé.

RS J’ai vécu une drôle d’aventure avec les Victoires de la Musique. C’est une longue histoire, mais à cette occasion j’ai découvert, de l’intérieur, qu’il s’agissait d’une grosse arnaque. J’ai été nominé sur la base d’un « malentendu ». Avec mon label bordelais de l’époque nous avions signé une licence de distribution avec BMG, un label majeur qui distribuait deux de mes albums. Mais mes amis disquaires m’ont dit que BMG ne faisait absolument pas la promotion de mon disque et ne faisait pas le travail que j’étais en droit d’attendre. C’est en menaçant BMG de poursuite que j’ai appris ma nomination aux Victoires de la Musique, deux semaines avant la cérémonie. J’ai compris qu’il s’agissait simplement d’une énorme campagne publicitaire dans laquelle les maisons de disques décidaient quels artistes elles allaient vendre l’année suivante.

Si l’on s’en tient « seulement » aux dix-huit albums que vous avez composés, nous passons à côté d’une grande partie de votre travail…

RS En effet, je fais beaucoup de choses différentes, qui ne font pas beaucoup de publicité. Je collabore donc avec des auteurs, mais je compose également pour le théâtre et la danse contemporaine. Je travaille aussi beaucoup en studio, enregistrant et mixant les albums d’autres artistes. De plus, je n’ai jamais arrêté de me produire en concert. Avec Sandrine Guillot et Jérémie Morin, on termine une tournée de quatre ans de l’album Dites bonjour à l’aube du paradoxe.

Qu’est-ce qui relie toutes vos créations ?

RS C’est difficile à expliquer… Avant de commencer à vivre de la musique en tant qu’intermittent, j’étais animatrice radio et j’ai créé un fanzine. Je pense que quand j’étais plus jeune, je voulais être critique rock, ou écrivain. La musique m’a littéralement emporté, pendant des années, j’ai même été programmateur d’une salle de concert : Le temps machine, à Joué-lès-Tours. Je suis allé jusqu’à faire une overdose de musique. La littérature, la danse et le théâtre sont des disciplines que j’ai toujours aimées, et vers lesquelles je suis revenue. Étonnamment, mon inspiration pour faire de la musique est plus évidente dans les livres que partout ailleurs. Mes quatre derniers albums sont directement issus de mes lectures.

Le Festival du Premier Roman veut montrer au public que la littérature existe aussi en dehors du livre. Qu’en penses-tu ?

RS J’adore découvrir des auteurs et des livres sur scène. Les festivals génèrent des propositions très intéressantes, des rencontres auteurs/musiciens, des échanges avec différents publics. Je suis toujours émerveillé par ces moments-là, car même si on ne sait pas vraiment ce qui va se passer, ces échanges vont bien au-delà de ce que l’on pourrait imaginer. De plus, ces festivals sont essentiellement des lieux de découverte car, contrairement à la musique, il n’existe pas de Spotify pour les livres, qui offrirait la possibilité de se faire une idée avant de commencer à lire. Ces événements vous permettent de remplir votre sac de lectures pour l’année à venir, en une semaine seulement. Ils racontent des histoires, ouvrent l’esprit et donnent envie de lire. Alors oui, les livres existent en dehors du papier.

Vous venez notamment présenter le spectacle Anatomie d’une chanson. De quoi s’agit-il ?

RS Le spectacle est créé par l’auteur et traducteur Nicolas Richard, sous une forme qu’il affectionne : le jeu de la traduction. On part du même texte, celui d’une chanson de Lana Del Rey, en compagnie de deux traducteurs, dont nous comparons les interprétations. Les deux traductions sont souvent complètement différentes, ce qui est passionnant et donne lieu à débat. Nicolas parle de création pour une traduction et je partage cet avis, car le traducteur apporte vraiment sa voix ainsi qu’un autre éclairage sur le texte original. Anatomie d’une chanson ça a l’air excitant.

© Rubin Steiner Studio

Des lectures qui inspirent Rubin Steiner

« Je suis un grand lecteur avec souvent une vingtaine de romans en cours. J’aime beaucoup la littérature américaine postmoderniste, et j’ai tout lu de Nicolas Richard, qui est traducteur et écrivain, notamment Le chanteur avec trois maris. En cherchant un livre à lire dans le train, je me suis rendu compte que parmi les romans que j’avais adorés ces dernières années, il y en avait un tas que nous avions présenté en lectures musicales sur scène (dont tous ceux de la photo). Il y a notamment Pierre Ducrozet et Variations de PaulJoy Sorman pour Le témoin et Julie Bonnie avec Maman, c’est toi sur la photo ? ou les poètes avec qui je travaille : Patrice Luchet et Tout un peuple ou Victor Malzac pour Créatine. je ne sais pas quoi te conseiller Plexiglas d’Antoine Philias, sur l’essentiel de la période Covid. Je me tourne beaucoup vers la littérature étrangère, car elle nous permet de découvrir le monde à travers des façons de penser et de dire, souvent très différentes des nôtres. Ces lectures me font me sentir un peu moins stupide envers les autres et mes propres croyances. Dans cette optique, il faut lire l’auteur chinois Lui Cixin avec Le problème des trois corps. »

Dans le cadre du Festival du premier roman : - Anatomie d’une chanson, 24 mai, à 18 h, au Théâtre Charles-Dullin, à Chambéry. 
- La playlist des invités et DJ set, samedi 25 mai, à 21 h, place Métropole, à Chambéry. 04 79 84 95 34.
 
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