«Le livre arme l’esprit»

«Le livre arme l’esprit»
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Utilisez un livre comme un couteau. C’est l’objectif de l’écrivain Salman Rushdie avec son nouvel ouvrage : Le couteau. Le romancier raconte notamment l’attentat qu’il a subi il y a deux ans aux Etats-Unis : « Je n’ai ni arme ni couteau, c’est donc l’outil que j’utilise. Et je pensais que je l’utiliserais pour me battre. » Le livre : comme une arme, une arme de l’esprit.

À une époque où les opinions se forgent souvent d’un simple clic, la Journée mondiale du livre est cette semaine l’occasion idéale de célébrer le pouvoir de la lecture en tant qu’outil essentiel pour armer notre pensée critique et préserver notre bon sens.

L’une des plus grandes forces du livre est sa capacité à nous plonger dans des mondes différents, nous confrontant à des idées nouvelles et contradictoires, nous obligeant à remettre en question nos propres croyances et à affiner notre discernement. Cette pratique est essentielle dans une société où la perversion de la réalité prend facilement le dessus.​

Mathieu Bock-Côté a un secret. Ce sociologue, journaliste et essayiste que l’on connaît grâce à mon émission « Face à l’info » sur CNews, lit huit heures par jour. Et ce depuis l’adolescence. Son arme est la lecture. Le livre qui l’a secoué ? Orwell, 1984. « Quand je l’ai lu à l’âge de 13 ans, je n’ai pas dormi pendant plusieurs jours. » Mathieu a également dévoré les Mémoires du général de Gaulle au même âge.​

Le reste après cette annonce

Retour sur les mousquetaires de « Face à l’info », ces intervenants reconnus pour leur élévation d’esprit, leur capacité d’analyse et de recul sur l’actualité. Leur arme ? Le livre. Charlotte d’Ornellas, journaliste très appréciée de « Face à l’info », s’est lancée dans la lecture à l’âge de 7 ans. « Pour moi, ce sont les Alice de la « Bibliothèque verte » que j’ai dévorées… Je ne pouvais pas m’arrêter. » La journaliste est alors séduite par deux livres qui marquent un tournant dans son rapport au monde : Le déclin du courage par Soljenitsyne et Mémoires – Les champs de braises par Hélie de Saint Marc.

Dimitri Pavlenko, journaliste à Europe 1 et chroniqueur à “Face à l’info”, se souvient de sa plongée dans le monde de la lecture avec Dunepar Frank Herbert, en CE2. «Mais le grand livre de ma jeunesse est Voyage jusqu’au bout de la nuit de Céline. Et sa suite, Mort à crédit, je voulais seulement écrire dans le style de Céline après ! » Dimitri Pavlenko a également été marqué par Espèce humaine de Robert Antelme, le premier compagnon de Marguerite Duras, sur son expérience des camps. « Il faut le lire pour comprendre le mécanisme de déshumanisation, que l’on voit malheureusement trop souvent à l’œuvre aujourd’hui dans notre société… »

Les livres sont les gardiens de la mémoire collective

Continuons avec les mousquetaires. Le premier livre qui a marqué Guillaume Bigot ? Les chevaliers par Joseph Kessel. Il avait 11 ans. Parallèlement, Guillaume se laisse emporter par le roman de Victor Hugo sur la Révolution française. Quatre vingt treize : « J’étais en sixième, en vacances en Bourgogne avec des parents âgés, il pleuvait des torrents, je ne pouvais pas sortir et j’ai pris la fuite. »

Marc Menant a très vite compris que les mots étaient essentiels. Il recherche longtemps les livres qui le passionnent, jusqu’au jour où il tombe sur Victor Hugo, L’homme qui rit : « Là, on découvre le souffle, l’imagination, le déchaînement de l’esprit ! » Marc Menant a eu les livres pour principaux compagnons durant son adolescence, tout comme Mermoz, qui s’est retrouvé seul, séparé de sa mère lors de l’exode en Auvergne de 1914, quand les livres lui ont permis de continuer.

Gardien de la mémoire collective

Parfois on les brûle, on les réécrit. Il arrive qu’ils bouleversent le présent par la force de la vérité du passé. Les livres sont les gardiens de la mémoire collective. En étudiant les leçons de l’histoire, nous pouvons tirer des leçons précieuses pour le présent et l’avenir.

Valéry Giscard d’Estaing s’est plongé dans les guerres de religion pour comprendre l’origine de la haine franco-française. François Hollande aimait les livres d’histoire. Nicolas Sarkozy prenait un immense plaisir à nager dans l’univers de Balzac, auteur notamment de cette phrase : « En France, on ne peut triompher que lorsque chacun se couronne sur la tête du triomphant »une phrase que Nicolas Sarkozy aime souligner en rappelant que Balzac était un génie.

Les jeunes lisent de moins en moins et passent dix fois plus de temps sur les écrans que dans les livres

Emmanuel Macron apprécie les livres de philosophie et de poésie, tient à souligner que « La littérature nous ramène à la civilisation ». Il déclare en 2021 vouloir faire de la lecture une grande cause nationale. Pas si simple. Les jeunes lisent de moins en moins et passent dix fois plus de temps sur les écrans que dans les livres, selon la dernière étude du Centre national du livre. Un tiers des jeunes âgés de 16 à 19 ans ne lisent pas du tout pendant leur temps libre.

Les livres derrière le succès

Le livre est également un guide pour forger un avenir plus éclairé et plus juste. Pour certains, cela représente la raison de leur prospérité ou de leur renommée. Elon Musk explique comment il a construit son empire en lisant des livres. Oprah Winfrey, souvent présentée comme la femme la plus influente d’Amérique, passe la plupart de son temps dans son club de lecture.

Mark Zuckerberg est “deux livres par mois” afin, dit-il, de donner le meilleur de lui-même. Comme si la lecture était d’une importance capitale dans le processus de réussite et contribuait, une fois celle-ci atteinte, à l’amélioration et au maintien de la notoriété.

Fabrice Luchini quitte l’école à 14 ans pour devenir apprenti coiffeur. Il est autodidacte et apprend en lisant. Le père de l’acteur, immigré italien, vendeur de fruits et légumes, lisait beaucoup. «Je l’ai vu cet été. Quand nous sommes allés en Italie, il lisait même si nous n’étions pas du tout une famille d’intellectuels”, raconte-t-il dans l’émission “La Grande Librairie”. Fabrice Luchini lisait Flaubert, Céline… avec passion. Voyage au bout de la nuit fut l’événement majeur de sa vie d’adolescent.

Pascal, Baudelaire, La Fontaine, Victor Hugo… Notre patrimoine est riche et puissant. Soyons-en dignes.

Que le livre soit un moyen de répondre aux enjeux de cohésion sociale en France

Si, aujourd’hui, le marché du livre français reste une référence en Europe, avec des ventes puissantes notamment en littérature, bande dessinée et jeunesse, restons sur nos gardes. À l’heure où l’idée de taxer les livres d’occasion refait surface, à l’heure où, contre toute attente, la publicité du livre à la télévision s’expérimente, veillons à ne pas créer de distorsion entre grands et petits éditeurs. Il est légitime de remettre en cause toute mesure affectant directement ou indirectement notre patrimoine culturel.

Lire pour résister

La Journée mondiale du livre nous invite donc cette semaine à réfléchir sur notre rapport aux livres. La ville française de Strasbourg a été désignée capitale mondiale du livre 2024.

Que le livre soit un moyen de répondre aux défis de la cohésion sociale en France, de contribuer à résister à l’ignorance et de préserver notre bon sens dans un monde en bouleversement. Résistance armée.

 
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