Alors qu’il se trouvait dans l’enceinte du Capitole pour assister à la cérémonie d’investiture de Donald Trump, lundi 20 janvier, Joe Biden a gracié de manière préventive plusieurs membres de sa famille pour les protéger d’éventuelles « poursuites partisanes » contre son successeur.
“Je ne peux pas, en toute bonne conscience, ne rien faire.” L’ancien président des États-Unis Joe Biden a multiplié les grâces présidentielles ce lundi 20 janvier avant l’investiture le même jour de Donald Trump.
Des grâces accordées à titre préventif aux élus, aux fonctionnaires mais aussi aux membres de sa famille pour les protéger d’éventuelles futures enquêtes ou poursuites « partisanes » menées par son successeur. Tout au long de sa campagne, le nouveau président républicain avait en effet promis de se « venger » de ses adversaires politiques.
« Menaces incessantes »
L’ancien président démocrate a accordé une grâce présidentielle préventive, comme le permet l’article 2 de la Constitution, à cinq membres de sa famille alors même qu’il était au Capitole pour assister à l’investiture de Donald Trump. Soit quelques minutes seulement avant la prestation de serment de ce dernier.
Sont concernés son frère James Biden, sa sœur Valerie Biden Owens, leurs conjoints respectifs, ainsi que son frère Francis Biden, selon le document officiel publié par le ministère de la Justice. Cette loi leur accorde « une grâce totale et inconditionnelle pour toutes les infractions non violentes contre les États-Unis qu’ils ont pu commettre ou auxquelles ils ont participé au cours de la période allant du 1er janvier 2014 jusqu’à la date de cette grâce ». .
Notez que ces grâces ne protègent que contre les poursuites au niveau fédéral, et non contre les enquêtes du Congrès ou les enquêtes fiscales par exemple.
Le 1er décembre, Joe Biden a également gracié son fils Hunter, l’une des cibles favorites de l’extrême droite américaine, qui avait été condamné dans deux affaires distinctes de possession illégale d’arme à feu et d’évasion fiscale.
« Ma famille a été la cible d’attaques et de menaces incessantes, motivées uniquement par le désir de s’en prendre à moi – la pire forme de politique partisane. Malheureusement, je n’ai aucune raison de penser que ces attaques vont cesser », a soutenu l’ancien président.
« Il l’a fait pendant mon discours !
Donald Trump n’a pas manqué de dénoncer l’action de son prédécesseur.
“Je ne savais pas qu’il avait gracié sa famille, il l’a fait pendant mon discours, je veux dire, pendant mon discours!”, a-t-il répété à la presse alors qu’il signait ses premiers décrets dans le Bureau Ovale.
« Tout ce que j’aurais pu dire, c’était ‘excusez-moi, j’aimerais revenir et parler encore’. C’est évidemment un mauvais précédent », a-t-il ajouté.
-En jeu, Joe Biden a également commué en résidence surveillée la peine de prison à vie de Leonard Peltier, 80 ans, un militant amérindien incarcéré pour l’homicide en 1975 de deux agents du FBI, une affaire fabriquée de toutes pièces selon ses défenseurs. Il a également gracié deux condamnés qui avaient purgé leur peine.
«Nous vivons dans des circonstances exceptionnelles»
Tôt ce lundi, quelques heures avant la cérémonie d’investiture, Joe Biden a également gracié l’ancien chef d’état-major des forces armées, le général Mark Milley, et l’ancien architecte de la stratégie de la Maison Blanche contre le Covid-19, le Dr Anthony Fauci.
Le général Milley, chef d’état-major des forces armées sous Donald Trump puis Joe Biden, avait prévenu pendant la campagne que le milliardaire républicain était un “fasciste de bout en bout” et la “personne la plus dangereuse pour ce pays”. Donald Trump avait laissé entendre que l’officier s’était rendu coupable d’une « trahison » qui, en d’autres temps, lui aurait valu le peloton d’exécution.
Le Dr Fauci, dont le franc-parler pendant la pandémie de coronavirus l’a souvent mis en désaccord avec Donald Trump lors de son premier mandat, est depuis l’une des figures les plus vilipendées au sein d’un parti de droite et de mouvements complotistes.
L’ancienne parlementaire républicaine Liz Cheney a également été graciée, comme tous les élus et fonctionnaires ayant participé à la commission d’enquête sur l’assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump, le 6 janvier 2021. Les policiers qui ont témoigné devant cette commission sont également affecté par ces grâces.
« Je crois en l’État de droit et je suis sûr que la solidité de notre système judiciaire finira par prévaloir face aux débats politiques. Mais nous vivons dans des circonstances exceptionnelles et je ne peux, en bonne conscience, rien faire », a expliqué le démocrate de 82 ans dans un communiqué, pour justifier une initiative exceptionnelle.
« Il est inquiétant de constater que des fonctionnaires ont été victimes de menaces et d’intimidations parce qu’ils s’acquittaient fidèlement de leurs fonctions », a-t-il déclaré. « Certains ont même été menacés de poursuites judiciaires. »
Donald Trump a dénoncé ces grâces accordées selon lui à “des personnes très, très coupables de crimes très graves”, en référence notamment aux membres de la commission d’enquête parlementaire sur l’assaut du Capitole.
En accordant autant de grâces préventives, Joe Biden a pris « une mesure sans précédent dans l’histoire présidentielle », note CNN. Le risque maintenant ? Laissons Donald Trump utiliser ce précédent pour protéger ses propres alliés de poursuites pénales à l’avenir.
Juliette Brossault avec l’AFP