Le Canada se classe au cinquième rang des paradis fiscaux

Le Canada se classe au cinquième rang des paradis fiscaux
Le Canada se classe au cinquième rang des paradis fiscaux

Le Canada figure parmi les cinq principaux pays responsables d’abus fiscaux transfrontaliers, selon les experts.

Le Canada s’est hissé au tableau du déshonneur au cours des dernières années Etat des lieux sur l’ampleur de l’évasion fiscale des multinationales et des particuliers fortunés, élaboré par l’ONG spécialisée Tax Justice Network (TJN) et dévoilé mardi. Il arrive à 5 heurese figure parmi les principaux pays responsables du problème, étant lié à plus de 6 % des quelque 492 milliards de dollars de pertes fiscales subies par tous les pays en un an.

En effet, s’il apparaît que le Canada peut se plaindre de perdre chaque année un total de 10,9 milliards de dollars américains (plus de 15 milliards de dollars canadiens) en recettes fiscales à cause des acrobaties et des magouilles comptables de riches particuliers (près de 2 milliards de dollars américains, soit 2,8 milliards de dollars canadiens) ), mais surtout les multinationales (8,9 milliards de dollars américains, soit 12,4 milliards de dollars canadiens), les gouvernements des autres pays peuvent surtout lui reprocher de leur coûter plus que 31 milliards de recettes fiscales perdues, tant du côté des grandes fortunes (près de 3 milliards) que du côté des multinationales (28,2 milliards).

En tête de ce triste classement, le territoire britannique des îles Caïmans, aux Antilles, et Hong Kong font bien pire, chacun avec un peu plus de 45 milliards de pertes fiscales totales infligées aux autres pays. Viennent ensuite l’Irlande (près de 41 milliards) et les États-Unis (37,5 milliards).

Toutefois, le Canada devance tous les autres pays, notamment ceux qui sont souvent accusés de servir de paradis fiscaux, comme le Royaume-Uni (7e avec 23,5 milliards), la Suisse (9e avec 21 milliards), le Luxembourg (10e avec 17 milliards), Panama (17e avec 11 milliards) et les Bermudes (19e avec 8,5 milliards).

La cinquième place du Canada dans ce portrait du TJN des pays complices de l’évasion et de l’évitement fiscaux dans le monde est une nouveauté. L’année dernière, les experts de l’ONG l’attribuaient encore « seulement » aux 12e rang, avec un total presque trois fois inférieur (11,5 milliards) de pertes fiscales qui lui sont imputables.

Tournure dramatique

Ce rebondissement ne doit pas être vu comme le signe d’un manque de sérieux dans la méthodologie TJN, assure Edgar Lopez-Asselin, coordonnateur du collectif québécois Échec aux paradis fiscaux. « Le Réseau pour la justice fiscale fait véritablement autorité en la matière. Je crois que ces changements reflètent plutôt la grande difficulté d’accès à l’information. »

Pour ses évaluations, le TJN s’appuie notamment sur des données collectées en vertu d’une nouvelle règle de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) obligeant les grandes multinationales à déclarer, pays par pays, leurs revenus, leur nombre de travailleurs, leurs bénéfices. et leurs impôts payés.

Le rôle central joué par le Canada dans l’évitement fiscal international s’explique principalement par trois facteurs, explique Edgar Lopez-Asselin, à commencer par ses règles fiscales généreuses et accommodantes dans le secteur minier et pour les autres industries extractives. Les fiscalistes ont aussi appris à profiter de ses nombreuses conventions fiscales bilatérales signées avec les paradis fiscaux, censées éviter la double imposition des entreprises et des particuliers, mais aboutissant parfois à une double non-imposition. Et puis, il y a « cette extrême opacité » qui entoure les données financières des entreprises privées qui ne sont pas cotées en bourse et qui permet trop souvent à ces dernières d’organiser leurs chiffres comme bon leur semble.

Ce qui est frappant, dit le TJN dans son rapport, c’est que tous ces efforts déployés depuis des années par l’OCDE pour mettre en conformité les pratiques fiscales abusives, ainsi que ses nouvelles règles, ne semblent pas, pour l’instant, être sans effet sur le problème. Les gouvernements qui se sont laissés convaincre de réduire leurs taux d’imposition pour favoriser le retour des entreprises et des grandes fortunes ne sont pas plus avancés. « Les données montrent désormais que cela n’a fait qu’aggraver les pertes qu’ils ont subies. »

Évasion fiscale et austérité

L’ironie, poursuit le TJN, est que les principaux pays responsables du problème, issus des économies développées, sont également les plus touchés. Les auteurs du rapport veulent notamment pour preuve ces « huit pays nuisibles » qui s’opposent à ce projet d’élaboration d’une convention-cadre sur la coopération fiscale internationale aux Nations Unies. Composé des États-Unis, du Royaume-Uni, du Japon, du Canada, de l’Australie, de la Corée du Sud, de la Nouvelle-Zélande et d’Israël, ce groupe de « pays bloqueurs » est complice de près de la moitié (43 %) de l’évasion fiscale dans le monde, mais elle-même perd 177 milliards.

Prévues pour démarrer l’année prochaine, les négociations à l’ONU auraient l’avantage de déboucher sur des règles internationales décidées sur une base mondiale, plutôt que dans le cercle restreint du club des pays riches de l’OCDE. “L’abus fiscal transfrontalier est le plus grand obstacle à la fiscalité [et à des politiques sociales] efficace et progressiste », affirme le TJN.

La perte de 10,9 milliards de dollars américains en recettes fiscales au Canada équivaut à 6 % de ses dépenses annuelles en santé. « À l’heure où on entend de plus en plus parler d’austérité au Québec et à Ottawa, c’est le genre de chose qui risque de devenir de plus en plus mal perçue par l’opinion publique », note Edgar Lopez-Asselin.

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