New Delhi s’est retrouvée plongée dans une atmosphère empoisonnée, irrespirable en raison de la pollution qui sévit depuis plus de douze ans depuis l’arrivée de l’automne. Et comme chaque année, le gouvernement central fait preuve d’une apathie déconcertante. Le Premier ministre Narendra Modi était en visite officielle au Nigeria, dimanche 17 novembre, avant de s’envoler pour le G20 au Brésil, puis en Guyane. Il est resté silencieux sur la crise environnementale à laquelle est confrontée la ville où il vit et travaille. Or, le ministère indien de la Santé a indiqué, dans un rapport publié en octobre 2023, que la pollution de l’air avait tué 1,7 million de personnes en 2019.
Pollution de l’air : fermeture de toutes les écoles primaires à New Delhi
Des dirigeants muets
Ces quelque deux millions de décès par an ne semblent guère émouvoir le ministre de la Santé, Jagat Prakash Nadda. Il fait campagne ces derniers jours pour le parti au pouvoir, le BJP, lors des élections législatives dans l’État du Maharashtra et du Jharkhand. Il n’a également fait aucune déclaration sur la pollution qui frappe Delhi et le nord de l’Inde. Son collègue en charge de l’Environnement, Bhupender Yadav, est également silencieux. Son compte X fait la part belle aux déclarations de Modi lors de la visite au Nigeria et des élections locales.
L’apathie des autorités reflète celle de l’opinion publique, parfois aveugle face à cette crise sanitaire et environnementale. Dans les rues de Delhi et de sa banlieue, les passants qui se protègent avec un masque FFP2, le seul capable de filtrer les particules fines, se comptent sur les doigts d’une main. Lors des élections législatives fédérales du printemps dernier, qui ont vu le Premier ministre remporter un troisième mandat, le sujet n’a même pas été évoqué.
“Comment peut-on prendre autant de risques ?”
Les autorités locales ont pris quelques décisions dimanche : interdiction d’entrée à New Delhi aux poids lourds (sauf ceux transportant des marchandises essentielles), suspension des chantiers, fermeture des écoles et autorisation pour les fonctionnaires et du secteur privé, de travailler à domicile. Trop peu, trop tard, ont déploré lundi les juges de la Cour suprême. “Lorsque l’indice de la qualité de l’air atteint entre 300 et 400, ces mesures doivent être décrétées sans délai.tonnaient les magistrats au moment où l’indice dépassait la barre des… 1600. »Comment peux-tu prendre autant de risques ?s’est exclamée la plus haute instance judiciaire du pays.
Le problème est en réalité bien plus profond. Avec la baisse des températures qui débute en novembre, les particules émises par les véhicules, les deux-roues, les chantiers et les ménages pauvres utilisant le feu de bois restent en suspension. Sans pluie ni vent pour les disperser, ce brouillard toxique peut durer des semaines. Les gaz d’échappement contribuent à 51 % de cette pollution. Problème : l’urbanisme de Delhi et des villes voisines donne la priorité aux voitures, pas aux piétons ou aux cyclistes. Une étude de l’IIT Delhi, une école d’ingénieurs, révélait en septembre que 44 % des routes de la capitale ne disposaient pas de trottoir. Et un quart est trop étroit pour être emprunté. La plupart sont jonchés d’ordures, de débris de construction ou squattés par des vendeurs ambulants. Il n’y a pas de piste cyclable.
Au Pakistan aussi
Le nord de l’Inde n’est pas le seul à être plongé dans le brouillard. Le Pakistan oriental traverse une crise similaire. Début novembre, la ville de Lahore a dû fermer des écoles, des parcs, des musées et suspendre les travaux de construction. Le gouvernement de la province du Pendjab a pointé du doigt la culture sur brûlis pratiquée par les agriculteurs indiens. Lahore n’est qu’à 20 km de la frontière. Sa dirigeante, Maryam Nawaz Sharif, a appelé fin octobre à un dialogue avec son homologue du Pendjab indien pour trouver des solutions communes. “Le vent ignore la frontière entre nos deux pays. Nous devons agir pour le bien-être de nos deux peuples.insista-t-elle. L’Inde n’a pas répondu officiellement.