Reconnaissance d’un État palestinien : qu’est-ce que cela signifie exactement ?

Avec la guerre qui fait rage dans la bande de Gaza depuis sept mois, la perspective de la création d’un État palestinien n’a jamais été sombre sur le terrain. Mais dans les sphères diplomatiques, notamment occidentales, le débat autour de la reconnaissance de la Palestine comme État indépendant est bel et bien sur la table.

A ce jour, 139 pays sur les 193 Etats membres de l’UnionONU − principalement des pays arabes, mais aussi des pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique du Sud − reconnaissent l’État de Palestine avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le 21 mai, trois pays européens viendront s’ajouter à cette liste, à savoir l’Espagne, l’Irlande et la Slovénie.

Dans l’Union européenne – outre la République tchèque, la Hongrie, la Pologne, la Bulgarie, la Roumanie et Chypre qui l’avaient fait avant de rejoindre le bloc – seule la Suède, qui compte une importante communauté palestinienne, l’a fait en 2014.

Les États-Unis, le Canada, l’Australie et plusieurs pays d’Europe occidentale, dont la France et l’Allemagne, ainsi que la Corée du Sud et le Japon, ne reconnaissent pas l’État de Palestine, mais entretiennent néanmoins des relations diplomatiques avec l’Autorité palestinienne.

L’ambassadeur palestinien auprès de l’ONU, Riyad Mansour, s’adresse aux représentants des États membres de l’organisation avant le vote visant à accorder davantage de droits aux Palestiniens, le 10 mai 2024.

Photo : Getty Images / AFP/CHARLY TRIBALLEAU

Vendredi, le Canada s’est déclaré prêt à un changement de cap dans sa politique étrangère au Moyen-Orient. Le gouvernement de Justin Trudeau serait prêt à reconnaître unilatéralement l’existence de l’État palestinien, sans l’approbation d’Israël, si l’État palestinien fait preuve de bonne gouvernance et si le Hamas ne fait plus partie de l’équation.

Un impact politique

Mais que signifie concrètement la reconnaissance d’un État palestinien ?

Selon Douglas Proudfoot, ancien ambassadeur du Canada à Ramallah, en Cisjordanie occupée, un la reconnaissance n’aura pas d’effets magiques sur le terrain.

La reconnaissance de l’État de Palestine est purement symbolique. Cela dit, les symboles sont parfois très importants.

Une citation de Douglas Proudfoot, ancien ambassadeur du Canada dans les territoires palestiniens

L’impact sera davantage d’ordre politique, explique l’ancien diplomate canadien en poste à Ramallah entre 2016 et 2019.

Cela met une certaine pression sur Israël, mais ce n’est pas en reconnaissant un Etat qu’on crée un Etatil ajoute.

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Des manifestants pro-palestiniens affrontent des manifestants pro-israéliens au centre-ville de Montréal, le 14 mai 2024

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Selon lui, le changement de politique canadienne dans ce débat est importantparce que cela met le Canada dans la bonne directionétant donné que la reconnaissance d’un État palestinien est un premier pas vers une solution à deux États au conflit israélo-palestinien.

Cela envoie également un message aux autorités israéliennes, a-t-il déclaré, selon lequel la patience a des limites.

Je suis convaincu que la reconnaissance [d’un État palestinien] cela finira par se produire, car il n’y a pas d’autre solution que la solution à deux États. Toutes les autres solutions sont impossibles.

Une citation de Douglas Proudfoot, ancien ambassadeur du Canada dans les territoires palestiniens

Une direction divisée

Vendredi, une majorité des pays membres duONU a voté en faveur de l’octroi droits et privilèges supplémentaires pour les Palestiniens, leur permettant par exemple de soumettre directement des propositions et des amendements, sans passer par un pays tiers, ou de siéger parmi les États membres par ordre alphabétique. Le Canada s’est toutefois abstenu de participer à ce vote symbolique.

Israël, dont le gouvernement rejette la solution à deux États, a sévèrement critiqué la résolution. L’ambassadeur israélien àONUGilad Erdan, a accusé l’Assemblée générale de donner des droits d’État à une entité déjà partiellement contrôlée par des terroristes du Hamas.

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L’ambassadeur d’Israël auprès de l’ONU, Gilad Erdan, a accusé l’Assemblée générale de « promouvoir la création d’un État palestinien terroriste dirigé par le Hitler de notre temps », brandissant un portrait du leader du Hamas, Yahya Sinwar, le 10 mai 2024.

Photo : Getty Images / AFP/CHARLY TRIBALLEAU

La direction palestinienne est divisée depuis 2007, après des affrontements fratricides entre le mouvement Fatah et le Hamas. Ainsi, c’est l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas (Fatah) qui exerce un pouvoir limité en Cisjordanie, territoire occupé depuis 1967 par Israël, et c’est le Hamas qui contrôle la bande de Gaza.

L’ancien ambassadeur du Canada en Cisjordanie réfute catégoriquement l’idée selon laquelle la reconnaissance d’un État palestinien profiterait au Hamas. Non c’est faux. Les gens qui disent ça ne comprennent pas la situationdit M. Proudfoot.

Le Hamas n’est pas favorable à une solution à deux États, c’est pourquoi la reconnaissance de la Palestine en tant qu’État n’est pas quelque chose que le Hamas souhaite.

Une citation de Douglas Proudfoot, ancien ambassadeur du Canada dans les territoires palestiniens

Le Hamas sera acculé

Le politologue Sami Aoun estime également que la reconnaissance d’un État palestinien embarrasserait plutôt le Hamas. Selon lui, le mouvement islamiste veut une longue trêve avec les Israéliens, mais refuse toujours de reconnaître Israël en tant qu’État.

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Hamas pourra-t-il se prononcer en faveur d’une solution à deux États ? Jusqu’à présent ça navigue, ça reste ambigudit M. Aoun. Le Hamas sera acculé si un Etat palestinien est officiellement reconnu par la communauté internationale, selon lui.

Il y a aussi la dimension régionale à prendre en considération, le Hamas étant dépendant de l’Iran, rappelle le professeur émérite de l’Université de Sherbrooke et directeur de l’Observatoire sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord de la Chaire Raoul-Dandurand.

La position du Hamas dépendra également de l’issue de la guerre avec Israël, estime-t-il encore.

Si la guerre se termine avec le Hamas toujours actif militairement, il y a peu d’espoir qu’il fasse des concessions. Dans cette éventualité, les Israéliens risquent également d’être plus rigides dans leur position.

Une citation de Sami Aoun, chercheur spécialiste du Moyen-Orient

Selon le chercheur, il doit y avoir un point d’inflexion pour parvenir à une solution à deux États. D’un côté, l’Autorité palestinienne doit reprendre le contrôle du Hamas et, de l’autre, il faut qu’un gouvernement plus centriste soit en place en Israël, a-t-il déclaré.

Depuis 2012, la Palestine est considérée comme un État non observateur de l’ONU. Les Palestiniens n’ont pas le droit de voter sur les résolutions de l’Assemblée générale, mais ils peuvent avoir accès aux agences des Nations Unies et aux traités internationaux.

Et depuis 2015, la Palestine fait partie des 123 États membres de la Cour pénale internationale (CPI), qui vise à poursuivre les auteurs de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre.

>>Antony Blinken serre la main de Mahmoud Abbas.>>

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Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken serrant la main du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, à Ramallah, le 7 février 2024.

Photo : Associated Press / Mark Schiefelbein

Aucun interlocuteur crédible

Le politologue Michael Young estime également qu’il n’y a actuellement aucun interlocuteur crédible des deux côtés des frontières. […] et que l’Autorité palestinienne a perdu toute crédibilité », « texte » : « Aujourd’hui, le principal problème est que les Israéliens refusent le concept même d’État palestinien.[…] et que l’Autorité palestinienne a perdu toute crédibilité”}}”>Aujourd’hui, le principal problème est que les Israéliens refusent le concept même d’État palestinien. […] et que l’Autorité palestinienne a perdu toute crédibilitéil a dit.

Il se demande également à quoi pourrait ressembler un éventuel État palestinien, d’autant plus que la Cisjordanie est divisée par plus d’une centaine de colonies israéliennes jugées illégales au regard du droit international et que la bande de Gaza est en ruines.

L’analyste du Carnegie Center pour le Moyen-Orient souligne également l’importance du rôle des États-Unis, qui ont tenté à de nombreuses reprises d’établir des négociations de paix entre Israéliens et Palestiniens.

Washington s’oppose à toute reconnaissance d’un État palestinien en dehors d’un accord bilatéral entre les Palestiniens et leur allié israélien. Les États-Unis, qui ont opposé en avril leur veto à l’admission de la Palestine en tant qu’État membre à part entière de l’Union,ONUsouligner que la législation américaine les obligerait à réduire leur financement àONU en cas d’adhésion palestinienne en dehors d’un tel accord bilatéral.

>>Un homme levant la main droite lors d’une réunion.>>

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Le représentant américain oppose son veto à l’adhésion palestinienne en tant que membre à part entière de l’ONU. En 1976, les États-Unis se sont opposés à l’adhésion du Vietnam.

Photo : afp via getty images / ANGELA WEISS

Malheureusement, tant qu’Israël s’opposera à une solution à deux États et tant que les Américains diront que les Israéliens doivent accepter l’adhésion d’un État palestinien, nous resterons bloqués.

Une citation de Michael Young, analyste au Carnegie Middle East Center

M. Young estime cependant que même s’il est symbolique, le vote à l’Assemblée générale duONU Vendredi va mettre de la pression sur Washington. Finalement, Les Américains ne veulent pas être isolés et aimeraient voir une solution à deux États se concrétiser. Ils pourraient utiliser ce vote comme levier pour exercer davantage de pression sur les Israéliens.dit-il encore.

Même conclusion de la part de Sami Aoun, qui souligne que les Etats-Unis sont le seul capable de rassurer les Israéliens et de leur faire comprendre que la reconnaissance d’un État palestinien n’est pas nécessairement une Source de menace pour leur existence.

Les États-Unis restent le médiateur le plus efficace au Moyen-Orient, conclut-il. […] surtout après[l’attaque du Hamas] le 7Octobre.”, “texte”: “Ils sont les seuls à pouvoir offrir un parapluie de sécurité aux Israéliens.[…] surtout après[l’attaque du Hamas] 7 octobre. »}} »>Ils sont les seuls à pouvoir offrir un parapluie de sécurité aux Israéliens […] surtout après [l’attaque du Hamas] le 7 octobre.

 
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