Au Burkina Faso, la junte expulse trois diplomates français accusés d’« activités subversives »

Au Burkina Faso, la junte expulse trois diplomates français accusés d’« activités subversives »
Descriptive text here
>>
Une affiche représentant le capitaine Ibrahim Traoré, lors d’une manifestation contre la présence française, le 20 janvier 2023. Olympie de MAISMONT / AFP

A Ouagadougou, les expulsions de diplomates et humanitaires français ne sont pas plus surprenantes que les arrestations de toute voix dissidente. Mardi 16 avril, trois diplomates français ont été accusés de « activités subversives » et a déclaré “persona non grata” par le ministère burkinabé des Affaires étrangères, dans une lettre adressée à l’ambassade de France à Ouagadougou consultée par Le monde.

Les deux conseillers politiques ainsi que la rédactrice en chef, en poste au Quai d’Orsay à Paris mais qui séjournait quelques jours au Burkina Faso dans le cadre de ses fonctions, selon plusieurs sources basées à Ouagadougou, ont été priées de quitter le pays à le dernier. tard jeudi 28 avril au soir. Le nouveau mouvement d’armement du régime vers Paris est une étape supplémentaire dans la dégradation des relations diplomatiques et militaires franco-burkinabè initiée par le capitaine Ibrahim Traoré depuis son arrivée au pouvoir par un putsch en septembre 2022.

Lire aussi | Au Burkina Faso, les voix dissidentes envoyées au front ou en prison

Ajouter à vos sélections

Le gouvernement n’a pas précisé dans sa lettre la nature du « activités subversives » accusé des trois diplomates français, et n’a pas répondu aux sollicitations du Monde. Selon nos informations, lors de son séjour sur place, la rédactrice en chef du ministère des Affaires étrangères a rencontré plusieurs organisations de la société civile et ONG, en compagnie de ses collègues de l’ambassade, “sur les dérives autoritaires de la junte et les massacres de civils perpétrés par l’armée”, précise une Source sécuritaire burkinabé. “Le régime n’a pas digéré cet activisme car il fait tout pour rester au pouvoir et se méfie des activités qui pourraient être soutenues par les chancelleries occidentales, dans le but d’organiser la résistance civile”, elle analyse.

Lors d’un entretien accordé à France 24 et Radio France Internationale (RFI) le 8 avril, le ministre des Affaires étrangères Stéphane Séjourné a souligné l’importance pour la France de préserver « liens avec les organisations humanitaires et la société civile » mais “pas avec les autorités”, au Burkina Faso comme au Mali et au Niger, trois pays dont la France a été chassée par les putschistes après leur arrivée au pouvoir.

« Accusations infondées »

Suite à l’expulsion de ses quatre diplomates du Burkina Faso, le Quai d’Orsay a rejeté « les accusations infondées portées par les autorités burkinabè » et a déploré cette décision qui « ne repose sur aucune base légitime ». Début décembre 2023, Paris avait déjà contesté les allégations d’espionnage cette fois, faite par les autorités burkinabè contre quatre responsables français. Présenté ensuite par une Source officielle française, citée par l’Agence France-Presse, comme « techniciens » est venu à Ouagadougou pour réaliser une « Opération de maintenance informatique au profit de l’Ambassade de France », les quatre Français sont en réalité des agents de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), selon plusieurs sources diplomatiques burkinabè et occidentales.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Des agents du renseignement extérieur français arrêtés au Burkina Faso

Ajouter à vos sélections

D’abord incarcérés à la maison d’arrêt de Ouagadougou après avoir été mis en examen sans que les motifs de leur mise en examen aient été dévoilés, ils ont ensuite été assignés à résidence dans la capitale et n’ont pas encore été libérés.

Leur arrestation a contraint Paris à rapatrier la douzaine d’agents de la DGSE en poste au Burkina Faso. Une opération que plusieurs sources diplomatiques et sécuritaires locales attribuent aux services de renseignement russes, dont certains éléments étaient arrivés à Ouagadougou deux semaines plus tôt, dans le cadre du renforcement de la coopération sécuritaire entre Moscou et Ouagadougou.

Selon nos informations, l’arrestation des quatre agents a été utilisée par la junte pour pousser Paris à limoger des personnalités burkinabè qualifiées de subversives. Un chantage auquel la France avait refusé d’accepter.

Divorce

Mi-septembre, l’attaché militaire de l’ambassade de France a également été accusé de« activités subversives » par les autorités et prié de quitter le territoire dans un délai de quinze jours. Avant lui, deux Français travaillant pour une entreprise burkinabè ont été accusés d’espionnage et expulsés du pays en décembre 2022.

Voir aussi | Au Burkina Faso, la première base militaire russe de l’Africa Corps

Ajouter à vos sélections

Dans le même temps, la junte avait demandé le remplacement de l’ambassadeur de France, Luc Hallade, dans une lettre adressée au Quai d’Orsay fin décembre, sans en donner les raisons. Symbole supplémentaire du divorce avec Paris réclamé par le capitaine Traoré, il a ensuite dénoncé fin janvier 2023 l’accord de défense signé en 2018 avec la France pour encadrer la présence de quelque 400 soldats des forces spéciales françaises de l’opération « Sabre », déployées sur la périphérie de Ouagadougou.

Suivez-nous sur WhatsApp

Rester informé

Recevez l’essentiel de l’actualité africaine sur WhatsApp avec la chaîne « Monde Afrique »

Rejoindre

Tout le monde avait plié bagage le 18 février. Leur départ fut suivi, quelques semaines plus tard, par celui des militaires français déployés au sein des administrations burkinabè dans le cadre d’un accord d’assistance militaire signé avec Paris en 1961 et que le régime avait également dénoncé au fin février.

Morgane Le Cam

Réutiliser ce contenu
 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

NEXT Guerre en Ukraine | Washington appelle ses alliés à donner des systèmes Patriot à l’Ukraine