Gériatrie | Une société vieillissante, des défis croissants

Alain Guibeault arrive avec son déambulateur dans le cabinet de son gériatre. Il s’assoit, essoufflé. Bip, bip, bip… Le système d’aspiration, qui aide à cicatriser la plaie d’une jambe, est débranché. La machine sonne constamment.

Bip bip bip. Le Dconcernant Julia Chabot vérifie la petite pompe. “Elle fait ça souvent?” », demande-t-elle. “Dans la nuit!” », répond Denise, l’épouse de M. Guibeault. “Dans la nuit?” C’est pas censé sonner, c’est censé être nul. » Le gériatre examine la plaie – elle est « belle » – puis contacte une infirmière pour régler l’appareil.

C’est l’un des problèmes que le Dconcernant Chabot tentera de régler l’affaire lors de sa consultation avec M. Guibeault à la clinique externe de gériatrie de l’Hôpital St. Mary à Montréal. Une rencontre de 90 minutes (oui, oui, 90 !) en face-à-face, sans écran d’ordinateur entre le médecin et son patient.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Alain Guibeault, 77 ans, écoute attentivement le Dconcernant Julia Chabot.

« Les gériatres ont une approche très holistique des soins aux patients », explique-t-elle.

Lors de la consultation, la spécialiste passe en revue tous les aspects de la vie de son patient : problèmes de santé physique, humeur, médication, mobilité, soins d’hygiène personnelle, gestion des repas, entretien ménager, etc.

«Il est certain que les médecins de famille peuvent faire beaucoup de choses et que de nombreux patients n’auront jamais besoin de consulter un gériatre de leur vie», souligne le Dconcernant Chabot. Mais d’autres personnes âgées « fragiles » auront besoin de l’expertise de ce spécialiste. Et ils seront encore plus nombreux à l’avenir avec le vieillissement de la population.

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Le Dconcernant Julia Chabot

Il est certain que 148 gériatres [au Québec]nous n’y arriverons pas. Il faudra que nous soyons plus nombreux et nous aurons besoin d’ergothérapeutes, de physiothérapeutes et de travailleurs sociaux possédant une expertise en gériatrie.

Le Dconcernant Julia Chabot, gériatre à l’Hôpital St. Mary’s

Des cas complexes

Les gériatres voient des cas complexes. M. Guibeault, 77 ans, prend une vingtaine de comprimés par jour. Il souffre d’une maladie pulmonaire obstructive chronique, de problèmes cardiaques et de douleurs à l’épaule. En 2024, il a été hospitalisé à plusieurs reprises, notamment pour changer sa prothèse de hanche qui lui causait des douleurs ainsi que pour des épisodes de confusion liés à la prise d’opioïdes visant à réduire ces douleurs.

Mi-décembre, quelques jours avant la consultation, il a fait deux chutes à son domicile. «J’ai trébuché sur le fil d’une lampe», a-t-il déclaré. Et la deuxième chute ? « Un étourdissement. Je suis tombé sur les fesses car je me protège beaucoup la tête. D’autant plus que j’ai une très bonne tête», plaisante-t-il.

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Le Dconcernant Julia Chabot examine son patient Alain Guibeault.

Le Dconcernant Chabot lui demande d’aller vers la civière pour prendre sa pression en position couchée et debout pour voir si elle baisse. Elle se précipite pour lui donner son déambulateur – sa « Cadillac », comme elle l’appelle.

«C’est l’étape la plus difficile de la journée : enlever le manteau», explique M. Guibeault. Son visage se tend. Ses épaules lui faisaient terriblement mal.

Contrôle effectué, pas de chute de pression. Le médecin soupçonne qu’un médicament peut contribuer aux étourdissements. Elle propose de l’arrêter, comme un autre, devenu inutile. Désormais, M. Guibeault prendra 21 comprimés plutôt que 23.

Préoccupations

Tout au long de la réunion, le Dconcernant Chabot interroge Denise. Cette dernière se dit « craintive » car son compagnon a oublié à deux reprises d’éteindre une cuisinière. Le détecteur de fumée s’est déclenché.

M. Guibeault travaillait auparavant comme cuisinier. Les repas sont son département. Le Dconcernant Chabot suggère de faire une demande au CLSC afin qu’un ergothérapeute puisse s’assurer qu’il cuisine en toute sécurité. Il n’y est pas opposé, mais refuse toute popote roulante. Le simple fait de mentionner cette possibilité le fait lever les yeux au ciel.

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L’unité de soins gériatriques de l’hôpital St. Mary’s

Alors que sa mémoire lui « joue des tours » en cuisine, la gériatre revient à la charge : « Mets-le, ton masque CPAP [traitement de ventilation à pression positive continue]dormir ? ” Non. ” J’aimerais que vous l’essayiez “, a déclaré le D.concernant Chabot. Peut-être que cela aiderait votre mémoire. »

Son sommeil et son énergie s’amélioreraient. Il s’endort en un clin d’œil devant la télévision, selon sa femme. « Si j’étais un somnifère, tout le monde m’achèterait ! » », dit-il avec espièglerie.

Autre inquiétude de Denise : M. Guibeault a parfois des hallucinations visuelles. Le Dconcernant Chabot explique qu’ils peuvent être générés par une infection. « Les personnes âgées présentent souvent des symptômes qui peuvent être très atypiques », explique-t-elle. Une prise de sang est réalisée sur place. Les résultats révéleront plus tard une infection.

Durant le temps des Fêtes, M. Guibeault a dû être hospitalisé pour une pneumonie. “Les hallucinations ont disparu”, dit-il. La pressedepuis son lit d’hôpital. Je tousse encore un peu, mais très peu. » Il doit avoir son jour de congé lundi. « J’espère que ça se passera bien. Je ne voudrais pas que ma femme prenne tous les problèmes sur son dos. »

Une chose est sûre, il souhaite rester loin de l’hôpital en 2025. Même s’il se dit « chanceux » d’avoir reçu de bons « soins personnalisés » à St. Mary. « C’est un luxe d’avoir un gériatre pratiquement privé ! »

Une équipe de gériatrie aux urgences

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Centre hospitalier St. Mary

Le service des urgences de St. Mary dispose de sa propre équipe de gériatrie depuis un an. Sa mission ? Réduire la durée de séjour des personnes âgées aux urgences et éviter les hospitalisations. Tôt le matin, une infirmière cible les patients âgés qui doivent être évalués en priorité. Un gériatre, un ergothérapeute, un physiothérapeute ou un travailleur social s’occupe d’eux. Si l’état du patient le permet, l’équipe organise déjà sa sortie. « Parfois, un patient a une fracture, est médicalement stable et a juste besoin d’un lit de soins post-aigus. [en réadaptation]dit Leeza Paolone, infirmière clinicienne. Nous en faisons la demande depuis l’urgence. » L’équipe a vu jusqu’à présent 1 200 patients. «Nous avons accordé environ 300 congés», précise le Dconcernant Julia Chabot.

 
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