L’épidémie de grippe est-elle en hausse en France en raison d’un relâchement des gestes barrière et d’une vaccination insuffisante ?
Ce sont des facteurs parmi d’autres, selon les professionnels de santé, qui évoquent également la coexistence de différentes souches de la maladie et l’augmentation des contacts pendant les vacances.
Un assouplissement des gestes barrières
« Les patients ont moins le réflexe de porter un masque, on en voit dans la salle d’attente qui viennent sans masque, on les distribue », observe le Dr Urfan Ashraf, secrétaire général de SOS Médecins.
“Les gestes barrières, le réflexe de se laver les mains, les solutions hydroalcooliques, l’aération, sont moins récents : ils font partie des éléments de transmission”, affirme-t-il.
Mais d’autres facteurs entrent en jeu.
La période des fêtes de fin d’année a multiplié les contacts alors que les cabinets médicaux locaux étaient fermés, réduisant l’offre de soins lorsque la demande augmentait.
Trois souches de grippe coexistent
De plus, deux souches de grippe coexistent, A (H1N1) et B (Victoria), bien qu’elles se succèdent habituellement, et une troisième se renforce, A (H3N2).
Ce phénomène renforce la circulation du virus, qui touche également les patients « plus jeunes que d’habitude, les enfants plus âgés et les adultes jusqu’à 50 ans », selon le virologue Bruno Lina.
Ce profil de patients accroît la demande de soins, estime le Dr Ashraf. “Des courbatures très importantes, des maux de tête, des vertiges, des douleurs musculaires et articulaires, des frissons, une fièvre qui monte jusqu’à 40, ça peut être impressionnant pour quelqu’un qui n’y est pas habitué” et “quand il ne supporte pas bien tous ces symptômes, son réflexe est : «J’ai besoin d’un médecin», dit-il.
Le nombre de décès en hausse
L’épidémie de grippe saisonnière, qui dure habituellement dix à douze semaines, s’est intensifiée début janvier, avec des hospitalisations à un niveau “exceptionnellement élevé” par rapport aux saisons précédentes, a constaté mercredi Santé publique France.
Le nombre de décès liés à la grippe, principalement chez les plus de 65 ans, a augmenté.
Pour s’en prémunir, les autorités insistent sur le fait que la vaccination reste une protection majeure, notamment contre les formes graves.
Vaccination fortement recommandée
Il est particulièrement recommandé aux personnes âgées de 65 ans et plus, aux personnes immunodéprimées, aux nourrissons de plus de 6 mois présentant des comorbidités, aux femmes enceintes et aux résidents des établissements médico-sociaux.
Pourtant, cette saison, « la campagne de vaccination a connu un démarrage très difficile », observe Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, rappelant que la grippe est « mortelle pour les personnes fragiles ».
Dans les maisons de retraite, “il n’y a pas de pic massif de l’épidémie”, assure Jean-Christophe Amarantinis, président du Synerpa, principal syndicat des Ehpad privés.
Un retour à la vaccination obligatoire pour les soignants
Mais « il faut inciter les personnels et les résidents à se faire vacciner et à respecter les gestes barrières », note Pierre Roux, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées, et « on essaie de faire de la pédagogie ».
Interrogé sur un éventuel retour de la vaccination obligatoire pour les soignants, le ministre chargé de la Santé Yannick Neuder a estimé vendredi, lors d’un déplacement à l’hôpital Cochin à Paris, que “la question se posera” dans le futur.
Le « plan blanc » lancé dans 87 hôpitaux
Si la couverture vaccinale devrait « être un peu meilleure que l’an dernier », elle reste « faible » avec quelque 10,3 millions de doses antigrippales distribuées jusqu’à présent, selon Philippe Besset.
Face à l’afflux de patients dans leurs services d’urgence, 87 hôpitaux ont déclenché un “plan blanc”, un système permettant de déprogrammer certaines opérations ou de rappeler des congés du personnel, selon le ministère de la Santé.