Ces deux travaux impliquent l’université de Stanford et l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIH, Bethesda), dont le laboratoire dirigé par le professeur Yasmine Belkaid, aujourd’hui directrice générale de l’Institut Pasteur.
La peau, organe sous-estimé, est en réalité un site important de défense immunitaire. Des chercheurs ont découvert que la peau est colonisée par une bactérie inoffensive, Staphylocoque épidermidisqui est présent sur la peau de presque toutes les personnes. Cette bactérie a la capacité de déclencher une forte réponse immunitaire, ce qui conduit à la production d’anticorps capables de prévenir les infections.
1- Développer l’appareil de production d’anticorps dans la peau en réponse à S. épidermidis
Une première étude réalisée par le Dr Inta Gribonika dans le laboratoire de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIH, Bethesda) dirigé par le professeur Yasmine Belkaid, aujourd’hui directrice générale de l’Institut Pasteur, l’Université de Stanford.
Dans une étude récente dirigée par le Dr Inta Gribonika, chercheuse postdoctorale au laboratoire du professeur Yasmine Belkaid, des cellules immunitaires sentinelles, appelées cellules de Langerhans (LC), ont été identifiées comme moyen d’alerter le reste du système immunitaire de la présence de S. épidermidis sur la peau. Lors d’une application non invasive sur la peau avec cette bactérie dite commensale (issue du microbiote), les LC initient une réponse humorale par l’activation des lymphocytes T et B situés dans le derme, qui conduit à la production d’anticorps. robuste, spécifique et durable dans la peau.
« L’observation des cellules B dans la couche dermique de la peau (en l’absence de maladie) est un concept nouveau car, jusqu’à présent, on pensait que la peau était dépourvue de cellules B », explique Inta Gribonika. Et ce n’est pas tout, car la production d’anticorps dans la peau se produit en l’absence totale d’inflammation et indépendamment de l’apport des ganglions lymphatiques, ce qui nécessite de réévaluer le modèle classique d’initiation de la réponse immunitaire. Plusieurs concepts biologiques clés sont donc ici remis en question.
L’observation de cellules B dans la couche dermique de la peau (en l’absence de maladie) est un concept nouveau car, jusqu’à présent, on pensait que la peau était dépourvue de cellules B.
Tandis que GribonikaChercheuse postdoctorale au laboratoire du Pr Yasmine Belkaid
La principale découverte des travaux d’Inta et Yasmine est que, dans ces circonstances particulières, la peau peut fournir tous les moyens nécessaires pour former une structure lymphoïde dermique locale capable de soutenir une réaction dite du « centre germinal » : « Cela signifie qu’une structure dans le derme de la peau est capable de soutenir le mécanisme de formation et de différenciation des cellules B en plasmocytes sécrétant des anticorps », explique Inta. Les anticorps générés par ce processus sont très protecteurs en contrôlant la colonisation topique des bactéries, garantissant ainsi l’équilibre et la diversité continue du microbiome cutané. Ces anticorps dérivés de la peau sont également très puissants pour éliminer les infections systémiques si la bactérie commensale colonisatrice parvient à briser la barrière cutanée. « Il s’agit d’un mécanisme de protection sanitaire innovant et très puissant qui protège activement l’hôte à tout moment, qu’il soit sain ou malade », souligne Yasmine Belkaid.
Il s’agit d’un mécanisme de protection de la santé nouveau et très puissant qui protège activement l’hôte à tout moment, qu’il soit en bonne santé ou malade.
Yasmine BelkaïdPrésident de l’Institut Pasteur
Les travaux d’Inta révèlent un dialogue actif entre les cellules B cutanées et le microbiote, avec des conséquences importantes – allant d’une meilleure compréhension du contrôle homéostatique des interactions hôte-microbiote, qui peut servir de plateforme pour des approches vaccinales innovantes, à de nouvelles applications cliniques pour le traitement des maladies cutanées topiques. Ensemble, ces travaux ouvrent la porte à un nouveau domaine de l’immunité humorale cutanée.
2- Transformer une bactérie cutanée omniprésente en vaccin topique
Une deuxième étude réalisée par l’université de Stanford, le laboratoire de l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIH, Bethesda) dirigé par le professeur Yasmine Belkaid, aujourd’hui directrice générale de l’Institut Pasteur.
Yasmine et Inta ont également co-écrit une autre étude dirigée par le laboratoire du Dr Michael Fischbach de l’Université de Stanford, dans laquelle la réponse systémique des anticorps à un micro-organisme commensal cutané génétiquement modifié est évaluée, chez la souris, comme stratégie de vaccination topique efficace.
Les chercheurs ont utilisé la bactérie S. épidermidis pour créer un vaccin topique pouvant être appliqué sur la peau. Ils ont découvert que l’application de cette bactérie sur la peau des souris déclenchait une réponse immunitaire similaire à celle observée chez l’homme. Ces modèles animaux ont produit des anticorps qui protègent contre l’infection par le tétanos et la diphtérie, deux maladies graves qui peuvent être mortelles si elles ne sont pas traitées.
Les tests ont montré une efficacité remarquable dans la prévention des infections par le tétanos et la diphtérie. Les chercheurs pensent que cette approche vaccinale pourrait être utilisée pour prévenir un large éventail de maladies, notamment les virus, les bactéries, les champignons et les parasites.
Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives pour la prévention des maladies infectieuses et pourrait révolutionner la manière dont nous nous protégeons contre les pathogènes. Les chercheurs espèrent que cette approche vaccinale pourra être testée sur des humains dans les années à venir.
Sources
1- La production autonome d’anticorps cutanés régule les interactions hôte-microbioteGribonika I et al., Nature. 11 décembre 2024. est ce que je : 10.1038/s41586-024-08376-y.
2- Découverte et ingénierie de la réponse anticorps à un commensal cutané important,Djenet Bousbaine et al., Nature11 décembre 2024. est ce que je : 10.1038/s41586-024-08489-4.