Les patients atteints de MII (maladie inflammatoire chronique de l’intestin) courent un risque accru de cancer en raison de l’inflammation intestinale et de l’utilisation d’immunosuppresseurs auxquels ils sont exposés à un âge de plus en plus précoce, qu’il s’agisse d’un adénocarcinome colorectal (CCR) ou de l’intestin grêle, d’un cholangiocarcinome ou d’un cancer. cancer anal.
Ainsi, les patients qui ont une colite ancienne étendue (colite ulcéreuse, RCH, ou maladie de Crohn, MC, colique) ont un risque 5 à 8 fois plus élevé de développer un CCR. Sur une vie, ce risque peut atteindre 20 à 30 % chez les patients atteints de pancolite dès l’adolescence. La prévention et la détection du CCR reposent sur la surveillance endoscopique de tous les patients et sur la chimioprévention par les 5-aminosalicylates chez les patients à haut risque.
Les modalités précises de cette surveillance coloscopique ne font pas l’objet de consensus. Des auteurs néerlandais ont souhaité développer et valider un modèle de prédiction dynamique de l’apparition d’une néoplasie colorectale avancée ou NCRA (adénome mesurant plus de 10 mm, contenant une composante villeuse importante ou présentant une dysplasie de haut grade et un cancer) dans les MII.
6 cohortes de surveillance internationales, 8 prédicteurs
Ils ont regroupé les données de 6 études de cohortes de surveillance internationales (Canada, Pays-Bas, Royaume-Uni et États-Unis). Les patients ont été inclus s’ils répondaient aux critères suivants : (i) CU, MC ou MII non classés impliquant au moins 30 % de la surface du côlon, (ii) durée de la maladie > 7,5 ans ou toute durée de la maladie. maladie en cas de cholangite sclérosante primitive (CSP) concomitante, (iii) au moins une coloscopie ou colectomie (pièce chirurgicale évaluée par un pathologiste).
Les critères d’exclusion étaient une néoplasie diagnostiquée avant ou jusqu’à 3 mois après le début de l’étude, une colectomie avant le début de l’étude ou une indication peu claire de la surveillance du CCR.
Les variables prédictives ont été sélectionnées sur la base de la littérature. Huit prédicteurs ont ainsi été sélectionnés : maladie étendue, CSP, dysplasie antérieure (souvent de faible grade), sexe masculin, type de MII, polypes post-inflammatoires, âge au diagnostic et grade d’inflammation endoscopique le plus élevé. Un modèle de prévision dynamique a été développé à l’aide de la modélisation à risques proportionnels de Cox.
Les cohortes de surveillance comprenaient 3 731 patients, recrutés et suivis au cours de la période de 1973 à 2021, avec une période de suivi médiane de 5,7 ans (26 336 années-patients d’évaluation de suivi) ; 146 personnes ont reçu un diagnostic de CCR. Le modèle contenait 8 prédicteurs, avec une statistique médiane d’accord de validation croisée de 0,74 et 0,75 pour une fenêtre de prédiction de 5 et 10 ans, respectivement. Les résultats de validation croisée interne-externe ont montré une discrimination moyenne et un étalonnage correct.
Un modèle dynamique pour une prédiction individualisée
Cette étude présente plusieurs atouts : les résultats s’appuient sur une large base de données internationale combinée sur la surveillance coloscopique des MII permettant le développement et la validation interne-externe de ce modèle de surveillance. La présélection des prédicteurs est basée sur une méta-analyse approfondie et une revue de la littérature.
Une approche de modélisation dynamique a permis une utilisation répétée de ce modèle pour obtenir des prévisions de risque mises à jour tout au long du parcours d’un patient. Contrairement aux études antérieures aux années 2010, cette approche de modélisation n’inclut que des données récentes et a également permis d’inclure des prédicteurs variant dans le temps.
Les points faibles concernent le caractère rétrospectif, l’hétérogénéité des intervalles de surveillance coloscopique et des techniques endoscopiques entre cohortes/périodes. Dans ce modèle, la dysplasie antérieure augmentait significativement le risque de CCR. Pour le degré le plus élevé d’inflammation endoscopique, il convient de comprendre que ce prédicteur variable dans le temps pourrait ne pas décrire de manière adéquate la gravité de l’inflammation, car l’évolution de l’inflammation n’est pas prise en compte.
Outre la morphologie et le moment d’apparition de ces lésions, les auteurs ne disposaient pas d’informations sur les sténoses coliques, la présence d’un côlon tubulaire, les antécédents familiaux de CCR, le recours à la chromoendoscopie ou les coloscopies négatives répétées chez des patients sans réels facteurs de risque. .
Cette étude rétrospective de 6 cohortes internationales rejoint les résultats de Lutgens et Coll. (2015) et démontre l’avantage des prédictions individualisées utilisant un modèle multivarié au lieu des systèmes de classification actuels. Un nombre important de patients classés comme à haut risque présentaient de faibles risques prédits de CCR.
Un protocole de surveillance moins intensif peut être justifié dans ces cas. En revanche, les patients assignés à un faible risque avec des risques prédictifs de CCR relativement élevés avec ce modèle pourraient finalement bénéficier d’une surveillance intensifiée pour réduire les intervalles de CRC.
En attente de validation externe formelle
Les recherches futures devraient se concentrer sur la validation externe formelle et l’évaluation des performances des modèles dans des contextes non universitaires. Ensuite, pour traduire le modèle en un outil d’aide à la décision clinique, les scores de risque doivent être liés aux intervalles de surveillance basés sur les opinions des experts et des patients, car les preuves sur ce sujet font défaut.
En attendant, l’intervalle entre deux coloscopies de dépistage doit être de 6 mois en cas de suspicion de dysplasie laissée en place, d’un an en cas de CFP associée, de 1 à 5 ans dans les autres cas selon les résultats de la coloscopie index.
Contrairement à la MC, l’effet chimiopréventif des dérivés 5-aminosalicylés (5-ASA) dans la CU est désormais confirmé dans des méta-analyses de haute qualité. L’exposition à une dose quotidienne d’au moins un gramme est associée à une réduction de 50 % du risque de néoplasie colorectale. Cette chimioprévention est recommandée dès le diagnostic sauf chez les patients présentant une rectite pure en cas de maladie colique ancienne.
Il n’existe pas de données disponibles concernant l’éventuel effet chimiopréventif des anticorps anti-TNF et des nouvelles molécules. Quel que soit le phénotype de la MICI, il est utile de rappeler à tous les patients les éléments d’hygiène de vie qui contribuent à la prévention primaire des CCR sporadiques : arrêt du tabac, consommation modérée d’alcool et de viande rouge, lutte contre la sédentarité et le surpoids.
En conclusion, ce nouveau modèle prédictif a montré une bonne discrimination et un bon calibrage pour prédire la cancérisation des MII sans pouvoir produire de critères formels de généralisation. Les recherches futures devraient se concentrer sur la validation externe de ce modèle et relier les risques prédits de néoplasie colorectale avancée à des intervalles de surveillance personnalisés pour permettre la création d’un outil d’aide à la décision clinique.
La prévention et la détection du CCR reposent sur la surveillance endoscopique avec chromoendoscopie chez tous les patients à partir de la coloscopie index et la chimioprévention par 5-aminosalicylates chez les patients à haut risque.