L’âge de la dérision, au Minifest

Parce qu’il n’est jamais trop tard pour bien rire, Mimi Levert, 66 ans, et Marthe Leclerc, 73 ans, présentent leur premier spectacle lors du Minifest, un festival d’humour en plein essor.


Publié à 1h34

Mis à jour à 6h00

Nous sommes le 15 mai 2023, lors du Gong Show, le concours populaire du Bordel Comédie Club destiné aux étonnants talents amateurs. Marthe Leclerc vient de terminer un numéro pas pire délirant, au cours duquel elle a notamment prononcé les mots “gang bang”, source de rire garantie pour une femme qu’on imagine plus dans une sortie en groupe que dans un jeu de jambes en ressemble beaucoup de personnes.

Et le juge invité ce soir-là, le comédien Stéphan Allard, s’est exclamé : « Invitez-moi à dîner ! J’ai tellement de tantes ennuyeuses qui racontent toujours les mêmes histoires. »

« Tu vas t’amuser avec moi », répond Marthe, tout le contraire d’une mère ennuyeuse. « Moi aussi, je cuisine bien. Je fais du bon sucre à la crème. »

Mais il n’était pas question pour Marthe de passer sa vieillesse uniquement à mijoter du sucre et de la crème. En 2016, elle s’inscrit à des cours du soir à l’École nationale de l’humour comme d’autres s’initient au backgammon. « J’étais à la retraite et je voulais écrire. Je me suis dit : « Écrire de l’humour, ça doit être facile. » » Elle fronce les sourcils. “Mais ce n’est pas si simple, oh non !” »

«Je ne veux pas vous voler de coups de poing, mais j’étais le plus âgé de ma classe», raconte celui de 73 ans qui travaillait comme répartiteur à Urgences-santé et qui possédait une friperie sur le Plateau. Même si elle n’avait aucune ambition de monter sur scène, elle n’aurait pas pu résister à l’effet de groupe. « Je me suis dit : « Tout le monde le fait. Si je ne l’essaye pas, je le regretterai. »

Mimi Levert est depuis longtemps en tête d’affiche. Elle a la trentaine lorsqu’elle s’envole pour Paris, où elle s’inscrit dans une école de théâtre. «C’était une mauvaise décision», dit-elle à 66 ans, car je n’étais pas la fille que je suis aujourd’hui. Quand j’étais jeune, je m’excusais de respirer. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La comédienne Mimi Levert

Ce qui n’est plus le cas de celle qui s’est fait connaître sur la toile comme dresseuse de chiens (sous le nom de Mimi-Griotte) et qui a présenté son premier acte comique en juillet dernier. Le 20 juin, à l’occasion du Minifest, le festival réunissant toutes les franges de l’humour montréalais, elle partagera avec Marthe Leclerc l’affiche de L’âge de la dérisionleur premier spectacle commun.

Son objectif ultime ? Rien de moins qu’un one-woman show. Et un Olivier aussi, eh bien. « J’aimerais devenir la plus vieille Découverte de l’année. Et avant d’entrer dans un CHSLD, si possible. »

Quelle belle folie

A chaque sortie de scène, il ne faut pas oublier que Marthe Leclerc et Mimi Levert se font dire qu’elles sont inspirantes. « Alors tu as du courage », s’exclame Marthe, les mains de chaque côté du visage, exagérant son évanouissement.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

L’humoriste Marthe Leclerc

«Mais je n’appelle pas ça du courage», corrige-t-elle. « C’est juste que je suis fou. Et que je n’aime pas les affaires des personnes âgées. Non, je n’irai pas au club des seniors pour jouer au bingo et aux poches, sinon je vais déprimer. »

Ceux qui me disent que j’ai du courage sont souvent des gens de mon âge qui aimeraient sortir de leur zone de confort, mais qui n’osent jamais. Arrêtez de me dire que je suis inspirant et faites quelque chose ! Si vous ne faites rien, il ne vous arrivera rien !

Marthe Leclerc, comédienne

Cela signifie-t-il qu’ils aiment vieillir ? « J’aime ça, oui, parce que je fais ce qui me tente », répond Marthe. Je flippe à propos de tout. Et je reste actif, même si je ne fais pas de jogging ou d’escalade de montagnes. » Elle ajoute, d’un air taquin : « Mais j’ai déjà fait un marathon open mics, par exemple. »

Embrasser vos rêves

Même s’ils sont globalement bien accueillis par les autres comédiens avec lesquels ils participent aux open mics, ces deux recrues expérimentées ne puisent évidemment pas dans le même sac de sujets.

« Les jeunes font beaucoup de blagues sur les fréquentations ou les couples, des blagues sur leur mère et leur père », observe Marthe, dont l’humoriste préféré est le maître de l’absurde Jean-Michel Martel, de 40 ans son cadet, « mais Moi, ma mère et mon père, ils sont morts il y a longtemps ! Et puis les jeunes parlent de leurs enfants. C’est terrible d’avoir des enfants, de les entendre parler. Mais j’ai eu des enfants et je ne suis pas mort ! »

Mimi essaie d’injecter un peu de sérieux dans notre conversation. « On a des histoires de vie incroyables, c’est le bon matériau pour des numéros de comédie », souligne-t-elle, ce qui n’est d’ailleurs pas toujours le cas de tous les vingt ans qui s’emparent du micro avant même si leur nombril est sec.

Un conseil pour les jeunes ? Il n’est pas nécessaire de demander à Marthe. « Il faut oser, tout le temps. Vous êtes en bonne santé, vous êtes belle, vous avez tout. N’attendez pas après les autres. Vous êtes capable de vous sortir du pétrin par vous-même. »

Mimi poursuit sur un ton plus sérieux : « Je dirais qu’il faut oser embrasser ses rêves. Peu importe notre âge. »

L’âge de la dérision20 juin, à 19h30, au Bistro Le Ste-Cath

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