Le festival Hot Docs commence au milieu d’une controverse

TORONTO – Le plus grand festival de documentaires en Amérique du Nord, Hot Docs, se déroule cette année du 25 avril au 5 mai. Mais au-delà de la programmation, ce sont surtout les querelles internes qui retiennent l’attention du public et des médias pour ce 31e édition. Après des démissions massives et un appel à l’aide pour obtenir davantage de financement, il n’est pas clair si l’organisation à but non lucratif poursuivra son événement phare l’année prochaine.

En mars dernier, le directeur artistique du festival Hot Docs, Hussain Currimbhoy a démissionné pour « raisons personnelles », selon l’organisation. Une dizaine de programmeurs ont également quitté le navire. Le 26 mars 2024, ces derniers ont publié un communiqué commun dans lequel ils affirment avoir agi de manière indépendante des autres membres du personnel.

“La programmation de Hot Docs est un travail d’amour : un amour à la fois pour les films et leurs créateurs, ainsi que pour le processus de sélection”, indique le communiqué. Les ex-salariés affirment ne pas avoir pu poursuivre leurs tâches, en raison d’une dégradation de leur environnement de travail.

« Nous avons dû travailler dans un environnement en constante évolution, chaotique, non professionnel et discriminatoire. »

— Lettre commune des 10 programmeurs démissionnaires

La missive accuse l’organisation de manquer de respect au protocole et à la communication de l’entreprise, de faire taire les voix des membres de l’équipe et de rompre les contrats de divers programmes. Les deux parties auraient tenté de parvenir à un accord, mais le point de non-retour s’est produit lorsque Hot Docs a refusé d’être transparent avec le public, comme le demandaient ses programmateurs, selon eux.

«Pour qu’un événement de classe mondiale comme Hot Docs reste pertinent et réussi, l’équipe de programmation estime qu’elle doit être tenue responsable» de ses décisions. Les dix signataires concluent en rappelant qu’ils soutiennent tous les films au programme et tous les documentaristes qui s’efforcent de dire la vérité face au pouvoir.

Des soucis financiers

Avant même les démissions évoquées plus haut, la présidente de Hot Docs, Marie Nelson, avait abordé publiquement les enjeux financiers de l’organisation. Selon elle, les effets de la pandémie se font encore sentir. Outre une interruption forcée du festival, revenu en 2023, le cinéma Ted Rogers Hot Docs, premier et plus grand cinéma dédié au documentaire au monde, a dû fermer ses portes pendant deux ans.

L’Américaine Marie Nelson a été embauchée comme présidente de Hot Docs il y a moins d’un an.
Source : Page Facebook du Festival international canadien du documentaire Hot Docs

L’asbl aurait du mal à se remettre de cette période. Ses dirigeants demandent une aide financière supplémentaire aux trois niveaux de gouvernement. Les espoirs étaient grands lors du dépôt du budget fédéral, mais Hot Docs est reparti les mains vides. Cependant, le Festival international du film de Toronto (TIFF) a obtenu 23 millions de dollars sur trois ans.

Dans un communiqué, les dirigeants de Hot Docs ont réagi en affirmant que « le gouvernement fédéral a choisi des gagnants et des perdants dans le paysage culturel canadien. » L’organisation rappelle ses craintes que le 31e L’édition du festival, qui commence aujourd’hui, n’est peut-être pas la dernière.

Dans une entrevue au Globe and Mail, Nicholas de Pencier, qui est membre du conseil d’administration, précise : « C’est un gouvernement qui a déclaré la guerre à la désinformation et a lancé plusieurs initiatives pour soutenir un journalisme basé sur des faits. Bien entendu, le financement d’institutions artistiques comme le Shaw Festival et nos frères et sœurs du TIFF est extrêmement important. Mais ce que fait Hot Docs est directement lié à cet objectif. »

Des divergences politiques ?

ONFR a essayé de contacter les 10 programmeurs qui ont démissionné. Ceux qui ont répondu à nos messages ont décliné nos demandes d’entretien et nous ont redirigés vers leur déclaration commune citée ci-dessus. Les dirigeants de Hot Docs ont également décliné notre demande d’entretien, invoquant le manque de temps.

Certaines rumeurs sur les réseaux sociaux mentionnent que des divergences de vues sur la guerre entre Israël et le Hamas pourraient être à l’origine de ces démissions.

Un autre irritant serait l’embauche de Marie Nelson en juin 2023. Cette dernière est une Américaine toujours basée à Washington. Certains craignent que la pertinence de la présentation des œuvres canadiennes en pâtisse, et dénoncent les coûts des déplacements entre les capitales américaine et ontarienne.

Mais les problèmes d’environnement toxique remontent bien avant son embauche et même avant la pandémie.

La programmation du festival Hot Docs comprend quelques documentaires en français. La directrice culturelle Joanne Belluco en propose une sélection sur la page Instagram deONFR. Crédit image : ONFR

Le 31e Le festival Hot Docs a lieu à Toronto du 25 avril au 5 mai. En plus du festival et du cinéma Ted Rogers, l’organisme est responsable de programmes de développement professionnel, d’un fonds de production et de projections gratuites dans les écoles, par l’intermédiaire du programme Docs for School. Hot Docs emploie un peu moins d’une cinquantaine de personnes à temps plein, en plus d’employés contractuels, selon l’entrevue accordée au Globe and Mail et citée plus haut.

 
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