Les « vagues itinérantes » transportent vos souvenirs

Les « vagues itinérantes » transportent vos souvenirs
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Vous venez d’arriver dans un nouveau pays et vous voilà devant un splendide monument. Une image qui, forcément, s’ancre dans votre mémoire. Votre cerveau « code » cette mémoire : il la grave et la stocke quelque part dans vos neurones. Mais comment s’y prend-il ?

Des années plus tard, des images, des sons et des odeurs affluent, recréant soudain la sensation d’être devant le monument en question. Vous vous souvenez alors de ce souvenir. Ce qui s’est passé ?

Eh bien, dans votre cerveau, la mémoire a aussi voyagé. Au moment de l’encodage, elle était transportée par une onde électrique générée par votre cerveau, appelée « onde voyageuse ». Celui-ci s’est déplacé du point d’entrée de la mémoire au niveau de la tempe (dans une zone appelée « hippocampe ») vers l’avant de votre cerveau, dans le lobe frontal. Ensuite, lorsque vous récupérez ce souvenir, l’onde parcourt le chemin inverse pour vous le ramener. Et vous l’avez sous les yeux.

Comment ce phénomène a-t-il été découvert ? A l’Université de New York, un groupe de quatre scientifiques ont réalisé des expériences d’électrocorticographie : il s’agit d’une technique qui consiste à implanter de minuscules électrodes à la surface du cerveau de volontaires et à enregistrer les décharges électriques produites par ces cellules nerveuses lorsqu’elles subissent divers tests. Bien entendu, on ne pratique pas ce type d’opération uniquement pour savoir comment bougent les souvenirs : ces personnes doivent de toute façon subir une chirurgie cérébrale pour soigner les crises d’épilepsie, et les équipes de chercheurs en profitent simplement, avec leur accord, pour procéder à des examens complémentaires. Ce dernier a donc placé des électrodes d’enregistrement à la surface du cortex de 93 patients et leur a demandé d’apprendre des listes de mots, puis, après un délai d’attente, d’en restituer de mémoire le plus grand nombre possible. Ils pourraient ainsi étudier la phase d’encodage et de récupération des souvenirs.

Un va-et-vient d’ondes mémorielles

Les chercheurs ont alors observé qu’au moment de l’encodage, les neurones situés au niveau de la tempe émettaient des ondes à une fréquence de 10 herz, soit dix oscillations par seconde. Cependant, ces ondes ne sont pas restées confinées aux neurones du cortex temporal : elles se sont déplacées vers l’avant du cerveau, vers le lobe frontal, à une vitesse d’environ un mètre par seconde (3,6 km/h, environ la vitesse de la marche). Puis, lors de la phase de récupération de la mémoire, lorsque les participants cherchaient à se souvenir des mots qu’ils avaient vus dans la liste, la même onde voyageait dans le sens inverse, revenant du lobe frontal au lobe temporal pour « ramener la mémoire ».

Que nous apprennent ces observations sur le fonctionnement de la mémoire ? Tout se passe comme si les souvenirs étaient envoyés à un bureau central situé dans le lobe frontal, prêts à être extraits par celui-ci à tout moment. Lorsque nous voulons mémoriser une information, cette « volonté » est généralement exercée par le lobe frontal. Mais l’observation de cette onde apporte une autre information : il s’agit d’une propagation relativement lente, comparée à d’autres phénomènes neuronaux qui peuvent atteindre une vitesse de 100 mètres par seconde (soit 360 km/h). Ces modes de conduction de l’information neuronale suivent probablement des trajets superficiels, le long des ramifications horizontales de neurones appelés dendrites, dont la conduction est lente, et non des trajets profonds mobilisant des axones à conduction rapide. Un peu comme des vagues à la surface d’un lac. Reste à savoir pourquoi…

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