« Une belle opportunité de faire progresser la neurorééducation »

« Une belle opportunité de faire progresser la neurorééducation »
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Santé de la planète : Qu’est-ce qui a motivé la création du Centre de recherche NeuroRehab ?

Expresso bio

1978 Né à Varèse, en Italie.

2001 Master en psychologie expérimentale à l’Université de Milan, Italie.

2002 Neuropsychologue au Centre de Neurosciences Cognitives de Cesena, Italie.

2006 Doctorat (PhD) en psychologie expérimentale et professeur adjoint à l’Université de Bologne, Italie.

2012 Chercheur au Centre de Neuroprothèses de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL).

2016 Responsable des neurosciences chez MindMaze SA.

2017 Professeur assistant (FNS Fellow) à l’Université de Lausanne (UNIL) dans le Service de Neuropsychologie et Neuroréadaptation du Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) et directeur du Laboratoire CHUV MySpace.

2022 Professeur agrégé à l’UNIL dans le Département de Neuropsychologie et Neuroréadaptation du CHUV et directeur du Centre de Recherche NeuroRehab, CHUV-UNIL.

Professeur Andrea Serino : Ce nouveau centre fait partie du projet SUN (Service Universitaire de Neuroréadaptation), né de la volonté du canton de Vaud, du CHUV, de l’UNIL et de l’Institution de Lavigny de créer un nouveau service de neuroréadaptation visant à repenser les structures de soins existantes sur Lavigny et le CHUV. site. Un pilier fondamental de ce projet est le Centre de recherche NeuroRehab, qui rassemble en un même lieu des mondes parfois distincts : la recherche, les soins cliniques et l’ingénierie pour l’innovation technologique, le tout à proximité des patients. Dans un domaine comme la neuroréadaptation, l’optimisation de ces synergies est fondamentale pour améliorer les soins. Cette structure est une belle opportunité pour la développer.

Quels sont les patients concernés ?

Le Centre de recherche NeuroRehab s’adresse en priorité aux personnes souffrant de lésions neurologiques suite à un accident vasculaire cérébral ou un traumatisme crânien. Le plus souvent, les patients du site de Lavigny étaient d’abord soignés au CHUV en réanimation puis pour les premières étapes de neurorééducation. Une neurorééducation intensive se poursuit ensuite à Lavigny sur le long terme. Cependant, l’enjeu de cette phase est encore important pour favoriser la récupération de certaines facultés neurologiques.

Cela implique-t-il une innovation technologique ?

En partie, c’est sûr. Aujourd’hui, la neuroréadaptation avance avec deux nouveaux piliers majeurs : la recherche et l’innovation. La première est essentielle : mieux comprendre le fonctionnement du cerveau permet, et permettra, de mieux le « réparer » lorsqu’il subit des dommages. Côté innovation, les possibilités sont infinies, dans des spécialités aussi variées que la réalité virtuelle, la robotique, la neuroimagerie ou encore la stimulation cérébrale non invasive. Nous pouvons nous réjouir de la richesse des compétences du bassin lémanique dans ces différents domaines. NeuroRehab rassemble des experts en ingénierie du CHUV, de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) et de diverses start-up. Tout l’enjeu : proposer aux patients les meilleures options thérapeutiques possibles basées sur les connaissances scientifiques actuelles et développer des neurotechnologies qui répondent au plus près à leurs besoins.

Concrètement, comment cela s’organise-t-il ?

Le processus reste le même que pour tout projet relatif à la recherche médicale, à savoir le développement de prototypes, les phases de développement, les tests de faisabilité en laboratoire et la validation par des études cliniques dans le respect de la rigueur méthodologique. Au sein de NeuroRehab, les laboratoires de recherche étant situés à proximité immédiate des structures de soins, ces différentes étapes profitent pleinement des interactions permanentes possibles entre les protagonistes clés que sont les chercheurs, les scientifiques, les soignants et les patients eux-mêmes.

Sommes-nous aujourd’hui à un tournant dans la neurorééducation ?

J’en suis convaincu et c’est nécessaire. En effet, il faut pouvoir aller plus loin dans ce qui est proposé aux patients concernés, en termes de soins, de thérapies personnalisées, mais aussi de suivi, y compris après une hospitalisation. Aujourd’hui, de nombreuses personnes qui sortent de l’hôpital, après des semaines ou des mois de traitement, souffrent encore de déficits liés au traumatisme crânien ou à l’accident vasculaire cérébral dont elles ont été victimes. Et bien souvent, l’offre de soins s’effondre : l’écart entre le nombre d’heures de soins proposés à l’hôpital et celui possible à domicile est bien trop grand. Ces thérapies restent cependant indispensables, à la fois pour maintenir les progrès réalisés et pour aller encore plus loin dans la récupération fonctionnelle. Cet aspect des soins est une préoccupation pour de nombreux pays. Elle est notamment liée à un dilemme quasi mathématique : en neurorééducation comme dans bien d’autres domaines de la santé, les besoins continuent d’augmenter, mais le nombre de soignants diminue et les défis financiers augmentent.

Quels sont les moyens de faire face à cette situation ?

Dans ce contexte, la neurorééducation doit absolument changer de paradigme. La télémédecine jouera un rôle majeur. L’idée n’est pas du tout de laisser le patient seul à distance ou de se passer des soins prodigués à domicile par des kinés ou des ergothérapeutes par exemple, mais de trouver des solutions pour accroître l’offre de soins et la personnaliser au maximum. Et cela passe entre autres par de nouvelles innovations technologiques.

Lesquels par exemple ?

La réalité virtuelle offre de nouvelles perspectives incroyables. Equipés de casques spécifiques (casques VR), les patients peuvent s’immerger dans des jeux immersifs spécialement conçus pour stimuler certaines facultés cérébrales. Les innovations se multiplient dans ce domaine qui va bien au-delà des simples « jeux ». Nous parlons ici de véritables outils thérapeutiques. Autre piste en développement pour stimuler la neurorééducation à domicile : la mise en place d’un système connecté à l’hôpital permettant aux patients de poursuivre leur entraînement avec un suivi précis, si besoin en temps réel, par leurs soignants.

Tout cela ouvre de nouvelles perspectives, y compris pour le système de santé lui-même…

Absolument. Ce sont des aspects que nous étudions également, notamment dans le cadre d’un projet national financé par Innosuisse, impliquant de multiples partenaires, que nous coordonnons, SwissNeuroRehab, avec des experts travaillant en étroite collaboration avec l’Etat, les services cantonaux et les assurances. Le changement de paradigme en cours implique invariablement également des considérations structurelles, administratives et financières pour rendre possibles ces nouvelles modalités de soins.

Reste le cerveau lui-même et ses mystères encore bien gardés… La recherche progresse-t-elle aussi dans ce domaine ?

Oui, même s’il reste encore beaucoup à découvrir. Une chose est sûre : ces dernières années, une évolution s’est opérée dans la compréhension du cerveau grâce notamment aux progrès de l’imagerie médicale. Nous sommes particulièrement conscients que le cerveau est bien plus complexe que nous l’imaginions. On a par exemple longtemps pensé que son fonctionnement était organisé en régions quasi cloisonnées, chargées de traiter des données spécifiques. Pourtant, tout porte à croire que les choses ne sont pas si « simples » et que les interactions entre ces zones sont permanentes et extrêmement élaborées.

Certains mystères se dissipent cependant, comme le démontrent régulièrement les publications scientifiques…

Oui, car tout en mesurant l’immense complexité du cerveau, nous avons aussi accès à de plus en plus de données et à des systèmes d’analyse informatique particulièrement performants, comme l’intelligence artificielle par exemple. Et les progrès pourraient encore s’accélérer dans les années à venir grâce notamment à l’amélioration des méthodes d’enregistrement. La mise en place de dispositifs plus invasifs – via des électrodes directement implantées dans le cerveau par exemple – pourrait conduire à des découvertes spectaculaires. L’espoir qui en résultera sera bien sûr de nouvelles perspectives dans la prise en charge des maladies et lésions neurologiques.

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*www.ilavigny.ch

Publié dans Planète Santé magazine n°52 Mars 2024

 
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