L’artiste sud-coréen Lee Ufan pose ses pierres, ses toiles et son regard à Berlin

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« De la ligne » (1977), de Lee Ufan. LEE UFAN/VG BILD-KUNST, BONN 2023/SHU NAKAGAWA

La France, pays d’adoption de Lee Ufan, est particulièrement bien équipée pour explorer son travail au long cours, puisque l’artiste sud-coréen est connu pour ses créations épurées et méditatives. a ouvert à Arles (Bouches-du-Rhône), en 2022, un centre d’exposition dédié à son œuvre – son troisième lieu après le Musée Lee-Ufan sur l’île de Naoshima, au Japon, et l’Espace Lee-Ufan du Musée de Busan de Art, en Corée du Sud, a ouvert ses portes en 2010 et 2015. L’Allemagne, à l’inverse, n’avait jusqu’ici jamais présenté de rétrospective de l’artiste de 87 ans. C’est désormais chose faite, et bien faite, par le jeune duo de directeurs de la Hamburger Bahnhof, le musée national d’art contemporain de Berlin, Sam Bardaouil et Till Fellrath.

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Né en 1936 dans le sud de la péninsule coréenne, alors incluse dans l’Empire du Japon, l’artiste part poursuivre ses études d’art au Japon à l’âge de 20 ans. Il y étudie la philosophie occidentale moderne – notamment les Allemands Hegel, Kant, Nietzsche. et Heidegger – qui a structuré sa pensée et sa manière de faire de l’art. Au-delà de cette affinité particulière avec la philosophie allemande, l’invitation adressée à Lee Ufan par le duo de commissaires répond à leur volonté de bousculer et de déplacer le regard sur les grandes catégorisations de l’histoire de l’art : « Quand on découvre ses installations, elles semblent correspondre parfaitement à l’école du minimalisme, et sa peinture au registre de l’abstraction, mais quand on commence à écouter ce qu’il dit et à comprendre d’où il vient, on se rend compte que tout cela est pour lui seulement des points de départ”résume Sam Bardaouil.

L’exposition s’ouvre sur un fracas aussi silencieux qu’expressif, datant de 1968 : une grosse pierre a brisé une grande fenêtre carrée au sol en son centre. Cette œuvre à l’écho politique, puisqu’elle s’inscrivait dans le contexte d’une contestation mondiale contre un système jugé dépassé, de Mai 68 au mouvement contre la guerre du Vietnam, porte aujourd’hui une charge plus intemporelle et universelle. L’artiste a également recréé cette cassure sur place, avec une autre pierre et une autre fenêtre que celles d’origine – pour lui en effet, l’idée et le moment qui l’a déclenchée comptent plus que la physique de l’objet elle-même.

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Vue de l'exposition « Lee Ufan » à la Hamburger Bahnhof, Berlin, en octobre 2023.

Vue de l’exposition « Lee Ufan » à la Hamburger Bahnhof, Berlin, en octobre 2023. LEE UFAN/VG BILD-KUNST, BONN 2023/JACOPO LA FORGIA

L’installation est entourée de peintures réalisées la même année, et qui semblent être celles d’un autre artiste : inspirées de l’op art, ces peintures géométriques aux couleurs fluorescentes violentes contrastent, par leur saturation, avec la sobriété de ses installations. Encore une fois, tous ne sont pas originaux : certains ont été détruits, et il les a reproduits en 2022.

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